Nouvelle série, n°11
2nd semestre 2024 |
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Médias locaux et réseaux socionumériques face à la pollution de l’air : vers de nouvelles dynamiques sociodiscursives ?
Emmanuel Marty, Université Grenoble-Alpes
Jean-Marc Francony, Université Grenoble-Alpes
Alexander Kondratov, Université Clermont Auvergne
Résumé
Cet article propose d’interroger la capacité des nouveaux entrants de l’information locale de la région Rhône-Alpes à renouveler à la fois les sources et les processus d’alimentation du débat démocratique sur la question de la qualité de l’air, notamment par une attention supposément plus forte que la PQR aux porteurs de cadrages minoritaires. Nous interrogeons à cet égard la place de Twitter en tant que dispositif sociotechnique dans la dynamique de circulation des discours entre porteurs de cause et médias locaux dans l’espace local. Notre recherche combine deux volets : premièrement, une approche comparative des cadres médiatiques présents dans la PQR, chez les nouveaux entrants et sur Twitter, passant par une classification descendante hiérarchique ; deuxièmement, une analyse de nature quali-quantitative des types sources et locuteurs accolés aux cadres dans ces trois corpus.
Abstract
The objective of this article is to question the ability of new local media in the Rhône-Alpes region to renew both the sources and the processes of feeding the democratic debate on the issue of air quality, in particular by a supposedly stronger attention than the regional daily press to the marginal frame holders. In this respect, we question the place of Twitter as a sociotechnical device in the dynamics of discourse circulation between cause bearers and local media in the local space. Our research combines two aspects: first, a comparative approach of the media frames conveyed by regional daily press, by new local media and through Twitter, using a hierarchical top-down classification; second, a qualitative-quantitative analysis of the types of sources and speakers attached to the frames in these three corpora.
DOI : 10.31188/CaJsm.2(11).2024.R015
L
a thématique environnementale est parvenue au cours des deux dernières décennies à s’immiscer de manière croissante dans l’agenda médiatico-politique français. Cette visibilité des questions environnementales, si elle paraît aujourd’hui naturelle, ne s’est pourtant pas imposée sans mal. Elle doit beaucoup à l’implication d’une écologie, scientifique puis politique, dont les acteurs s’attachent depuis plusieurs décennies à promouvoir les questionnements et les pistes de réflexion dans l’espace public. Mais, comme le montre Comby (2009), ce développement s’est accompagné d’un mouvement d’institutionnalisation de la thématique environnementale, marqué par l’autonomisation des journalistes spécialisés d’avec les mouvements associatifs desquels la plupart d’entre eux est issue et par une neutralisation du propos, qui en est le corollaire discursif. La médiatisation des questions environnementales semble aujourd’hui en grande partie liée au caractère récurrent de phénomènes (naturels et industriels) mettant en visibilité l’impact des activités humaines sur l’environnement, a fortiori lorsqu’il s’agit de traiter de ces questions dans l’espace local (Gassiat et Verger, 2016). Là où les catastrophes industrielles et les phénomènes climatiques extrêmes (inondations, sécheresse, incendies) revêtent un caractère spectaculaire, relevant de l’accident au sens de la typologie de Moloch et Lester (1997), la question de la pollution de l’air, dont il sera question ici, est moins visible que d’autres formes de désordres écologiques. Elle ne semble par conséquent pouvoir acquérir le statut de « problème public » que par le truchement d’une médiation d’abord scientifique (la mesure de la pollution), puis éventuellement politico-administrative (l’instauration par la préfecture de seuils d’information et d’alerte auprès de la population). Le concept de « construction des problèmes publics » relève en effet, pour Henry (2020) des « processus par lesquels les problèmes sociaux (ou toute question ayant une existence plus ou moins localisée dans l’espace social) acquièrent une dimension publique. Parler de construction des problèmes publics souligne que les processus de publicisation sont tout sauf naturels ou spontanés, et qu’il n’y a pas de lien direct entre l’importance objective d’un problème et la surface publique qu’il occupe […]. Les processus de publicisation sont au contraire le produit de multiples investissements et mobilisations issus d’acteurs et de groupes d’acteurs n’ayant parfois qu’un lien très indirect avec le problème en cause. » (p. 152). En l’occurrence, le traitement médiatique de la qualité de l’air, qui en conditionne la mise en politique, semble empiriquement s’effectuer surtout « en creux » lors des différents pics de pollution, les médias se faisant le relai d’une information émanant de ces sources d’autorité scientifique et politico-administrative. L’ancienne région Rhône-Alpes est particulièrement touchée par le phénomène, avec environ 6 000 décès annuels dus à l’exposition de la population aux particules fines ou au dioxyde d’azote, notamment dans les zones urbaines de Lyon et de Grenoble (Santé publique France, 2021). Qu’en est-il de la médiatisation de ces enjeux sanitaires et écologiques dans l’espace local de ces deux zones urbaines ? Quelles sont les aptitudes médiatiques à restituer les enjeux, débats et conflictualités à l’œuvre dans l’espace local rhônalpin, et dans quelle mesure et selon quelles modalités les discours des différents « porteurs de cause » (Neveu, 2017) peuvent-ils acquérir une forme de publicité, éventuellement décorrélée des épisodes de pollution ?
Poser la question de l’information médiatique dans l’espace local1 implique de s’intéresser aux spécificités de son acteur historique : la presse quotidienne régionale (PQR). La PQR, longtemps seule actrice de l’information locale, a souvent été pointée comme un média de diversion (Ballarini, 2008), centré sur une fonction de service (Bousquet et Amiel, 2021). Sa proximité avec les acteurs politiques et économiques du territoire la rend peu encline à restituer la diversité et la complexité des débats à l’œuvre dans l’espace local (Marty, 2015 ; Bénistant et Marty, 2018), notamment quand ces débats impliquent les exécutifs (Kaciaf 2018). Au cours des vingt dernières années, sont apparus de « nouveaux entrants » de l’information locale, fondant leur traitement journalistique sur d’autres valeurs (Bousquet, Marty et al., 2015) : investigation et innovation éditoriale, distance vis-à-vis des sources institutionnelles, transparence, responsabilité vis-à-vis des lecteurs et volonté de se saisir de la complexité des thématiques politiques délaissées par la PQR. Certains sont nativement numériques tandis que d’autres, au contraire, donnent la priorité au support papier. Beaucoup sont, en tout cas, portés par la volonté de revitaliser un débat public local qu’ils accusent parfois explicitement la PQR d’avoir rendu atone.
