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Parutions et AAC
Nouvelle série, n°2

2nd semestre 2018

DÉBATS

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ÉDITORIAL

À contre-courant ?

À l’ère des écrans, consacrer à l’avenir du journalisme une revue imprimée cacherait-il
un message ? Si oui, ce n’est pas exactement celui que l’on pourrait croire.
Dissipons quelques confusions...

A

u cas où quelqu’un ne l’aurait pas remarqué, l’instantanéité et la dématérialisation ont transformé le paysage dans lequel s’inscrit le journalisme actuel et dans lequel il s’efforce de durer. Certes, ces tendances ne sont pas totalement inédites : on s’inquiétait de la première au XIXe siècle (le télégraphe…) et de la seconde à peine plus tard (la diffusion hertzienne…). Mais leur emballement achève aujourd’hui de disloquer les repères et les prévisions d’un métier dont certains annoncent même la fin.

Dans ces conditions, il y avait quelque chose d’insolite, presque d’incongru à lancer une nouvelle série des Cahiers du journalisme. En fait d’instantanéité, de longs mois s’écoulent entre deux parutions. Pour ce qui est de la virtualité, elle s’obstine à publier une édition paginée et imprimée, dont la mise en page ne s’autorise que quelques transgressions, généralement volontaires, des usages les plus traditionnels du code typographique. Il faudrait, en outre, des centaines de tweets pour contenir un seul de ses articles. Et ils ne s’effacent pas. Ils ne peuvent même pas recevoir de mise à jour, si ce n’est sous la forme d’un autre article. Pire, les producteurs de la revue livrent une chasse résolue aux liens internet anodins dont quelques soumissions, mais de plus en plus fréquentes, sont machinalement parsemées.

Pour qui ne percevrait le marché de l’information qu’à travers l’écran de son téléphone, cette posture éditoriale trahirait forcément un attachement désuet, voire réactionnaire, à des temps révolus. En tout cas un entêtement malvenu pour une revue qui se propose de contribuer utilement à éclairer les évolutions et les perspectives du journalisme d’aujourd’hui.

Si tel était le cas, cela n’aurait en réalité aucune importance puisque les Cahiers professent une constante impartialité vis-à-vis des soumissions qu’ils publient1 : aussi néophiles ou néophobes qu’elles pourraient s’avérer, seuls comptent l’intérêt et la consistance de ce qu’elles avancent. Et une thèse déplaisante est souvent beaucoup plus stimulante qu’un propos convenu (même si elle s’expose, bien sûr, à des contradictions dans le numéro suivant).

Mais si la revue ne renonce pas aux formats traditionnels de l’édition, quand d’autres se satisfont de systèmes de publication en ligne automatisés et non paginés, ce n’est pas pour être un bastion du passé. Le medium n’est pas le message ou, en tout cas, ce n’est pas ce message-là. Si ce choix éditorial assez astreignant devait être interprété comme le signe d’une quelconque réticence, celle-ci ne viserait sûrement pas l’innovation technique et professionnelle, souvent nécessaire, parfois inévitable et toujours intéressante. Elle viserait tout au plus la confusion qui l’accompagne immanquablement dans un « un identique mélange de fantaisie, de propagande et de vérité2 » et qui se traduit à toutes les échelles. Un lien internet n’est pas une référence bibliographique, un article édité et stable n’est pas une page virtuelle et modifiable, une revue n’est pas un blogue. Aucun jugement de légitimité ici : si les nouvelles formes médiatiques, et a fortiori leurs métissages, peuvent formidablement enrichir le paysage de l’information, c’est en due connaissance de ce que l’une ou l’autre apportent de particulier, mais aussi de la spécificité de ce à quoi elles s’engagent. Les dissoudre dans un vague bouillon conceptuel et technique ne reviendrait en revanche qu’à affadir l’ensemble et à dévaluer chacune.

C’est du reste dans cet esprit que la nouvelle formule des Cahiers s’est subdivisée en deux revues jumelées mais distinctes, la première accueillant des textes de réflexion, toujours argumentés mais parfois incisifs ; la seconde, des travaux de recherche répondant à d’autres critères et soumis à une procédure d’évaluation externe.

Au bout du compte, les problèmes de confusion et les questions de délimitation conceptuelle ou professionnelle comptent parmi les plus anciens défis du journalisme et les plus brûlants de ceux qu’il affronte aujourd’hui. En feuilletant les 27 éditions des Cahiers du journalisme qui se sont succédé depuis 1996, on s’aviserait que la plupart de leurs articles en parlent d’une façon ou d’une autre, et comme on le verra, ce numéro ne fait pas exception.

Rien d’étonnant à cela : disjoindre des amalgames spontanés ou questionner à l’inverse des distinctions transcendantales est après tout le travail normal de la recherche, mais aussi l’une des conditions d’une réflexion professionnelle solide. De même que l’exercice constant du scepticisme et d’un débat d’idées ouvert mais attentif, principes fort classiques et pourtant si modernes que leur nécessité actuelle se manifeste constamment.

LES CAHIERS DU JOURNALISME



1

Y compris (faut-il le préciser ?) celles de leurs propres collaborateurs, lesquelles, soumises aux mêmes règles que les autres contributions, n’engagent pas plus qu’elles la revue et sont tout autant – pour ne pas dire plus – offertes à des répliques ultérieures.



2

James W. Carey, « McLuhan : généalogie et descendance d’un paradigme », Quaderni, 37, 1998, p. 111-131






Référence de publication (ISO 690) :
LES ÉDITEURS. À contre-courant ? Les Cahiers du journalisme - Débats, 2018,
vol. 2, n°2, p. D3-D4.
DOI:10.31188/CaJsm.2(2).2018.D003


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