Nouvelle série, n°11
2nd semestre 2024 |
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Prégnance et cadrages différenciés en fonction des plateformes de diffusion : une étude de cas de la couverture de la COP26 dans les médias québécois
Amélie Daoust-Boisvert, Université ConcordiaGabrielle Brassard-Lecours, Université ConcordiaWillow Beck, Université ConcordiaBrianna Losinger-Ross, Université ConcordiaMélanie Lussier, Université Concordia
Résumé
La Conférence de Glasgow (COP26) était la plus cruciale depuis celle menant à l’Accord de Paris. À partir d’un corpus de milliers d’articles, publications Twitter et Facebook, alertes mobiles et pages web de six médias québécois publiés pendant la COP26, nous proposons un nouvel indice de la prégnance médiatique considérant la réalité du journalisme à l’ère du journalisme multiplateforme. La visibilité de la COP26 et de l’environnement a varié dans le temps, mais aussi selon les plateformes. Nous avançons que la prégnance des enjeux environnementaux est moins dépendante des articles produits que de leur mise en valeur en ligne. Une analyse exploratoire des sentiments et du vocabulaire des publications de ces médias sur la COP26 et l’environnement sur Facebook et Twitter indique aussi un traitement différencié selon le média et la plateforme. Les pratiques des médias, exposant ou non leurs publics à certains enjeux ou privilégiant certains cadrages sur d’autres, pourraient contribuer à renforcer les bulles informationnelles, idéologiques et identitaires.
Abstract
The Glasgow Conference (COP26) was the most crucial since the one leading to the Paris Agreement. Based on a corpus of thousands of articles, Twitter and Facebook posts, mobile alerts and web pages from six Quebec media outlets published during COP26, we propose a new index of media salience considering the reality of journalism in the age of multiplatform journalism. The visibility of COP26 and the environment varied over time, but also according to platforms. We argue that the salience of environmental issues is less dependent on the articles produced than on their online promotion. An exploratory analysis of the sentiments and vocabulary of these media outlets’ publications on COP26 and the environment on Facebook and Twitter also indicates differentiated treatment depending on the media and platform. Media practices, whether or not they expose their audiences to certain issues or favor certain framings over others, could contribute to reinforcing informational, ideological and identity bubbles.
DOI : 10.31188/CaJsm.2(11).2024.R053
R
évolue est l’époque où les journalistes couvraient un événement, écrivaient un article, l’envoyaient au pupitre, lequel le révisait et en faisait la mise en page avant que l’imprimeur ne transforme la maquette en journal livré à nos portes. Aujourd’hui, les reporters vont souvent envoyer une publication sur Twitter ou publier un article sur le site web de leur organisation avant même le début d’un événement. Puis, lorsque la situation le commande, ils en feront la couverture en direct sur des réseaux sociaux, toujours plus nombreux à devoir être alimentés pour joindre et toucher les différents publics. Le travail se poursuit après l’événement, avec l’envoi d’une première version d’un article destinée au site web et aux applications mobiles, accompagnée d’une promotion distincte et adaptée à des publics différents pour les réseaux sociaux. Si l’importance de la nouvelle ou le potentiel d’attirer les clics le justifient, peut-être sera-t-elle même « poussée » vers les téléphones des lecteurs potentiels à l’aide de notifications qui feront vibrer ou sonner une alerte sur leur appareil. Si l’imprimé, ou sa version pour iPads et autres tablettes, existe toujours dans un média particulier, le journaliste adaptera encore son article à cette plateforme avant la fin de sa journée. Ainsi vivra une nouvelle.
Tenant compte de ces nouveaux modes de production et de diffusion médiatique, nous proposons ici une étude de cas autour de la couverture de la conférence des Nations unies sur les changements climatiques, ou Conférence de Glasgow, à laquelle nous allons aussi référer comme la Conférence des parties (COP) ou COP26. Notre échantillon consiste en un ensemble de médias québécois et leurs multiples plateformes de diffusion. Nous souhaitons explorer le potentiel de divers corpus pour arriver à une mesure comparative de la prépondérance de l’enjeu climatique en tenant en compte des sites web, plateformes papier traditionnelles, applications pour tablettes, réseaux sociaux et alertes sur appareils mobiles.
D’abord, le thème de la conférence de Glasgow est sélectionné en raison du caractère crucial que revêt l’étude de la couverture du climat dans les médias canadiens. D’ici une décennie, le « budget carbone » permettant aux sociétés humaines d’éviter des bouleversements dramatiques sera épuisé (IPCC, 2018 ; Mengis, Partanen et al., 2018). Il y a urgence (Lenton, Rockström et al., 2019), mais les médias en rendent-ils compte ? Un trop grand décalage entre la gravité des enjeux et la couverture médiatique peut contribuer à retarder l’action climatique. Cette COP est aussi la plus cruciale depuis celle ayant mené à la signature de l’Accord de Paris, puisqu’elle devait permettre aux pays de s’entendre sur les moyens de maintenir le réchauffement sous la barre des 2 degrés Celsius.
Ensuite, en raison des nouvelles façons de couvrir et de décliner la nouvelle évoquées plus tôt, évaluer la prépondérance d’un enjeu dans l’actualité présente un défi supplémentaire. En quelques décennies d’études sur la mise à l’agenda, différents indices dits de « salience » ont été proposés. La plupart s’appuient sur le nombre (Chyi et McCombs, 2004) ou la proportion (Muschert et Carr, 2006) d’articles concernés par un sujet donné publié dans une période définie. Dans le contexte du multiplateforme, il semble peu pertinent de continuer à évaluer l’importance de la couverture médiatique d’un événement de cette manière, puisqu’elle n’est pas totalement satisfaisante pour traduire la prépondérance d’un enjeu à travers les multiples plateformes alimentées par les médias d’information à l’ère du numérique. Les nouvelles font le plus souvent l’objet de multiples publications, cadrages et mises en marché en l’espace, souvent, de quelques heures. À la lumière de cette réalité, il semble nécessaire d’amorcer une réflexion sur les méthodologies et les approches entourant les études de « salience », ou de prégnance médiatique.