Dans ce contexte, l’objectif de la présente contribution est d’interroger la capacité de ces nouveaux entrants de l’information locale à renouveler à la fois les sources et les processus d’alimentation du débat démocratique sur une question environnementale majeure dans leur territoire de diffusion, notamment par une attention supposément plus forte que la PQR à des acteurs marginaux ou minoritaires, dont une partie importante émerge sur les réseaux socionumériques (RSN). Si la question de la construction médiatique des problèmes publics suscite l’intérêt des chercheurs français en sciences humaines et sociales depuis la fin des années 1980, son adossement à l’analyse de la circulation des discours au sein de l’espace public médiatique demeure à notre sens une piste à ce jour sous-exploitée. C’est dans cette approche que la présente contribution entend se placer, en mobilisant l’analyse de discours au service de l’identification des modalités de circulation de sens entre médias d’information et porteurs de causes. Ces derniers cherchent en effet à faire émerger leurs positions et définitions, tantôt via les RSN, donc hors de la médiation journalistique, tantôt en parvenant à se constituer en sources médiatiques, les deux voies pouvant se croiser à de multiples reprises.
Les RSN facilitent en effet les interactions de toutes sortes et la mise en question des régimes institutionnels de légitimité des discours médiatisés, faisant passer les médias, selon Bruns (2005), d’une activité de gatekeeping à celle de gatewatching, consistant pour les utilisateurs à publiciser l’information plutôt qu’à la publier. Dans ce contexte, la question de la médiatisation semble dotée de formes et de potentialités nouvelles dans les agencements et les ajustements mutuels des discours d’acteurs au sein des médias d’information et des RSN. Comme le mentionnent Bousquet et ses collaborateurs (2020), les médias locaux peuvent être mobilisés sur les RSN par des groupes d’utilisateurs partageant des intérêts communs, qui sélectionnent, diffusent et discutent les informations alimentant le débat et leur donnant des arguments pour défendre leurs positions. Un constat également partagé par Compagno et ses collaborateurs (2017), qui ajoutent à cela l’existence d’un travail de veille et de recommandation, voire d’autoproduction de contenus, émanant d’utilisateurs n’étant pas nécessairement des journalistes professionnels.
Dans le sillage de l’intuition de Bruns étayée par de récents travaux français, il semblerait donc que nous soyons aujourd’hui face à une « polyphonie énonciative de proximité » (Amiel, 2018), mêlant médias locaux et utilisateurs des RSN s’inscrivant dans les territoires couverts par les premiers. Mais au vu des spécificités de la PQR d’une part et des nouveaux entrants d’autre part, cette polyphonie énonciative devrait trouver des développements assez différents d’un type de presse à l’autre.
Pour répondre à notre question de recherche générale, nous exposerons dans une première partie nos hypothèses, structurées autour des concepts de cadrage et de source médiatique. Nous détaillerons dans une deuxième partie les caractéristiques de nos trois corpus de publications issues de médias locaux (PQR et nouveaux entrants) et de Twitter2 en explicitant nos méthodes de collecte, avant d’exposer nos méthodes d’analyses semi-automatisées du discours et notre approche sociosémiotique de ce dernier. Les résultats seront dans un troisième temps présentés et commentés : nous préciserons les similitudes et spécificités de la PQR et des nouveaux entrants quant à la médiatisation de la pollution de l’air dans l’espace local, avant de nous attacher à la place de Twitter dans le renouvellement des dynamiques sociodiscursives de médiatisation des enjeux environnementaux.
Médiatiser la pollution de l’air : une compétition des cadrages
Dans l’ancienne région Rhône-Alpes, le caractère fréquent des pics de pollution de l’air donne à ces événements une dimension assez routinière. La médiatisation du sujet pourrait de ce fait être essentiellement assise sur l’emploi de « cadrages épisodiques » (Iyengar, 1991), c’est-à-dire des cadrages courts centrés sur la relation de faits bruts venant illustrer un sujet (le pic de pollution). Ces cadrages courts favorisent une forme de fragmentation et de décontextualisation du sujet, par opposition à un « cadrage thématique » plus large interrogeant conjointement causes et conséquences du fait relaté. La première hypothèse que l’on peut formuler sur le traitement de la pollution de l’air serait donc celle de l’emploi préférentiel de cadrages épisodiques par la PQR, résultant de sa forte dépendance aux sources et cadrages institutionnels des territoires. De leur côté, les nouveaux entrants de l’information locale devraient être à même de porter des cadrages à la fois moins routiniers et moins dépendants des seules sources institutionnelles, donc potentiellement plus diversifiés.
En parallèle, Twitter constitue de son côté un espace d’expression pour les divers porteurs de cause. Il constitue en cela un miroir certes déformant de l’opinion publique (Boyadjian, 2014) mais dont les propriétés sociodiscursives en font un terrain privilégié de l’étude de la circulation des discours dans l’espace public numérique (Ratinaud, Smyrnaios et al., 2019), au sein duquel se côtoient médias, acteurs politiques et institutionnels, scientifiques, associations, activistes, citoyens, etc. Des cadrages diversifiés devraient donc y être identifiés, en lien avec des comptes de locuteurs aux statuts eux aussi divers. Il s’agit là d’une deuxième hypothèse.
On peut enfin avancer que l’attention portée par un certain nombre de nouveaux entrants aux discours circulant sur les RSN pourrait, c’est notre dernière hypothèse, permettre une circulation des discours plus facile entre porteurs de cause et champ médiatique, dans un agencement bi-directionnel, c’est-à-dire impliquant la mobilisation par ces médias de locuteurs ou de cadrages présents sur Twitter, mais également la mobilisation préférentielle de ces médias par ces locuteurs sur Twitter. Des similitudes de cadrage pourraient ainsi s’observer entre médias et différents locuteurs sur Twitter, dans des configurations complexes mais privilégiant les liens entre locuteurs non institutionnels sur Twitter et nouveaux entrants de l’information locale. Symétriquement, il s’agit d’interroger la position référentielle qu’occupent les médias (PQR ou nouveaux entrants) sur Twitter, considéré comme arène du débat contradictoire (Sebbah, Loubère et al., 2018). La mise en avant ou en discussion de faits ou d’événements justifie le signalement d’URL pointant des ressources pertinentes (sinon utiles) dans les débats ou conversations entre interlocuteurs. Parmi le large éventail de ressources du web, les articles de presse devraient conserver une place importante, les cadrages médiatiques étant mobilisés par les utilisateurs de Twitter pour diffuser, commenter et interagir sur l’actualité. Il s’agirait alors d’une forme de renouvellement de la « discursivité sociale » (Véron, 1988 ; Delforce et Noyer, 1999), en ce sens que la circulation facilitée de certains cadrages depuis leurs porteurs jusqu’à l’espace public se ferait conjointement sur les RSN et via certains médias dans une mobilisation mutuelle des uns par les autres, renforçant les logiques socioaffinitaires de circulation des discours (éventuellement moins circonscrites aux territoires) et brouillant ou aplanissant sur Twitter les statuts de sources et de publics de l’information.