Dans le même ordre d’idées, il semble aussi approprié d’évaluer les cadrages différenciés adoptés selon les plateformes et selon les médias. Dans cet article, en plus de la prégnance, nous aborderons le cadrage des nouvelles publiées pendant la conférence de Glasgow par les médias québécois à l’aide d’une analyse des sentiments et du vocabulaire choisi. Les études publiées s’appuient sur des recherches booléennes tels « changement climatique/climate change », « réchauffement climatique/global warming » ou des mots clés référant au Groupe intergouvernemental d’experts sur le climat, le GIEC, pour évaluer la prévalence des articles sur le climat et constituer des corpus (Stoddart, Haluza-DeLay et al., 2016 ; Boykoff et Pearman, 2019). Selon nos recherches préliminaires, non publiées, élargir le champ lexical utilisé – crise, bouleversement et urgence climatiques en sont des exemples – permettra d’identifier un plus large corpus ainsi que des cadrages émergents. Nous souhaitons également explorer en quoi les choix lexicaux et le ton positif, neutre ou négatif des nouvelles sont liés, dans le but d’explorer la possibilité, dans le futur, de soumettre de larges corpus à une analyse automatisée des sentiments.
Finalement, la perspective canadienne est de portée internationale. En 2021, le Canada était le quatrième producteur mondial de pétrole et ses émissions de GES en provenance du secteur de l’énergie accusaient une croissance de 2,5 % par rapport à l’année précédente (British Petroleum Company, 2022). Au mieux, elles stagnent depuis 10 ans, alors que le consensus international tend vers la décroissance. La consommation d’énergie par personne des Canadiens est parmi les plus élevées au monde. Les décisions canadiennes en matière d’énergie, notamment l’exploitation des sables bitumineux, auront des impacts sur le climat de la planète (Talaei, Gemechu et al., 2019), tout comme celles concernant l’abondante énergie hydroélectrique du pays. Sans oublier que le Canada se montre vulnérable à l’égard des changements climatiques en raison de ses effets amplifiés près des pôles (Screen et Simmonds, 2010). De plus, la présente étude inclut les médias francophones du Québec, alors que les études disponibles sur la couverture environnementale et du climat au Canada s’attardent surtout à des médias anglophones de référence, comme le Globe and Mail (Ahchong et Dodds, 2012 ; Davidsen et Graham, 2014 ; DiFrancesco et Young, 2011 ; Stoddart, Haluza-DeLay et al., 2016 ; Young et Dugas, 2011).
Ces considérations nous mènent à formuler les questions de recherche suivantes :
RQ1 Comment la prégnance de la conférence de Glasgow et de l’environnement dans les médias québécois pendant la COP26 a-t-elle varié selon les plateformes de diffusion numériques et traditionnelles et dans le temps pendant la durée de l’événement ?
RQ2 Comment le ton, tel que déterminé par une analyse des sentiments, a-t-il varié dans la couverture de la COP26 par les médias québécois sur les réseaux sociaux, pendant la durée de l’événement ? Et ce ton est-il lié à l’usage d’un vocabulaire différencié ?
Revue de la littérature
Agenda setting et études du cycle de l’attention médiatique
Les médias exercent leur pouvoir en publicisant ou réduisant un enjeu au silence (Anderson, 2009). Depuis la classique étude de Chapel Hill par McCombs et Shaw (1972) et ayant établi les bases de la théorie de l’agenda-setting, ses auteurs et de nombreux autres contributeurs ont fait évoluer la théorie pour l’adapter aux nouvelles réalités médiatiques. Un des concepts clés au cœur de la théorie de l’agenda-setting, dont nous ferons usage ici, est celui de la « salience ». Ce concept est décrit comme l’importance relative d’un enjeu dans un espace précis, par exemple les médias, mais aussi, parfois, d’autres espaces comme les plateformes électorales (Chyi et McCombs, 2004). La faible disponibilité d’une littérature scientifique en français sur le concept rend sa traduction difficile, mais nous adopterons ici, dans un souci de cohérence, la traduction offerte par Lamoureux (2019), qui propose la prégnance. La prégnance d’un enjeu est nécessairement dépendante de sa sélection préalable – n’oublions pas qu’un enjeu peut être médiatiquement réduit au silence.
Le concept a été enrichi d’une autre dimension avec le développement de l’« attribute agenda-setting ». Après l’étude de l’objet lui-même, par exemple le climat ou la Conférence de Glasgow, il est possible d’analyser comment les médias sélectionnent et présentent certains attributs de cet objet, choix qui à son tour pourraient influer sur les perceptions des publics à l’égard de celui-ci (Takeshita, 1997). Il est possible d’étudier la prégnance d’un objet X dans le temps dans la couverture médiatique, mais aussi la prégnance des différents attributs choisis pour en parler.
L’attribut agenda setting permet de réconcilier une autre théorie des médias, celle du cadrage, avec la théorie de l’agenda setting, en « pensant les cadrages en tant qu’attributs d’un objet » (Chyi et McCombs, 2004). Les nouvelles contiennent des informations, mais aussi des « cadrages », des angles par lesquels elles sont abordées, des niveaux interprétatifs, voire des biais. Les cadrages sont un outil – ou un attribut – puissant pour amener les audiences à penser à un objet – une information – d’une certaine manière (Simon et Jerit, 2007).
Ces dernières années, l’analyse des sentiments en tant qu’attribut ou cadrage a gagné en popularité dans les études médiatiques. Elle permet de réduire la complexité des analyses de cadrage en réduisant ces derniers au ton positif, négatif ou neutre d’éléments dans un corpus, notamment de large ensemble de données sur les réseaux sociaux, de donner une mesure objective d’analyse d’un corpus aux décideurs, chercheurs ou sondeurs de traiter de grands corpus par analyse automatisée (Puschmann et Powell, 2018).
Un effort scientifique pour mettre à jour les mesures de la prégnance se déploie afin de tenir compte des réalités numériques. Spisak, State et al. (2022) ont introduit le Social Media Salience Index, une mesure du pourcentage d’hyperliens partagés et repartagés sur un sujet en proportion du nombre total de partages sur une période donnée. C’est un calcul simple, mais qui, lorsque réalisés sur des ensembles de données de millions, voire de milliards d’entrées publiées sur les réseaux sociaux, présente une robustesse certaine par rapport à des méthodes antérieures. Des études se sont attardées à la prégnance d’un enjeu et à son cadrage dans des corpus issus des réseaux sociaux, en puisant des corpus chez les utilisateurs ordinaires, ou encore, chez les politiciens (Eberl, Tolochko et al., 2020 ; Gilroy et Kashyap, 2021).