Dans les hypothèses précédemment formulées, nous mobilisons le concept de cadrage en le situant dans le prolongement des travaux (essentiellement nord-américains) sur les media frames (Gitlin, 1980 ; Entman, 1993). On peut ainsi considérer les cadres médiatiques comme des schémas d’interprétation destinés à structurer de manière intelligible et cohérente l’ensemble des stimuli auxquels nous sommes exposés. En les appliquant aux médias, Gitlin (1980) les conçoit comme des processus tacites qui contribuent à organiser le monde à la fois pour les journalistes et pour leurs publics, en accord avec le positionnement d’un titre particulier au sein d’un « marché de la discursivité sociale » (Véron, 1988). Neveu (1999) ajoute que les cadrages opérés par les différents médias sont tributaires des logiques du travail journalistique « en termes de routines, d’utilisation de précédents comme outils interprétatifs, de sélection des sources, de définition de la newsworthiness » (p. 34). Les différences de logiques journalistiques évoquées plus haut devraient donc se traduire par des différences en termes de cadrages proposés aux lecteurs, et ce d’autant plus que comme le précise Gamson (1992), le cadrage est largement tributaire du crédit attribué à une source par le journaliste au moment du recueil des informations.
Ces réflexions permettent de comprendre le lien entre d’une part les caractéristiques sociosymboliques des sources jouant sur leurs relations aux journalistes et d’autre part leur poids sociodiscursif sur la nature des informations produites par les médias. Gamson montre en effet l’existence d’une compétition de cadrages (« framing contest »), dont les différents discours médiatiques seraient autant de résultats. Ce postulat d’une compétition des cadrages sera central dans notre travail d’analyse, considérant la volonté d’individus et de collectifs porteurs de causes d’imposer dans l’espace public leur définition de la situation, que ce soit en mobilisant les potentialités de dissémination socioaffinitaire des réseaux ou en cherchant à se constituer en sources médiatiques, les deux voies pouvant s’alimenter mutuellement dans un mouvement de circulation des discours de l’une à l’autre. Ces acteurs, dont les ressources sociosymboliques et matérielles d’accès aux médias sont très inégalement réparties, doivent ainsi trouver des stratégies de mise en visibilité et de légitimation de leurs positions afin de faire accéder une question au statut de problème public (ou du moins à celui de sujet newsworthy pour les médias) dans les termes qui sont les leurs ou, à défaut, de faire évoluer ces termes en réponse aux cadrages initiaux portés par d’autres. Cette distinction entre initiateurs des nouvelles et acteurs capables d’en modifier les termes est importante. C’est notamment l’objet d’un travail effectué par Dekavalla et Jelen-Sanchez (2017), dessinant une taxinomie heuristique des catégories de sources mobilisées par les médias, qui seraient en quelque sorte le reflet d’une structure sociale de pouvoir (Kaciaf et Nollet, 2013).
Figure 1. Modèle de taxinomie des sources
d’actualité de Dekavalla et Jelen-Sanchez (2017)
Dans cette taxinomie, les auteures établissent deux axes de différenciation des sources, l’un distinguant les news makers des news shapers, l’autre dissociant sources dites elite et non-elite, dessinant ainsi quatre grandes catégories illustrées par des exemples concrets. Les news makers sont des sources « officielles » qui s’expriment en tant que représentants accrédités d’une organisation, leur statut de source se trouvant légitimé par leur fonction. La différence essentielle entre makers et shapers réside alors dans la capacité des premiers à déclencher la production d’une actualité par les médias et à en proposer le cadrage initial (d’où la dénomination de makers). Les shapers sont quant à eux des acteurs apparaissant à titre individuel dans les productions médiatiques pour apporter des interprétations, opinions ou informations complémentaires. Les journalistes s’appuient sur eux pour replacer les événements dans leur contexte, élargir ou diversifier les cadrages de l’information initiale3.
Cette typologie a été caractérisée de manière plus précise et mobilisée dans un précédent travail (Compagno et Marty, 2023), montrant comment ces catégories s’actualisent dans un certain pouvoir discursif des news makers et des sources dites elite, pouvoir cristallisé (et donc repérable) dans les modes de gestion de la parole rapportée au sein des énoncés journalistiques.
Méthodes et corpus
Notre étude est triplement circonscrite : thématiquement, spatio-temporellement et sur le plan des supports sémiotiques. Nous nous concentrons en effet sur les aires urbaines de Lyon et Grenoble, constituant les deux principales villes de l’ancienne région Rhône-Alpes, durant une période couvrant une grande partie de l’ancienne mandature municipale (entre le 31 mars 2014 et le 31 décembre 2019). Enfin, nous nous intéresserons aux titres de PQR respectifs des deux villes, aux nouveaux entrants de l’information locale, ainsi qu’à un certain nombre de comptes inscrits dans l’espace local et actifs sur le réseau Twitter.
Sur le plan méthodologique, nous mobilisons plusieurs types d’analyses que l’on peut qualifier de sociosémiotique, c’est-à-dire « réinsérant les traces discursives dans les pratiques sociales » (Compagno et Marty, 2023). Pour cela nous utilisons des méthodes d’identification des cadres médiatiques passant par une classification descendante hiérarchique (Reinert, 1983) implémentée dans le logiciel Iramuteq (Ratinaud, 2014), nous situant dans le sillage du frame mapping (Miller, 1997 ; Matthes et Koring, 2008 ; Ledouble et Marty, 2019). Il s’agit dans un premier temps de procéder à une analyse semi-automatisée des productions éditoriales de la PQR d’une part et des nouveaux entrants d’autre part, dans une perspective comparative des choix de cadres opérés par ces deux types d’acteurs, chaque classe lexicale identifiée étant considérée comme un cadre médiatique proposé aux lecteurs. Deux corpus sont ainsi constitués à partir de la base Europresse et de recherches d’archives sur le web et sont d’abord analysés successivement :
– un corpus de 277 articles publiés en ligne entre le 31 mars 2014 et le 31 décembre 2019 par Le Dauphiné Libéré et Le Progrès, les deux titres de PQR des bassins grenoblois et lyonnais comportant dans leur titre ou leur chapeau les termes « pollution » et « air » ou « qualité » et « air » ;
– un corpus de 262 articles publiés sur la même période et selon des critères de sélection identiques, par les nouveaux entrants de l’information locale, constituant de facto une solution à l’offre de la PQR4.