Les médias accusent la perte d’un quasi-monopole de l’information, concurrencés par l’amplification que procurent les réseaux sociaux à des sources non médiatique qui se trouvent libérées de la dépendance aux médias traditionnels en tant que porte-voix. Mais ils conservent un pouvoir certain de mise à l’agenda, d’amplification et de maintien d’enjeux et de cadrages dans l’espace public, un système désormais hybride, indiquent certains travaux (Chadwick, 2011 ; James, Banducci et al., 2019). Par contre, à notre connaissance, des approches pour permettre l’étude de la prégnance d’un enjeu médiatique à travers les plateformes et non pas dans le silo de l’une ou de l’autre des plateformes médiatiques et, dans le temps, reste à développer.
Déjà en 2012, il a été observé que de communiquer la science à l’ère numérique la rend plus facilement contestable publiquement (Schmidt, Ivanova et al., 2013). Aujourd’hui plus que jamais, le consensus scientifique est secoué par les commentaires sur les réseaux sociaux, car ces derniers sont exempts de révision par les pairs ou même de modération ou de vérification des faits. Il apparaît donc d’autant plus important d’élargir les études d’agenda-setting et de prégnance aux réseaux sociaux alimentés par les médias.
Prégnance du climat comme enjeu médiatique
Dans la lutte pour l’attention, les sujets s’entrechoquent et se font compétition. La disponibilité des ressources dans les salles de presse, la compétition avec d’autres enjeux et crises et la fatigue médiatique se développant autour des thèmes qui perdurent dans l’actualité sont tous des facteurs qui influent négativement sur la couverture des enjeux climatiques.
Certains des creux de vague de la couverture climatique résultent de la crise des médias et de la suspension de secteurs de couverture spécialisés (McNatt, Goodman et al., 2019), alors que devant la rareté des ressources, le maintien de secteurs prioritaires comme la couverture politique ou même sportive l’emporte. Après une croissance de la couverture des enjeux climatique au courant des années 80, un déclin s’est opéré dans les années 90 suivi d’une période de croissance au tournant des années 2000 (Anderson, 2009). Un sommet de couverture a été observé dans de nombreux pays lors des années 2008 et 2009 (Broadbent, Sonnett et al., 2016), une période coïncidant avec des sommets internationaux importants, comme la COP15. Les événements internationaux autour du climat, comme les publications de rapports scientifiques ou les rencontres politiques internationales, sont souvent responsables de sommets d’attention médiatique et ce, depuis plusieurs décennies (Anderson, 2009).
Les enjeux climatiques subissent aussi un recul en matière d’espace médiatique lorsqu’ils entrent en compétition avec d’autres crises. Par exemple, la pandémie de SARS-CoV-2 a entraîné, aux États-Unis, une diminution de 80 % de l’indice Social Media Salience Index pour le climat (Spisak, State et al., 2022).
Mais certains médias font une priorité d’améliorer leur couverture. En 2019, avec le quotidien britannique The Guardian en tête, la coalition internationale Covering Climate Now a été lancée avec pour objectif de couvrir « plus » et « mieux » les enjeux climatiques. Elle regroupe, en 2022, plus de 450 partenaires (Covering Climate Now, 2022).
Au-delà de la prépondérance de l’enjeu dans les médias, les cadrages, ou attributs, utilisés par ces derniers pour aborder les changements climatiques ont leur importance et varient en fonction des contextes sociopolitiques. Les médias allemands sont plus consensuels sur la nécessité d’agir, les médias canadiens s’attardent davantage aux impacts des changements climatiques, alors que les médias américains donnent dans la controverse politique (Bolsen et Shapiro, 2018 ; Tschötschel, Schuck et al., 2019). D’autres études montrent que les voix mettant en doute la science du climat occupent un espace médiatique disproportionné, surtout aux États-Unis (Boykoff, 2012 ; Petersen, Vincent et al., 2019).
Une étude par Stoddard, Haluza-DeLay et al. (2016) sur la couverture du climat par le National Post et le Globe and Mail entre 1997 et 2010 a comparé le volume de ces nouvelles par rapport à 19 autres pays. La couverture canadienne s’avère la plus importante. Les angles de la responsabilité gouvernementale et de la règlementation dominent. D’autres études soulignent le cadrage « élitiste » utilisé par les médias canadiens dans leurs reportages sur les changements climatiques, avec peu d’intersections avec la vie quotidienne et un fort appui sur des sources officielles (Ahchong et Dodds, 2012). Les cadrages remettent peu en question la nature de l’économie canadienne, qui repose sur les ressources naturelles et les énergies fossiles (Davidsen et Graham, 2014).
Les COP dans l’actualité
Notre travail s’inscrit dans la continuité d’études d’autres équipes sur la couverture médiatique et les enjeux communicationnels des COP, dont la première s’est tenue en 1995 et dont découlent le Protocole de Kyoto (1995) et l’Accord de Paris (2015). Les COP sont des événements importants pour attirer l’attention sur les enjeux climatiques (Schäfer, Ivanova et al., 2013). Trois types de discours marquent ces négociations sur le climat : le conflit, la transition et la vulnérabilité (Audet, 2013).
Une étude australienne (Lidberg, 2018) a comparé les couvertures de la COP15, en 2009, et de la COP21, en 2015, à travers le The Sydney Morning Herald et le Daily Telegraph. Dans ce dernier, la part de la couverture confiée à des agences de presse est passée de 1 à 51 pour cent entre les deux événements. Par ailleurs, d’une COP à l’autre, la couverture du Sydney Morning Herald s’est complexifiée, le journal y allouant plus de ressources et d’analyses en profondeur. Toujours selon Lidberg (2018) le Daily Telegraph est plutôt passé d’une campagne négative contre la lutte aux changements climatiques lors de la COP15 à presque ignorer la COP21, « abdiquant la responsabilité d’informer de façon constructive son public à propos de l’Accord de Paris ». Ce fait étonne compte tenu des enjeux supérieurs de la COP21, menant à un accord. Selon les auteurs, ces choix éditoriaux reposent entre autres sur le lectorat spécifique de chaque média.
Au Canada, une étude s’est intéressée à la couverture de la COP de Copenhague en 2009, laquelle avait pour but l’extension du protocole de Kyoto. Comparant la couverture de l’événement par des médias provinciaux traditionnels avec celle des médias dits alternatifs, les auteurs ont observé que ces derniers adoptaient un cadrage appelant davantage à l’engagement et la mobilisation politique, plutôt qu’au découragement et au cynisme (Gunster, 2011).
La recherche commence seulement à s’intéresser au rôle des réseaux sociaux lors de ces événements internationaux. Aujourd’hui, la couverture d’un événement, surtout en temps réel, va bien au-delà que celle relayée uniquement sur le site web d’un média. Une analyse de plus de 1000 publications Twitter publiées lors de la COP25 a démontré que les publications des journalistes ont suscité plus d’engagement que les publications Twitter des médias pour lesquels ils travaillaient (Carrasco Polaino, Mera Fernández et al., 2021).
Précisons que la COP26 s’est déroulée à l’automne 2021 après avoir été reportée en 2020 en raison de la pandémie mondiale causée par la COVID-19. C’était la COP la plus cruciale depuis la COP21 à Paris en 2015 et l’occasion pour les 196 pays signataires de l’Accord de Paris de s’entendre sur les moyens à mettre en œuvre pour le respecter et de maintenir le réchauffement planétaire sous la barre des 2 degrés Celsius, voir, si possible, de 1.5 degré. Le directeur général des Nations Unies Antonio Guterres a même qualifié cette rencontre de « dernier espoir » avant son ouverture. Toujours peu optimiste malgré l’adoption du Pacte de Glasgow au terme de deux semaines de négociations ardues, ce dernier a déclaré que la « catastrophe climatique frappe toujours à la porte ». Le pacte tel que ratifié inscrit pour la première fois un objectif de réduction du recours au charbon et des subventions aux énergies fossiles. Les engagements volontaires des états laissent prévoir un réchauffement planétaire de 2,2 à 2,7 degrés d’ici 2100, et le pacte prévoit que les signataires devront renforcer leurs objectifs d’ici la fin de 2022. L’importance des enjeux pour l’avenir de l’humanité en fait une COP particulièrement intéressante à soumettre à une étude de sa médiatisation.
Méthodologie
Constitution des corpus
Les corpus étudiés proviennent de six médias québécois, soit La Presse, Le Devoir, TVA nouvelles, Le Journal de Montréal, Radio-Canada Info et Montreal Gazette. Les premiers sont les médias francophones les plus consultés et inspirant le plus confiance au Québec selon le Digital News Reports du Reuters Institute (Newman, Fletcher et al., 2021) et ce dernier est le seul quotidien anglophone du Québec. Les données pour chaque plateforme ont été récoltées entre le 30 octobre et le 13 novembre inclusivement, soit la durée de la Conférence de Glasgow, plus une journée au début et à la fin. La conférence s’est finalement conclue avec une journée de retard, avec un accord ratifié le 13 novembre.
Les 5161 publications publiées sur Twitter par ces six médias pour la période couverte ont été moissonnées à l’aide du module Python snscrape, et les 3675 publications Facebook ont été récoltées à l’aide de l’outil Crowd Tangle (crowdtangle.com). Une requête pour les comptes de chaque média a été effectuée pour télécharger tous les messages et leurs métadonnées publiés entre le 30 octobre 2021 et le 13 novembre 2021, en ajustant les dates et l’heure pour tenir compte des fuseaux horaires reconnus par les outils utilisés.
Les sites web complets des six médias étudiés, incluant la mise en page d’origine, ont été sauvegardés en format HTML deux (matin et soir) ou trois fois par jour (matin, mi-après-midi, soir), en direct, par des assistants de recherche pendant la période étudiée, pour un total de 210 pages à sauvegarder. Les pages ont été sauvegardées trois fois par jour lors des périodes anticipées de couverture plus intensives, soit au début (30 et 31 octobre) et à la fin (11, 12 et 13 novembre). En raison d’erreurs humaines, les sites web n’ont pas été sauvegardés à 36 reprises, constituant un corpus de 174 pages enregistrées et de 36 pages manquantes. Toutes les journées étant enregistrées à au moins une ou deux reprises pour chaque média, il a été déterminé que ces erreurs humaines avaient peu d’incidence sur les résultats.
Les 4860 articles des versions imprimées ou pour application tablette et les 7808 articles web publiés pendant la période étudiée par les différents médias composant le corpus et leurs métadonnées ont été récoltés à partir de la base de données Eureka pour Le Devoir, Radio-Canada Info, La Presse, TVA Nouvelles et Radio-Canada et de la base de données Proquest Canadian Newsstream dans le cas de Montreal Gazette. Lorsque la distinction était nécessaire, les articles publiés par un média donné sur son site web et dans sa version papier ou tablette ont été récoltés de manière distincte. Par exemple, Eureka permet de distinguer les articles publiés par La Presse dans La Presse+, l’application tablette équivalente à l’ancienne presse papier et sur le site web de La Presse. Les versions papier et web sont aussi disponibles dans les bases de données pour Le Devoir, le Journal de Montréal et la Montreal Gazette, alors que seuls des articles publiés sur leurs sites web sont disponibles pour TVA Nouvelles et Radio-Canada, qui sont par ailleurs des radiodiffuseurs sans version imprimée ou tablette. Dans ce corpus, les articles concernant la conférence de Glasgow ont été identifiés à l’aide de la présence d’un ou plusieurs mots clés, qui peuvent être consultés à l’annexe 1.
Les alertes mobiles concernant la COP26 ont été sauvegardées sous forme de saisies d’écran à chaque occurrence par des assistants de recherche pendant la période étudiée.
Codage
Une requête par mot clé a été utilisée pour extraire toutes les publications Twitter et Facebook en lien avec la COP26, dans un premier temps, et au sujet de l’environnement, mais excluant la COP26, dans un deuxième temps. Chaque publication a ensuite été validée à la main comme appartenant à l’une ou l’autre des catégories (COP26 ou environnement) et toutes les publications ont été passées en revue à la main par deux codeurs différents afin d’identifier chacune des publications pertinentes à chacune des deux catégories. La liste des mots clés en français et en anglais se trouve en Annexe 1. Les publications codées « environnements » abordaient des thématiques variées comme la biodiversité, le transport actifs, des études scientifiques sur le climat, les mesures de mitigation climatiques, la gestion des déchets, etc.