La comparaison des corpus est ensuite réalisée par une méthode déjà éprouvée de projection des classes de corpus à corpus (Marty, Marchand et al. 2013 ; Ratinaud et Marchand, 2016), permettant d’identifier et de caractériser les convergences et divergences de cadrage entre ces deux types de médias. Une deuxième analyse, de nature quali-quantitative, réplique une méthode précédemment employée (Compagno et Marty, 2023) pour le repérage et la catégorisation des sources. Il s’agit d’explorer les profils lexicaux de chaque classe, afin d’identifier manuellement les termes faisant référence à des sources. Une fois les principales sources de chaque cadre identifiées, ces dernières ont fait l’objet d’une catégorisation sur la base de la typologie de Dekavalla et Jelen-Sanchez (2017), permettant de distinguer si tel ou tel cadre est préférentiellement porté par des sources au statut de news maker ou news shaper, et appartenant ou non à une forme d’elite (voir supra).
Dans un troisième temps, la même méthode est appliquée à un corpus de tweets. Ce corpus Twitter est extrait d’une collection de 2354 tweets réalisée en interrogeant de manière automatique le moteur de recherche avancé de Twitter sur une période identique à celle du corpus de médias. Les requêtes sont paramétrées en fonction d’un lieu et d’une plage temporelle et les réponses du moteur de Twitter enregistrées en base de données5. Deux requêtes « qualité air » et « pollution atmosphérique » ont ainsi été soumises en ciblant les villes Grenoble et Lyon pour l’ensemble des journées prises dans l’intervalle du 31 mars 2014 au 31 décembre 2019.
Cadres et sources médiatiques : similitudes et spécificités
de la PQR et des nouveaux entrants
Notre première analyse consiste à comparer les cadrages du sujet de la pollution de l’air opérés par la PQR et par les nouveaux entrants de l’information locale. Pour ce faire nous détaillons les profils des classes lexicales de chacun des deux corpus, en portant notre attention sur les sources journalistiques venant étayer et légitimer le propos de chaque classe. Nous présentons donc ci-dessous le résultat de ces analyses en mentionnant les médias significativement associés à chacun d’eux et les sources mobilisées pour les construire, en appliquant enfin sur celles-ci la typologie de Dekavella et Jelen-Sanchez (2017).
Figure 2. Dendrogramme issu de l’analyse du corpus PQR
Table 1. Détail des profils de classes issus de l’analyse du corpus PQR6
Figure 3. Dendrogramme issu de l’analyse du corpus « Nouveaux entrants »
Table 2. Détail des profils de classes issues de l’analyse du corpus « Nouveaux entrants »
Nous proposons ensuite une projection de la première classification sur la seconde permettant de repérer les convergences et divergences éditoriales entre PQR et nouveaux entrants.
Figure 4. Graphe de projection des classes lexicales issues de la PQR sur celles issues du corpus « Nouveaux entrants7 »
À la lumière de ces premières analyses et visualisations, des convergences et divergences apparaissent assez nettement entre titres de PQR et nouveaux entrants de l’information locale dans les cadrages opérés et les sources mobilisées. Du côté des convergences, la question des restrictions de circulation, apparaissant de manière épisodique à chaque pic de pollution, est globalement traitée de la même manière pour ces deux types de médias. Représentant 10,18 % du corpus PQR (classe 2) et 12,2 % du corpus nouveaux entrants (classe 1), ce cadrage routinier se limitant à faire état des restrictions est dans les deux cas tributaire de la préfecture comme source unique. De la même manière, on observe une place importante dédiée à l’information service telle que caractérisée par Bousquet et Amiel (2021), centrée sur l’annonce brute, factuelle et routinisée des pics de pollution, rendus saillants par les dépassements des seuils d’information et d’alerte. Ce type d’information occupe toutefois plus d’espace dans la PQR (deux classes lexicales, 7 et 8, pour 19,91 % du corpus) que dans le corpus « nouveaux entrants » (classe 9 représentant 14,4 % de la surface éditoriale). Cette information service repose là encore, dans les deux corpus, presque exclusivement sur une seule source : l’observatoire ATMO, qui est une association de type « loi 1901 » agréée par le ministère de la Transition écologique et qui constitue le principal opérateur technico-institutionnel de la mesure de la qualité de l’air en France.
Si les indicateurs et les principales sources de pollution de l’air font l’objet de développements dans chacun des deux corpus, cette question est traitée par la PQR dans une relative déconnexion des conséquences sanitaires de cette pollution. Une classe du corpus PQR (classe 3, 10,48 % du corpus) relève, en effet, d’un discours sur les sources et les indicateurs de pollution, prenant appui sur l’OMS et d’autres sources scientifiques ou expertes, tandis qu’une autre classe du corpus PQR (classe 1, 7,67 % du corpus) traite de la dimension sanitaire de cette pollution dans une focale juridique européenne. Ce cadrage s’appuie essentiellement sur la Cour européenne de justice et la Commission européenne, en s’attachant à relater les procédures légales en cours à l’échelle communautaire. Là réside une première différence entre PQR et nouveaux entrants : si ces derniers traitent également de la condamnation de la France par les instances européennes pour non-respect du seuil de dioxyde d’azote dans l’air (classe 2, portée par Rue89, 14,6 % du corpus), ils traitent également de front, c’est-à-dire au sein de la même classe lexicale (classe 8, 11,8 % du corpus), des sources et des conséquences sanitaires de la pollution de l’air. Ils offrent ainsi un cadrage « thématique » au sens d’Iyengar (1991), et mobilisent pour cela un certain nombre de rapports issus d’agences et d’instituts scientifiques, dans une démarche d’analyse et d’investigation redonnant au journaliste l’initiative du traitement médiatique du sujet. Mediacités, Ici Grenoble et MEDIACOOP sont les trois médias portant cette forme de médiatisation. Autre cadrage plus « thématique » proposé par les nouveaux entrants, une classe lexicale focalisée sur la réflexion politique et les solutions dites propres de mobilité urbaine (classe 3, 11,3 % du corpus afférent, classe portée par Ici Grenoble et Mediacités), faisant dialoguer sources institutionnelles et associatives, là où la PQR développe cette question par le biais de la présentation des plans air ou climat des exécutifs locaux et nationaux, lesquels constituent les uniques sources de ce cadre (classe 6, 18,8 % du corpus PQR).