Une analyse des sentiments a aussi été complétée pour les corpus de publications Facebook et Twitter des six publications concernant la COP26 ou l’environnement. Chaque publication a été classée comme de ton neutre, positif ou négatif par un premier codeur, puis vérifiée par un deuxième. Une publication étant codée comme étant positive lorsque le vocabulaire et le sens donnaient un ton plus positif à l’affirmation que la phrase la plus neutre qu’il aurait été possible d’écrire pour transmettre le même message et vice-versa pour une affirmation négative. Par exemple, la publication « Justin Trudeau plaide l’urgence d’agir pour contrer la crise climatique » est classée négative. La même information aurait pu adopter le ton plus neutre par la formulation « Justin Trudeau plaide pour une action rapide contre les changements climatiques ». Ici, les mots urgence et crise, notamment, confèrent le ton négatif. Les publications posant une incertitude ou un désaccord ont été soumises à une discussion entre trois codeurs jusqu’à l’obtention d’un consensus. La grosseur du corpus ne nécessitait pas le recours à l’analyse automatisée des sentiments, raison pour laquelle l’analyse humaine a été privilégiée. Nous souhaitions également tester la pertinence et le niveau de difficulté de l’analyse des sentiments sur un corpus de publications dont les auteurs sont des médias d’information sur les réseaux sociaux.
Par ailleurs, le vocabulaire et les cadrages utilisés pour décrire les enjeux climatiques semblent subir des mutations rapides. Selon nos données préliminaires, les médias délaissent les expressions privilégiées par les scientifiques telles que « réchauffement climatique » ou « changements climatiques » pour en embrasser d’autres, plus évocatrices : crise, bouleversement ou urgence climatique, par exemple. Nous avons donc mené un travail exploratoire d’analyse textuelle du vocabulaire mis de l’avant sur les réseaux sociaux et par les différents médias pendant la conférence de Glasgow.
Une analyse par fréquence de mots de plus de cinq lettres, illustrée par nuage de mots, a été complétée à l’aide de l’outil d’analyse qualitative NVivo12.
Élaboration des indices
Un indice global de la prégnance de la COP26 et de l’environnement pour la période du 30 octobre au 13 novembre 2021 a été élaboré pour chaque média en tenant compte des articles produits, de leurs sites web et de leurs réseaux sociaux (Facebook et Twitter).
Pour les sites web, chaque page sauvegardée a été notée sur une échelle de 0 à 1 selon la visibilité de la conférence de Glasgow et de l’environnement sur la page. L’échelle d’évaluation peut être consultée en annexe. Une note de 0 indique une absence de contenu en lien avec l’environnement ou la COP26 sur la page, alors que la note de 1 était attribuée si un article portant sur la COP26 était mis en vedette sur la page d’accueil du site web comme article principal, à la une, et que cet article était accompagné d’autres articles sur la COP26 ou sur l’environnement.
Pour les corpus Facebook, Twitter et les articles publiés, l’indice quotidien de prégnance a été calculé de la manière suivante pour chaque jour et chaque média :
(A/B)/D
A : nombre d’articles ou de publications sur la COP26 du média X au jour Y
B : nombre total d’articles ou de messages du média X au jour Y
D : Ratio A/B le plus élevé du corpus
Diviser le poids relatif de la COP26 (A/B) à une date donnée pour un média donné par le poids relatif le plus élevé du corpus (D) permet d’obtenir un indice de 1, le maximum, pour la journée et le média ayant le plus publié sur la COP26 en proportion et de comparer toutes les autres occurrences à ce point de référence. La moyenne des indices par jour et par média a ensuite été calculée.
Les différents indices moyens pour la période (Site web, Facebook, Twitter, articles) ont été additionnés pour chaque média afin de créer un indice global de couverture entre 0 et 4 pour comparer l’importance accordée à l’enjeu, de manière globale, pour chaque média.
Résultats
La collecte de données a permis de recueillir 7808 articles web, 4860 articles imprimés ou destinés à une application tablette, 174 pages d’accueil de sites web, 3675 publications Facebook et 5161 publications Twitter publiées par les médias composant le corpus entre le 30 octobre et le 13 novembre 2021 inclusivement. La table 1 présente un résumé du corpus en termes de publications recueillies, ainsi que le nombre de ces publications qui mentionnent la COP26 ou l’environnement, ces deux catégories étant mutuellement exclusives. Les articles publiés sur le web présentent la plus forte proportion d’attention accordée à la conférence, avec 6,4 % des articles. Aussi, pour la période étudiée, les pages d’accueil des sites web des six médias du corpus mettaient en avant la COP26 ou un sujet environnemental près de 83 % du temps. L’analyse plus fine des résultats, que nous présentons plus bas, démontre toutefois que ces sujets n’étaient pas toujours mis en évidence.
Table 1. Synthèse du corpus étudié incluant La Presse, Le Devoir, Le Journal de Montréal, Montreal Gazette, Radio-Canada Info et TVA Nouvelles entre le 30 octobre et le 13 novembre 2021 inclusivement. La catégorie environnement exclut la COP26 et vice-versa.
Figure 1. Pour les médias Le Devoir, La Presse, Radio-Canada Info, Montreal Gazette, TVA Nouvelles et le Journal de Montréal entre le 30 octobre et le 13 novembre 2021 inclusivement ; A) Nombre absolu et relatif d’articles sur la COP26 publiés dans les plateformes papier/tablette et sur le web par jour ; B) Nombre absolu et relatif de publications Twitter sur la COP26 ou l’environnement publiées par jour ; C) Nombre absolu et relatif de publications Facebook sur la COP26 ou l’environnement publiés par jour ; D) Indice quotidien moyen de la visibilité de la COP26 ou de l’environnement sur les pages d’accueil des sites web des médias du corpus
Prégnance des enjeux dans le temps
La figure 1 présente l’analyse comparative, selon la plateforme, de l’attention absolue ou relative accordée à la COP26 et/ou à l’environnement pour la période étudiée pour l’ensemble du corpus. De manière générale, les courbes de prégnance des enjeux de la COP26 ou de l’environnement sont assez similaires d’une plateforme à l’autre, avec un sommet d’attention au départ, puis une attention moindre, mais soutenue, marquée par de plus petits sommets d’attention, pour le reste de l’événement. Les courbes de médiatisation de la COP et de l’environnement se chevauchent presque fidèlement la plupart des jours et pour la plupart des plateformes, indiquant que les médias accompagnent leur couverture de la COP d’articles à thématique environnementale autre. Sur Facebook, on voit un phénomène de « l’un ou l’autre » à quelques reprises : le contenu partagé en environnement une journée donnée concerne soit la conférence, soit d’autres sujets environnementaux.