Une différence assez significative entre PQR et nouveaux entrants réside dans la couverture du traitement proprement politique de la pollution de l’air. Du côté de la PQR, cet aspect est évoqué par le relai des rencontres et débats organisés dans la Métropole de Lyon (classe 5, 17,55 % du corpus) et, sur l’agglomération grenobloise, par la présentation de la politique énergétique et de mobilité portée par les élus locaux (classe 6, 18,8 % du corpus PQR). Du côté des nouveaux entrants, ce traitement par les forces politiques locales de la qualité de l’air est articulé à des échelles territoriales plus larges (forces et personnel politiques au niveau national, voire européen). L’analyse du corpus des nouveaux entrants fait en effet apparaître une classe structurée par les déclarations et annonces de ministres français et de conseillers européens (classe 5, 13,6 % du corpus afférent), dans un cadrage sortant volontiers de l’échelon local pour l’articuler aux problématiques écologiques nationales, voire transnationales. Une dernière divergence est notable dans les modes de médiatisation de la pollution de l’air par ces deux types de presses : les nouveaux entrants portent des discours d’analyse des réponses technologiques à la pollution, à l’aide de sources diverses (élus, scientifiques, militants) avec une valence hétérogène entre titres8 (classe 7, 5,5 % du corpus), restituant ainsi des formes de tension ou de conflictualités dans l’espace public, là où la PQR relate surtout l’installation de capteurs et autres dispositifs technologiques de contrôle ou de régulation de la pollution de l’air (classe 4, 15,4 % du corpus), en confrontant toutefois des sources telles qu’ATMO à des responsables d’associations écologistes (FNE, Greenpeace, etc.). Pour conclure sur cette comparaison des cadrages, on notera enfin deux spécificités propres aux nouveaux entrants. La première est l’existence d’un cadrage relevant de l’écologie politique radicale (alter)mondialiste (classe 4, 10,3 %, portée par Rebellyon, L’avertY et MEDIACOOP) et s’appuyant sur des sources scientifiques, militantes et citoyennes. Ce cadrage particulier, marqueur d’un engagement journalistique sinon politique, est clairement absent de la PQR. La dernière spécificité est l’existence d’une classe lexicale très particulière, que l’on pourrait qualifier d’événementielle, destinée à mettre en débat le projet de piétonnisation du centre-ville de Grenoble, nommé « Cœurs de ville, cœurs de métropole » (classe 6, 6,62 % du corpus, portée par Place Gre’net). La question de la nécessité ou pas d’une étude d’impact du projet a en effet été portée devant le tribunal administratif de Grenoble par une association (« Grenoble à cœur ») s’opposant judiciairement à l’exécutif local, affaire suivie pendant plusieurs années par le média web Place Gre’net et qui semble peu ou pas relayée par la PQR.
À l’issue de cette approche comparative des cadrages entre PQR et nouveaux entrants, informée par les sources qui y sont mentionnées, il convient à présent d’établir une rapide synthèse des types de sources privilégiées par chacun de ces deux types de médias9. On l’a vu, les nouveaux entrants ont un traitement de la question de la pollution de l’air partiellement similaire à celui de la PQR, mais qui s’en distingue néanmoins par la mise en avant de cadrages plus thématiques (quatre classes « thématiques » sur huit du côté de la PQR, six sur neuf du côté des nouveaux entrants), reposant tour à tour sur un travail d’enquête et d’investigation, sur une focale géographique plus large que l’espace local ou sur un engagement éditorial, voire politique plus marqué. Ces spécificités de cadrage s’appuient sur la mobilisation, par ces nouveaux entrants, de sources à la fois plus diversifiées et assez différentes de celles de la PQR. La plus grande diversité de sources est patente lorsqu’on compare les tables 1 et 2, réalisées selon la même méthodologie. Hormis les cadres à source unique précédemment évoqués, les sources citées sont dans la grande majorité des cas plus nombreuses chez les nouveaux entrants que dans la PQR. Elles peuvent même se révéler assez pléthoriques sur les classes thématiques ou analytiques (classes 5, 7 et 8 notamment), témoignant d’une confrontation (au sens premier du terme) de points de vue. Sur un plan plus qualitatif, en suivant la typologie de Dekavalla et Jelen-Sanchez (2017), les locuteurs y apparaissent également plus diversifiés. En effet, si la mention de sources relevant de makers elite (sources institutionnelles) et de shapers elite (sources expertes) est récurrente dans les deux types de presse, les nouveaux entrants se distinguent d’abord par la mention plus importante de shapers non elite (sources associatives ou militantes)10, mais aussi, et surtout, par une bien plus grande mixité de types de sources à l’intérieur de chaque classe (cinq classes sur huit avec un seul type de source pour la PQR, une seule pour les nouveaux entrants). Les nouveaux entrants se caractérisent donc moins par le recours à un type privilégié de sources que par une volonté manifeste de mettre en dialogue différents régimes de légitimité et de visibilité médiatique au sein des différents cadrages, par le recours à des sources de natures très différentes.
Ces stratégies aboutissent à un traitement assez différencié de l’événementialité de la pollution atmosphérique entre différents supports, mis en évidence par la représentation graphique de la distribution dans le temps des flux de publications chez la PQR, les nouveaux entrants et sur Twitter. Celle-ci fait en effet apparaître des pics de productivité médiatique, dont certains soulignent une synchronie entre supports (notamment lors de la période de novembre 2016 à janvier 2017, qui correspond à un épisode historiquement long de pollution atmosphérique), et d’autres marquent une différenciation entre eux, due notamment à la plus grande dépendance de la PQR au caractère accidentel du sujet, auquel les nouveaux entrants ne sont toutefois pas insensibles dans leur définition de la newsworthiness, malgré le primat donné aux cadrages thématiques.
Figure 5. Distribution dans le temps des flux de publications PQR, Nouveaux entrants et Twitter (valeurs exprimées en % du flux total pour chaque type de support)
Twitter apparait à cet égard comme un support légèrement moins sensible à cette événementialité, tout en affichant des formes de similitudes, voire de rapports avec la productivité médiatique. Il s’agit donc à présent de s’intéresser aux cadrages de la pollution de l’air promus sur Twitter par des locuteurs dont nous tenterons de cerner les rôles et statuts sociodiscursifs, en distinguant les aires géographiques lyonnaise et grenobloise11.
Cadrages et locuteurs sur Twitter : les spécificités d’un espace à la fois
conversationnel et médiatique
La récupération des publications Twitter permet d’adopter une analyse similaire à celle opérée sur les titres de presse, c’est-à-dire un frame mapping réalisé avec le logiciel IRaMuTeQ, permettant d’identifier les cadres circulants, dans les deux aires urbaines de Lyon et Grenoble.
Dans l’aire urbaine lyonnaise
Figure 6. Dendrogramme issu de l’analyse des résultats de requêtes localisées « Lyon »
À la suite de cette analyse des cadres, nous procédons à la même analyse quali-quantitative que précédemment par le repérage et la catégorisation des sources. Une adaptation du modèle de frame mapping et de son adossement à la notion de « source » est cependant nécessaire pour pouvoir analyser les publications de Twitter. Dans ce contexte, la fabrication
et la circulation de l’information dépendent en effet d’acteurs producteurs-consommateurs journalistique. Ainsi, la typologie de Dekavalla et Jelen-Sanchez (2017) ne peut être mobilisée qu’en gardant à l’esprit qu’il ne s’agit pas de sources convoquées par les journalistes en vertu d’un régime de légitimité médiatique. Ce glissement n’affecte pas fondamentalement les catégories employées, mais la catégorisation s’établit en revanche sur la base de descriptions généralement autobiographiques (les « bios Twitter ») dans lesquelles c’est le locuteur lui-même (et non plus un journaliste) qui décide d’afficher le régime de légitimité par lequel il souhaite être perçu (responsable politique, professionnel d’un secteur, expert d’un domaine, citoyen d’un territoire, etc.).
Ces éléments nous permettent d’inférer un positionnement du locuteur au sein de l’espace social, reflétant les structures d’autorité sur lesquelles se fondent également les journalistes dans leurs recherches de sources, permettant de les catégoriser en maker ou shaper, elite ou non elite12. Par ailleurs, pour répondre à notre troisième hypothèse, et observer plus spécifiquement le caractère bi-directionnel de la circulation de discours entre médias et Twitter, la présence d’URL de signalement dans certains Tweets (55 %) est considérée comme une source d’information secondaire. Celle-ci est caractérisable à partir du nom de domaine qui identifie un site web particulier. L’intérêt est ici de pouvoir repérer parmi ces références celles renvoyant à des titres de PQR, aux nouveaux entrants, voire à d’autres types de médias, par exemple nationaux .
Table 3. Détail des profils de classes issues de l’analyse du corpus Twitter Lyon
L’analyse du corpus Twitter de l’aire lyonnaise aboutit à l’identification de cinq classes lexicales. Deux d’entre elles (classes 1 et 3) dominent largement en matière de surface éditoriale, couvrant à elles deux plus de 80 % des publications. Ces deux classes sont assez différentes : là où la classe 1 fait apparaître un cadrage thématique traitant des enjeux de projets politiques et citoyens d’amélioration de la qualité de l’air, la classe 3 dénote quant à elle un cadrage plutôt épisodique, cantonné à la diffusion de l’information publique sur l’état de pollution. Parmi les trois autres classes, l’une (classe 5) relève de l’annonce, une autre (classe 2) du débat d’idées, quand la troisième (classe 4) consiste en un compte-rendu d’événement au sens quasi journalistique du terme, motivé par un happening de Greenpeace. L’ONG, disposant aujourd’hui d’une forte notoriété, est coutumière des actions retentissantes destinées à recevoir un écho public à la fois par les RSN et les médias. Elle structure ainsi une classe à part entière du corpus Twitter lyonnais et a également acquis le statut de source médiatique dans les corpus PQR et nouveaux entrants (voir supra).
Du côté des statuts de locuteurs, on observe une nette domination de la catégorie shaper non elite, dont le statut opérationnel précédemment évoqué doit nous inciter à la prudence en matière d’interprétation, mais dont on peut a minima tirer le constat d’une forte présence de locuteurs ne relevant pas de positions politiques ou scientifiques instituées. Derrière cette catégorie, ce sont bien les makers elite (sources institutionnelles) qui constituent la deuxième catégorie la plus fréquente, à l’exception de la classe 1, classe thématique au sein de laquelle ce sont les shapers elite (locuteurs experts et scientifiques) qui arrivent en deuxième position, suivis des makers non elite (ONG, associations et militants), les institutions étant alors reléguées au dernier rang. Là où la dimension d’annonce de la classe 3 repose sur le caractère institutionnel du dispositif de mesure et de diffusion de bulletins d’information, la classe 1 semble bien mettre en évidence et en débat les conflictualités quant à l’efficacité ou la désirabilité de certaines actions entreprises en faveur de la qualité de l’air. Les agencements expressifs observés relèvent alors d’un espace public local numérique, mettant en jeu l’expérience partagée d’un quotidien.
Sur le plan de la mention des médias (via le repérage des noms de domaine), PQR et nouveaux entrants semblent mobilisés conjointement, sans distinction nette au sein de l’une ou l’autre des classes, allant à l’encontre de l’hypothèse d’une mobilisation préférentielle des nouveaux entrants. On peut toutefois noter un résultat intéressant quant à la mobilisation d’articles journalistiques par les utilisateurs de Twitter : là où la classe 3, relevant de l’annonce, mobilise exclusivement des médias locaux (nouveaux entrants et PQR confondus), les locuteurs de la classe 1 (conversationnelle) semblent faire usage d’une panoplie plus diversifiée de médias, dont les plus mentionnés ou retweetés sont Le Monde, titre de PQN, Le Progrès (PQR), devant Lyon Capitale (nouvel entrant), l’Obs (hebdo national) et Rue89 Lyon (nouvel entrant). Cet agencement de sources médiatiques variées semble cristalliser des usages stratégiques de celles-ci comme arguments venant étayer ou accréditer les propos des locuteurs, jouant ainsi leur pleine fonction d’alimentation du débat démocratique local.
Dans l’aire urbaine grenobloise
Figure 7. Dendrogramme issu de l’analyse des résultats de requêtes localisées « Grenoble »
Table 4. Détail des profils de classes issues de l’analyse du corpus « Twitter Grenoble »
La CHD produit ici neuf classes. On peut cependant constater que les classes 4 et 3 sont dédiées aux bulletins décrivant la qualité de l’air de manière générale (classe 4) ou relativement aux particules fines et à l’ozone (classe 3). Les classes 1, 2, 5, nous paraissent également pouvoir être traitées ensemble comme autant de facettes d’un débat engagé sur l’agglomération grenobloise autour des questions de la mesure physique de la qualité de l’air et de la mise en œuvre de mesures contraignantes sur la circulation des véhicules (vignette, etc.) ou le chauffage (biomasse, etc.). La classe 9 diffuse quant à elle l’information service sur les levées des restrictions de circulation, dans des modalités déjà observées dans les corpus médiatiques ; la classe 8 relate « l’événement » de la visite du ministre Hulot à Grenoble pour parler de la qualité de l’air ; la classe 7 est structurée par l’actualité de l’Institut des géosciences de l’environnement (IGE) et la classe 6 constitue pour sa part une classe que l’on peut qualifier de conversationnelle, faisant un usage fréquent de mentions de comptes pour débattre du bien-fondé ou de l’efficacité de différentes mesures prises par l’exécutif local, dont le projet CVCM13 que l’on retrouve également dans le corpus nouveaux entrants.
Du côté des statuts de locuteurs, à l’exception des classes 3 et 4 reposant sur ATMO, on observe la même prédominance des shapers non elite dans les différentes classes, avec une répartition qui semble toutefois plus équilibrée entre les autres catégories de locuteurs au sein de chaque classe. La mention des médias, enfin, semble ici encore assez composite (notamment dans les classes thématiques ou conversationnelles telles que les classes 1, 2, 5 et 6), mêlant le Dauphiné Libéré au Monde et à Place Gre’net, nouvel entrant grenoblois dont la présence semble ici plus significative que celles des autres médias natifs du web.