L’analyse de la prégnance de la COP26 et de l’environnement comme enjeux dans le temps permet d’arriver aux constats suivants quant aux éléments qui entravent ou favorisent la percée de ces sujets. Nos grandes tendances montrent que les éléments qui poussent la couverture vers le haut sont la nouveauté (début et fin d’événement, arrivée d’une nouvelle personnalité publique à Glasgow), le conflit (manifestations, désaccords et controverses) et la pertinence locale (présence de politiciens ou personnalités locales à l’événement, controverses ou anecdotes avec une résonnance locale comme l’achat de publicités dans les médias britanniques par le gouvernement du Québec). De manière générale, la couverture environnementale suit une courbe semblable à celle de la COP26, l’événement servant de moteur pour publier davantage de contenu sur la thématique. Au contraire, la fatigue médiatique causée par la persistance de l’enjeu dans le temps, les crises, controverses ou événements locaux ponctuels concomitants et les routines médiatiques (dimanches peu actifs, par exemple) entravent la médiatisation. Par contre, nous observons des brisures ou des variations de ces patrons généraux en fonction du média, mais aussi de la plateforme de diffusion.
Toutes plateformes de diffusion confondues, le début de l’événement est marqué par un sommet d’attention. Ce dernier ne se manifeste toutefois pas à l’ouverture, le 31 octobre, mais davantage les 1er et 2 novembre. Des sommets d’attention moins importants surviennent, mais avec des différences entre les plateformes, autour des 6 et 7 novembre et en clôture de l’événement, les 12 et 13 novembre.
Le jour d’ouverture du 31 octobre était un dimanche, une journée moins faste dans l’actualité et à effectifs réduits dans les salles de rédaction, et la journée a généré moins d’attention médiatique que les jours suivants. Cependant, la cause environnementale a profité des projecteurs, les six médias présentant un sommet de partage de publications à thématique environnementale, lors de cette journée de lancement.
Plusieurs dirigeants mondiaux sont arrivés à Glasgow les 1er et 2 novembre 2021, ce qui a engendré un niveau d’activité médiatique plus important. Plus d’articles « généraux » sur le coup d’envoi de la COP26 ont été partagés sur les réseaux sociaux le 1er novembre. L’arrivée et la présence du premier ministre canadien Justin Trudeau à Glasgow ont été grandement soulignées. Plusieurs initiatives majeures ont également été lancées durant ces premières journées. Autre observation notable : alors que la COP26 occupait une place importante sur les pages Facebook des médias analysés, les articles portant sur d’autres sujets environnementaux ont presque disparu de cette plateforme pendant ces journées.
Il y a eu un autre sommet notable dans l’activité médiatique liée à la COP26 en date du 3 novembre 2021. Ce jour-là, les médias analysés se sont penchés sur la présence à Glasgow du premier ministre du Québec, François Legault. Alors que l’on peut observer un sommet dans l’activité Twitter et Facebook autour de la COP et du nombre d’articles produits, il est intéressant de constater que les médias n’ont pas beaucoup mis en évidence ces articles sur la page d’accueil de leurs sites web. Il s’agit du creux le plus important du graphique associé. Ce jour-là, la controverse autour de l’unilinguisme du PDG d’Air Canada et le recul du gouvernement du Québec à propos de la vaccination obligatoire du personnel de la santé contre la Covid-19 fait la une des sites web des médias étudiés.
Après le 3 novembre, l’intérêt pour la COP26 perd de la vitesse en raison d’enjeux locaux qui sèment la controverse ou suscite l’intérêt, notamment la poursuite de la controverse autour de l’unilinguisme du PDG d’Air Canada, les élections municipales imminentes et le retour de Carey Price, le gardien de but de l’équipe de hockey de Montréal, Les Canadiens.
La COP26 a pu profiter d’un regain d’intérêt médiatique avec les manifestations pour le climat qui se sont tenues à Glasgow et partout à travers le monde, dont Montréal, le 6 novembre. Cet événement a grandement été mis de l’avant sur les pages d’accueil des sites web analysés. Il est bien documenté dans la littérature que les manifestations génèrent de l’intérêt médiatique (Shahin, Zheng et al., 2016).
Le 9 novembre, jour d’élections municipales à la grandeur du Québec, enregistre un creux dans la couverture de la conférence et de l’environnement, toutes plateformes confondues, un des plus bas résultats enregistrés.
En date du 10 novembre, nous pouvons voir un regain dans l’activité médiatique après une journée plus mouvementée à la conférence : la version préliminaire de la déclaration finale de la COP26 a été rendue publique la veille au soir, et d’autres engagements retiennent l’attention.
Le ministre canadien de l’Environnement et du Changement climatique Steven Guilbeault a pris la parole à Glasgow le 10 novembre. Les premières publications sur Twitter et Facebook à ce sujet ont cependant été publiées le 11 novembre, et la couverture médiatique associée, assez importante, s’est étendue jusqu’au 13 novembre.
Alors que la conclusion de la conférence a occasionné un sommet dans les publications Facebook et Twitter liées à la COP26, on peut constater que le même phénomène ne s’est pas produit pour les pages d’accueil des sites web des médias analysés, où la COP26 a peu été mise en vedette du 8 au 13 novembre. Le nombre d’articles produits, que ce soit en nombre absolu ou relatif, n’égale pas non plus celui de l’ouverture de l’événement, bien qu’un léger sommet soit observé. La fatigue médiatique qui s’installe lorsqu’un événement perdure constitue une explication plausible de cette tendance.