Médias locaux, Twitter et circulation des cadrages : entre logiques
de diffusion, de conversation et d’interpellation
À la lumière des précédentes analyses, il s’agit à présent de préciser la place qui est selon nous celle de Twitter en tant que dispositif sociotechnique dans la dynamique sociodiscursive de gatewatching prise en charge par les médias locaux autour de la question de la pollution de l’air. Ces dynamiques s’ancrent autour de trois modalités : la simple diffusion de cadrages épisodiques structurés par des événements divers, la conversation basée sur une diversité de cadrages et de types de sources, et l’interpellation de l’opinion publique et des institutions par voie numérique.
La première modalité identifiée de circulation des discours, classique, est celle de la diffusion « brute » de l’information. Elle s’effectue la plupart du temps depuis les médias vers Twitter, les utilisateurs relayant dans ce cas plutôt les cadrages médiatiques épisodiques lors de pics de pollution, d’événements précis en lien avec la qualité de l’air (telle la visite du ministre de la transition écologique pour aborder la question). Twitter sert alors ici de caisse de résonance à un traitement médiatique routinier du sujet, proche de l’information service, diffusé par des médias s’appuyant sur des sources institutionnelles et relayé par des utilisateurs-récepteurs se plaçant eux aussi dans une logique de service vis-à-vis de leurs abonnés. En parallèle, d’autres locuteurs scientifiques ou institutionnels centraux (ATMO et préfectures notamment) peuvent également diffuser directement leurs messages informatifs sur Twitter, qui se couplent à ceux diffusés par les médias, les deux types d’énonciations circulant alors selon les mêmes modalités.
La conversation est pour sa part une modalité de circulation du discours propre à Twitter et à son caractère d’arène du débat contradictoire (Sebbah, Loubère et al., 2018). Notre analyse montre que les médias (et certains cadrages qu’ils promeuvent et diffusent) occupent une place importante dans cette conversation. La spécificité de Twitter en tant que dispositif sociotechnique réside alors dans sa capacité à structurer les débats de terrain et à positionner les médias (PQR, nouveaux entrants mais aussi médias nationaux) comme sources et arguments de la conversation ou du débat entre différents types de locuteurs (responsables politiques, militants, chercheurs, industriels, journalistes, citoyens, etc.). Ce sont alors plutôt les cadrages thématiques qui sont mobilisés, servant à étayer et sourcer les propos des locuteurs. Ces derniers font ainsi jouer les uns contre les autres les cadrages médiatiques et les régimes de légitimité des sources (responsabilité, expertise, convictions, savoirs d’expérience), dans une polyphonie énonciative relativement sophistiquée actualisant la mise en conflictualité des questions liées à la qualité de l’air dans l’espace local.
L’interpellation, enfin, apparaît également comme une modalité de discours propre à Twitter, les porteurs de cause diffusant par le biais de ce RSN un certain nombre d’alertes, de contre-cadrages et de récits d’expérience venant souvent en opposition aux discours institués. Dans ce contexte, les médias locaux peuvent être envisagés par ces locuteurs comme réceptacles et vecteurs de l’information auprès de l’opinion publique et des institutions, dans des logiques d’actions et mobilisations concrètes, qu’elles soient positives ou dirigées contre des décideurs dont l’action est jugée néfaste ou insuffisante, répondant dans tous les cas à une mise en politique du sujet. Cette modalité semble constituer une spécificité des locuteurs non elite (ONG, associations, militants) ne disposant pas de l’attention médiatique structurelle et relativement pérenne qui est celle des sources elite. Sur ce dernier point, l’exemple de Greenpeace et celui du projet CVCM de Grenoble sont assez parlants : médias et RSN sont mobilisés conjointement par ces porteurs de cause, avec des co-référentialités entre les deux espaces alimentant leur légitimité et menant à des circulations de cadrages sur un temps long14. Dans ce contexte, ce sont bien les nouveaux entrants qui assurent, même marginalement, cette perméabilité du champ médiatique local à des voix et enjeux peu entendus ailleurs que sur Twitter.
Conclusion
Ce travail se donnait pour objet d’interroger la capacité des nouveaux entrants de l’information locale à renouveler à la fois les sources et les processus d’alimentation du débat démocratique sur la question de la qualité de l’air, notamment par une porosité supposément plus forte entre eux et des locuteurs non elite émergeant sur Twitter. Pour y répondre, nous avons d’abord pu observer que les cadrages thématiques, mettant le sujet de la qualité de l’air en débat ou l’abordant de manière décorrélée des événements accidentels et des modalités de l’information service, étaient plus nombreux chez les nouveaux entrants. Ces observations s’expliquent tantôt par un travail d’enquête (sur conjointement les causes de pollution et ses conséquences sanitaires), par l’articulation des événements locaux à des problématiques environnementales nationales ou internationales (le dépassement des seuils de particules fines autorisés par Bruxelles, les problématiques énergétiques, de mobilité, le dérèglement climatique), voire à un engagement éditorial ou politique plus marqué que dans la PQR (avec la présence de radicalités politiques). Ces cadrages ne remplacent pas pour autant les cadrages épisodiques et l’information routinière partagés par la PQR et les nouveaux entrants, ils s’y adjoignent chez ces derniers, enrichissant leur panoplie éditoriale. Ces cadrages sont adossés à une plus grande variété des sources mobilisées par les nouveaux entrants et plus spécifiquement à une plus grande mixité des types de sources mobilisées à l’intérieur de chacun d’eux (mixité marquée par la présence conjointe de makers et shapers, elite et non elite à l’intérieur d’une même classe lexicale). Cherchant ensuite à mieux cerner les modalités de circulation de discours à l’intérieur de Twitter, nous avons pu observer la diversité des cadrages qui y sont construits par des locuteurs aux statuts sociosymboliques et énonciatifs tout aussi divers. C’est alors à la circulation des discours entre locuteurs sur Twitter et champ médiatique que nous nous sommes attachés. Nous avons ainsi pu montrer l’agencement bi-directionnel de cette circulation, à travers trois modalités impliquant pour certaines la mobilisation des médias par les locuteurs sur Twitter, dans des logiques discursives de diffusion ou de conversation, mais également, quoique de façon marginale, l’utilisation par les nouveaux entrants de locuteurs présents sur Twitter et des cadrages qu’ils portent dans une visée d’interpellation de l’opinion publique. Ces modalités d’énonciation et de diffusion de l’information sont propres aux formats informationnels et expressifs permis par la démocratisation des TIC (Dymytrova et Kondratov, 2018). La dynamique sociodiscursive de Twitter met ainsi en place une médiation entre une dimension expérientielle et expressive de l’individu (réception médiatique, engagements associatifs ou politiques, expertises, actions et expériences vécues) et les stratégies d’information et de communication d’organisations diverses à dimension collective, au premier rang desquelles figurent les médias locaux.
Si ces résultats trouvent un écho avec de précédents travaux interrogeant le traitement médiatique de différents sujets, notre objectif dans cet article était également de pointer la spécificité des enjeux d’une thématique environnementale eu égard à la circulation des discours et cadrages. L’environnement se trouve en effet au cœur de stratégies de neutralisation de la conflictualité (Krieg-Planque, 2010) ou de dépolitisation (Comby, 2017), mises en œuvre par des acteurs institutionnels souhaitant placer l’environnement hors du champ du débat public au profit de réponses technoscientifiques, administratives ou individuelles aux enjeux écologiques. Face à ceux-ci, d’autres acteurs s’attachent à promouvoir une lecture politique des questions environnementales. Ces stratégies de (re)politisation, éventuellement radicales, passent par la mise en évidence des conflictualités et des logiques sociopolitiques structurantes, et par l’articulation des savoirs expérientiels et scientifiques, des enjeux locaux et globaux. Dès lors, en privilégiant des cadrages épisodiques ou au contraire thématiques, en mobilisant préférentiellement certains types de sources porteuses de cadrages définis ou en tentant de les diversifier et de les confronter, journalistes et médias endossent la responsabilité de la mise en mots et en sens des enjeux environnementaux. À cet égard, la PQR apparait dans notre étude peu apte à proposer des outils de mise en politique de la pollution de l’air. En optant pour des modalités et des cadrages énonciatifs vecteurs de neutralisation de la conflictualité et en s’appuyant majoritairement sur des sources institutionnelles et des expertises technoscientifiques, elle demeure dans la relation brute et événementielle des faits, relayant largement des réponses relevant du « solutionnisme technologique » (Morozov, 2014). Les nouveaux entrants, du fait de leur diversité de pratiques éditoriales et de leur porosité aux sources et cadrages présents sur les RSN, contribuent effectivement à renouveler les dynamiques sociodiscursives de médiatisation des enjeux environnementaux dans le sens d’une repolitisation de l’écologie, entendue comme mécanisme de favorisation du débat public et contradictoire sur des faits et événements relatifs à l’environnement.
Emmanuel Marty est maître de conférences à l’Université Grenoble Alpes,
Jean-Marc Francony est maître de Conférences (HDR) à l’Université Grenoble-Alpes,
Alexander Kondratov est maître de conférences à l’Université Clermont Auvergne.
Notes
1Cette étude a été menée dans le cadre du programme de recherche Médias locaux, démocratie et internet (MELODI), soutenue par l’appel à projets IDEX Université Grenoble Alpes, Initiatives de recherche stratégiques (IRS).
2La collecte des données et la constitution de notre corpus sont antérieures au rachat de Twitter par Elon Musk et à sa transformation en « X » survenue en juillet 2023, qui en a nécessairement changé la physionomie.
3Voir Dekavalla et Jelen-Sanchez (2017 : 4-11) pour plus de détails, avec une recension des écrits conséquente sur la catégorisation des sources depuis la notion de primary definers de Stuart Hall et collaborateurs.
4Il s’agit des médias suivants : Place Gre’net, Le Postillon, Enviscope, MEDIACOOP, Ici Grenoble, L’avertY, Librinfo74, Rue 89 Lyon, Mediacités Lyon, Lyon Capitale et Rebellyon. Ces médias, construits contre ou à côté de la PQR, occupent des positions très différentes dans le paysage médiatique local et répondent à des idéaux-types journalistiques polarisés, dont l’étude dans le cadre du projet MELODI a fait l’objet d’une précédente publication (Bullich, Marty et al., 2023). Nous y montrons comment certains acteurs sont avant tout attachés à pallier les insuffisances de la PQR à l’aune d’une éthique socioprofessionnelle canonique du journalisme, quand d’autres sont plutôt animés par la volonté de (re)politiser la médiatisation du territoire. Bien que leurs projets éditoriaux et leurs identités socioprofessionnelles soient diverses, ces acteurs n’en incarnent pas moins une tentative de contester l’hégémonie médiatique locale de la PQR.
5Pour les détails de la technique de collecte, voir en ligne : datafabrik.hypotheses.org/140.
6Dans le tableau, le chiffre 1 désigne les news makers elite, le chiffre 2 les news shapers elite, le chiffre 3 les news makers non-elite, le chiffre 4 les news shapers non-elite.
7La méthode consiste à extraire le lexique spécifique des classes d’un corpus source (ici le corpus PQR dont la légende est en haut) et à les projeter sur chacune des classes d’un corpus cible (ici le corpus « nouveaux entrants » dont les classes sont étiquetées en bas du graphique). Le graphe de spécificité ob- tenu, basé sur le modèle hypergéométrique de Lafon (1980), représente les recoupements lexicaux entre les deux corpus. L’ordonnée 0 correspond à une distribution normale (ou moyenne) du lexique source (PQR) sur le lexique cible (nouveaux entrants). Les histogrammes montants et descendants traduisent respectivement une surreprésentation et une sous-représentation statistiquement significative du lexi- que source sur le lexique cible. Les graduations mesurent l’indice de spécificité, exprimant la probabilité d’apparition du lexique d’un corpus sur celui de l’autre en logarithme de base 10. Par exemple, sur ce graphique, le lexique de la classe « restriction circulation » du corpus PQR (en rouge) est surreprésenté dans la classe « restriction de circulation pic » du corpus « Nouveaux entrants », indiquant un recoupe- ment important de leurs lexiques respectifs. Voir Marty, Marchand et al. (2013) ou Ratinaud et Marchand (2016) pour des exemples de mobilisations précédentes et Lafon (1980) pour une présentation détaillée du modèle statistique.
8Le Postillon, et dans une moindre mesure MEDIACOOP, développent ainsi un discours assez critique envers ces dispositifs, là où L’avertY construit un discours plus généraliste et neutralisé à cet égard.
9À l’aide de la troisième et de la quatrième colonne des tableaux de profils de classes.
10Les sources de type shapers non elite (vox populi) étant par ailleurs assez rares dans les deux cas.
11Malgré des sujets communs, l’analyse globale du corpus Twitter a en effet fait apparaître de très fortes spécificités locales dans la nature et la structuration des messages, rendant nécessaire cette distinction sur le plan méthodologique.
12La catégorie shaper non elite, en revanche, devient de fait une catégorie par défaut, lorsque le compte n’affiche pas d’information explicite nous permettant de le situer ailleurs. Ce critère de catégorisation, qui nous semble pertinent mais pas infaillible, s’appuie sur l’idée qu’un locuteur disposant d’un régime de légitimité plus fort que celui de shaper non elite serait enclin à l’afficher dans sa description, afin de donner plus de crédit à ses propos.
13Cœur de ville, cœur de métropole, projet de piétonnisation du centre-ville de Grenoble porté par la municipalité.
14Environ deux ans pour le débat autour du projet CVCM.
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