Figure 2. Nombre d’alertes mobiles (notification) envoyées par jour, entre le 30 octobre et le 13 novembre 2021, par l’ensemble des médias du corpus
Figure 3. Indice de la prégnance de la COP26 selon les différentes plateformes pour Le Devoir, La Presse, Radio-Canada Info, Montreal Gazette, TVA Nouvelles et le Journal de Montréal entre le 30 octobre et le 13 novembre 2021
L’ouverture (31 octobre), la présence et l’arrivée de dirigeants, dont Justin Trudeau (2 novembre) et la clôture de la COP (12-13 novembre) présentent aussi des sommets d’activité en matière de notifications envoyées aux téléphones cellulaires, comme l’illustre la figure 2. Fait à noter, seuls Le Devoir (9), Radio-Canada Info (7) et La Presse (2) ont envoyé des notifications mobiles à leurs abonnées sur la COP26 pendant la période étudiée.
La figure 3 confirme par ailleurs la plus faible visibilité accordée à la COP par les trois médias n’ayant pas envoyé d’alertes mobiles. En effet, peu importe la plateforme, TVA Nouvelles, le Journal de Montréal et Montreal Gazette se partagent les trois dernières positions en termes d’indice de prégnance de l’enjeu, alors que Radio-Canada Info, Le Devoir et La Presse se partagent les trois premières. Il est intéressant de noter certaines tendances propres à chaque média. Le Devoir est celui à avoir le plus mis en avant la COP et l’environnement sur son site web, y consacrant des unes, bandeaux et sections entières à plusieurs reprises, tout comme Radio-Canada Info, aussi très actif sur ses réseaux sociaux sur le sujet. La Presse a fait preuve de constance, se classant troisième pour tous les indices. Le cas de TVA Nouvelles et du Journal de Montréal est intéressant : ils ont bel et bien écrit sur le sujet de la COP, mais ces articles ont été peu mis de l’avant sur leurs sites web et leurs réseaux sociaux. Phénomène opposé dans le cas de Montreal Gazette : peu d’articles ont été produits, mais parfois, le même article occupait un espace de la page d’accueil de leur site web pendant plusieurs jours.
Ces variations peuvent résulter de différents phénomènes, qui vont de l’orientation politique ou idéologique des médias, les ressources humaines et matérielles dont ils disposent, leurs modèles d’affaires, etc. Les raisons sous-tendant ces variations nécessiteraient une étude approfondie.
Analyse des sentiments et vocabulaire
L’analyse des sentiments de toutes les publications à propos de la COP26 ou de l’environnement publiées sur les réseaux sociaux Twitter et Facebook par les médias du corpus pendant la période étudiée montre que le ton neutre est le plus souvent adopté. Plus de publications présentent un ton négatif sur Twitter, soit 24,1 % pour l’ensemble du corpus, que sur Facebook (20,0 %), où le ton positif fait une plus grande percée, bien qu’elle soit timide (3,2 % pour Facebook contre 2 % pour Twitter). Par exemple, la publication « Le défi climatique des énergies fossiles : l’exemple de l’Allemagne, une championne des énergies vertes qui demeure pourtant dépendante du charbon » est classée positive en raison notamment de l’utilisation du terme « championne », connoté positivement, alors d’une formulation plus neutre aurait pu être utilisée. Le Devoir est le seul média à ne faire aucun usage du ton positif.
L’analyse par fréquence de mots de l’ensemble des publications Twitter et Facebook neutres, négatives ou positives est présentée sous forme de nuage de mots à la figure 5. Parmi les mots nouveaux ou plus fréquents entre les corpus neutre et négatif, notons l’apparition de crise, manifestants, menace, écoanxiété, urgence, dérèglement ou catastrophe. Parmi les mots nouveaux ou plus fréquents entre les corpus neutre et positif, on peut voir apparaître appel, lutte, vert/verte, engagement, propositions, commun, avenir, développement et carboneutralité.
Figure 4. Analyse des sentiments : Proportion des publications Twitter (A) et Facebook (B) sur la COP26 et l’environnement de La Presse, Le Devoir, Radio-Canada Info, Montreal Gazette, TVA Nouvelles et Journal de Montréal, entre le 30 octobre et le 13 novembre 2021, présentant un ton neutre, positif ou négatif
Figure 5. Nuages de mots créés à partir d’une analyse de la fréquence des mots de plus de cinq lettres dans les corpus de publications Twitter et Facebook sur la COP26 et l’environnement de La Presse, Le Devoir, Radio-Canada Info, Montreal Gazette, TVA Nouvelles et Journal de Montréal entre le 30 octobre et le 13 novembre 2021. A) Publications négatives ; B) Publications neutres ; C) Publications positives
Discussion
La prégnance à l’ère du journalisme multiplateforme
Nos résultats démontrent que la COP26 a figuré à l’agenda des médias québécois, qu’elle a été une occasion de mettre d’autres thématiques environnementales à l’agenda, mais que la prégnance de l’enjeu a varié à la fois dans le temps, d’une plateforme à l’autre et d’un média à l’autre. De plus, l’analyse exploratoire des sentiments et du vocabulaire utilisé par les médias sur les réseaux sociaux dans les publications concernant la COP26 et l’environnement montrent que les médias adoptent des cadrages différents de ces enjeux, mais qu’un même média peut également choisir des cadrages différenciés, adaptés à ses différentes plateformes de diffusion.
Notre analyse démontre l’importance de renouveler nos approches quand vient le temps de mesurer la prégnance d’un enjeu à l’ère du journalisme multiplateforme. Notre travail en ce sens, bien que préliminaire et appelant à davantage de recherche avec des thématiques et des corpus variés, donne quelques pistes à suivre.
D’abord, le seul décompte des articles produits pour les plateformes imprimées ou numériques, en nombre absolu ou relatif et par un corpus de médias sur un sujet donné est insuffisant pour rendre compte de la prégnance d’un enjeu dans l’actualité. En effet, nos résultats démontrent que certains médias peuvent produire un nombre appréciable d’articles, mais les mettent peu de l’avant sur leur site web et leurs réseaux sociaux, rendant pratiquement l’enjeu invisible, ou à tout le moins mineur, pour leurs publics. Au contraire, d’autres feront le choix de promouvoir abondamment un enjeu sur leurs différentes plateformes.
Pourquoi ? Plusieurs pistes seraient à explorer, mais notre corpus nous amène à poser certaines hypothèses. Il montre qu’aucun des médias québécois à l’étude n’a réduit la COP26 au silence, et que l’environnement a été une thématique importante pendant la période étudiée. Les médias québécois nous signalent donc, par leurs choix, que l’événement mérite une place dans l’actualité québécoise. Par contre, les décisions prises pour promouvoir ou non les articles produits sur les différentes plateformes nous renseignent probablement davantage sur un autre aspect, c’est-à-dire si ces médias considèrent que l’enjeu est attrayant pour leurs publics selon les plateformes. En effet, il ne suffit plus de produire la nouvelle, il faut la publiciser (Tandoc Jr. et Vos, 2016), générer un trafic qui à son tour apporte notoriété à la marque, revenus publicitaires, abonnements, revenus philanthropiques, etc. Le cas de TVA Nouvelles est intéressant à cet égard. Les différents indices de prégnance portent à croire que TVA Nouvelles présume d’une réaction négative ou nuisible de ses publics à la COP26 et l’environnement, ou encore accorde peu de ressources à leur promotion, pour des raisons à déterminer. Si les articles sont produits, ils souffrent d’une faible visibilité sur la page d’accueil du site web du média et sur ses réseaux sociaux. Ceci est d’autant plus vrai sur Facebook. Cela pourrait s’expliquer par le fait que les médias subissent davantage d’invisibilisation par l’algorithme du réseau social de Meta que sur Twitter et tentent de faire des choix qui suscitent l’engagement des publics pour gagner plus de visibilité sur les fils d’actualité (Bailo, Meese et al., 2021).
De plus, les médias doivent modérer des commentaires sur leur page Facebook, ce qui coûte en temps et en ressources humaines, une perturbation qui mène même certains médias à fermer complètement les commentaires (Ksiazek et Springer, 2020). Il serait intéressant d’explorer, dans une étude ultérieure, dans quelle mesure certains médias estiment le coût-bénéfice de l’environnement désavantageux. Par exemple, ils peuvent juger que l’environnement leur fait gagner peu de visibilité tout en leur coûtant trop en temps de modération, notamment en raison des trolls et des climatosceptiques. D’autres médias, comme Le Devoir et Radio-Canada Info, semblent au contraire présumer que leurs publics réagiront positivement au contenu concernant la COP26 et l’environnement, mettant ces contenus en avant sur leurs plateformes numériques et leurs réseaux sociaux. Des analyses quantitatives et qualitatives, incluant des observations dans les salles de rédaction et des entrevues avec les artisans de ces médias, seraient nécessaires pour expliquer plus finement les facteurs influençant les processus décisionnels de ces différents médias quant à leur couverture des enjeux climatiques.
Quelles que soient les raisons qui expliquent ces tendances, il apparaît clair que les pratiques des différents médias, exposant ou non leurs publics à certains enjeux, pourraient contribuer à renforcer les bulles informationnelles, idéologiques et identitaires qu’on reproche aux réseaux sociaux de créer, et dont les médias eux-mêmes disent souffrir. Cette question mérite d’être creusée pour appuyer les médias dans la prise de décisions qui favorisent à la fois une couverture des enjeux climatiques à la hauteur de l’urgence, mais qui est aussi compatible avec l’ADN de ces entreprises de presse, leur santé économique et leur mission.
Ensuite, la prégnance des enjeux de la COP26 et de l’environnement dans le temps pour notre corpus est en adéquation avec les hypothèses développées au fil du temps par les théories de l’agenda setting et du cadrage dans un contexte de journalisme environnemental. Nous avons pu observer l’affection des médias pour la nouveauté avec les sommets importants en ouverture de conférence. L’intérêt médiatique pour le conflit, avec l’importance de la couverture autour des manifestations pour le climat et pour les cadrages élitistes et politiques de l’environnement (Stoddart, Haluza-DeLay et al., 2016), avec la couverture importante des dirigeants politiques canadiens et internationaux, se reflète aussi dans les résultats. La fatigue médiatique et la fatigue de compétition (Djerf-Pierre, 2012) qui s’installent avec la persistance d’un enjeu dans l’actualité se manifeste aussi, avec une couverture moindre en fin d’événement et lors d’éclipses médiatiques causées par d’autres nouvelles, cela même alors que les enjeux politiques sont à leur sommet à l’approche de la négociation finale et de la signature du Pacte de Glasgow.
À la lumière de ces réflexions, nous posons qu’une analyse combinant les articles produits pour les plateformes traditionnelles et numériques des médias et leur partage sur leurs réseaux sociaux, principalement Twitter en raison de la plus grande facilité de moissonnage, permet une mesure plus juste de la prégnance sans multiplier indument les corpus et analyses parallèles.
Crise et négativité : Cadrages émergents ?
Bien qu’exploratoire, notre analyse des cadrages par une analyse des sentiments montre que les médias québécois adoptent le plus souvent un ton neutre dans leurs publications sur la COP26 et l’environnement. Toutefois, des variations peuvent être observées d’une plateforme à l’autre (Twitter ou Facebook) et d’un média à l’autre. Ces différences découlent probablement de choix éditoriaux que les médias font en fonction des conceptions qu’ils entretiennent à propos de leurs publics spécifiques sur chaque plateforme. Il serait intéressant d’utiliser ces résultats préliminaires pour bâtir une étude qualitative par entrevues de cadres et de gestionnaires/pupitres aux réseaux de médias d’information afin de valider certaines hypothèses. Certains médias adoptent-ils un ton neutre ou négatif pour atteindre différents publics (les jeunes, notamment) ? Les contenus environnementaux partagés sur Facebook sont-ils sélectionnés en fonction des croyances entretenues à propos de l’algorithme, ou encore des investissements requis en modération avec la présence visible de trolls ou de climat septique dans les publics ?
Les publications dont le ton est négatif, bien que minoritaires, voient aussi émerger un vocabulaire qui s’éloigne de la sémantique scientifique des changements climatiques. « Crise climatique », « urgence climatique », « menace climatique », « écoanxiété » : la charge émotive et politique de ces expressions diffère de celle des termes utilisés dans les publications neutres tels « changements climatiques » ou « réchauffement ». L’exploration de l’émergence de ces expressions dans des corpus plus importants et sur des périodes étendues sera requise pour comprendre leur pénétration dans les contenus journalistiques au fil du temps. Les influences qui précèdent leur adoption viennent-elles de la sphère politique, militante, scientifique ? Leur utilisation est-elle en progression, normalisée ? Dans quels contextes, dans quels types de contenus journalistiques ? Notre analyse soulève en effet de nombreuses questions qui ouvrent de nouvelles pistes de recherche.
Ce projet a été financé par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH).
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