Nouvelle série, n°2
2nd semestre 2018 |
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Étude du dispositif du Monde diplomatique : la couverture de l’évolution de la conjoncture chinoise entre 1975 et 1992
Alexandre Schiele, Université du Québec à Montréal
Résumé
La recherche dont cet article rend compte a tenté de répondre à la question suivante : comment évolue dans le temps la couverture médiatique d’un objet lorsque cet objet est lui-même en évolution ? Nous avons montré que la couverture médiatique à long terme du Monde diplomatique se caractérise par des phases d’interprétation stables, entrecoupées d’évolutions rapides, voire de ruptures, que nous avons qualifiées d’équilibres médiatiques ponctués. C’est au cours de ces phases que se manifeste ce que nous avons appelé l’effet de prégnance médiatique, c’est-à-dire la reproduction d’une même posture d’un article à l’autre quant à une classe d’évènements donnés, réels ou potentiels. Finalement, cette recherche a montré que la posture du journal se condensait dans le cadre interprétatif mobilisé par un collaborateur principal (pour un objet donné, telle l’évolution de la situation chinoise entre 1975 et 1992), lequel actualisait l’effet de prégnance médiatique.
Abstract
This research answers the following question: how does long-term media coverage change when its object is itself in flux ? We have shown that long-term media coverage by Le Monde diplomatique followed a succession of phases of stable interpretation punctuated by rapid evolutions, if not breaks, which we called Punctuated media equilibriums. It is during these phases that the reproduction of the media posture from one article to the next in regard to a given class of events, real or potential, manifests itself, which we referred to as the Media pregance effect. Finally, this research revealed that the media posture of the newspaper was expressed in the interpretation framework adopted by its main collaborator (on a given topic, such as Chinese politics), whom, because he was its agent, actualized the Media pregnance effect.
DOI: 10.31188/CaJsm.2(2).2018.R031
P
our Castells, le champ culturel est « le produit de la consolidation de significations partagées, elles-mêmes cristallisations de pratiques dans des configurations spatio-temporelles » (2000, p. 7 nous traduisons). Tout journal actualise une telle configuration. C’est pourquoi les discours associés à tel ou tel objet qu’il relaie à ses lecteurs contribuent à la production de la culture. À cet égard, Le Monde diplomatique occupe une place à part dans le paysage intellectuel francophone : il couvre principalement la politique intérieure des pays étrangers, il prend explicitement parti sur les évènements, et la très grande majorité des articles sont signés. On peut donc s’interroger sur les significations qu’il véhicule et la façon dont il les véhicule.
La recherche dont nous présentons les principaux résultats a porté sur la période de transformations qu’a connue la Chine dès après la mort de Mao Zedong et dont Deng Xiaoping est la figure emblématique de 1975 à 1992. Le Monde diplomatique, dirigé par Claude Julien tout au long de ces années, a rendu compte de cette évolution à son lectorat, une évolution caractérisée par l’abandon du maoïsme et le passage progressif à une économie de marché grâce aux réformes économiques de Deng Xiaoping. Il s’est agi de savoir quelle image de la Chine a été véhiculée par le journal, et si elle s’est modifiée au cours de la période étudiée1. Éliminons d’emblée une ambiguïté : il ne s’agit pas d’évaluer la concordance entre l’image projetée et la réalité de la situation chinoise, mais les modalités de sa couverture journalistique. Il ne sera donc qu’indirectement question de la Chine puisque l’objet est de savoir comment on en parle, et non ce qu’on en dit.
La refondation du Monde diplomatique
En 1973, dans l’effervescence intellectuelle qui suit Mai 68, Le Monde diplomatique est refondé : il s’intéresse désormais à la politique intérieure des pays du tiers-monde2. Claude Julien, son nouveau rédacteur en chef, adhère aux idéaux de Mai 68. Il participe donc d’un mouvement qui prône un changement radical de la société, qui refuse les structures formelles, et qui soutient les luttes de libération dans le tiers-monde, sans pour autant renoncer à un non-alignement en politique française. C’est cette vision qu’il imprime au mensuel elle évoluera de pair avec celle du consensus social sans pour autant que Le Monde diplomatique renonce à une vue critique (Julien, 1979).
Les évènements de Mai 68 constituent sans l’ombre d’un doute un catalyseur. Depuis la chute de la Quatrième république en 1958, la France n’avait pas connu d’alternance, accentuant la polarisation de part et d’autre de l’hémicycle. En outre, la personnalisation de la présidence de la Cinquième république par le Général de Gaulle depuis 1961 et sa longévité au pouvoir radicalisent l’opposition de gauche, d’autant que, depuis les Accords d’Évian (1962), l’empire colonial français a pratiquement été démantelé, éliminant le principal vecteur de compromis puisque la préservation de l’empire français était le seul point commun de la gauche et de la droite de gouvernement (Eveno, 2004, p.184-199, passim). L’engagement intellectuel et théorique à gauche glissait à l’extrême gauche, et ce glissement était ouvertement revendiqué. Claude Julien cherchait à positionner Le Monde diplomatique dans ce champ intellectuel et journalistique qui s’affirmait, mais sans renoncer à la qualité qui le caractérisait auparavant (Harvey, 2014).
Aussi, prenant ses distances avec la posture de neutralité du journal Le Monde, il adopte une position ouvertement tiers-mondiste, c’est-à-dire favorable au développement de voies nationales de la construction du socialisme. Pour cette raison, le journal devient critique à l’égard des superpuissances. Si l’engagement tiers-mondiste de Claude Julien est conforté par les évènements de Mai 68, cet engagement remonte au tournant des années 1960, lorsqu’il est envoyé spécial du Monde pour couvrir les évènements de la Révolution cubaine après le triomphe de la lutte révolutionnaire dirigée par Fidel Castro (1959). Il est important de souligner que ses articles dénoncent le jeu des superpuissances qui tentent de réduire Cuba à une case sur l’échiquier de la Guerre froide. Les titres de ses articles sont éloquents à cet égard : Test de l’attitude des deux blocs à l’égard des jeunes nationalismes (Julien, avril 1960), et Cuba au cœur de la compétition russo-américaine pour le contrôle des matières premières (Julien, août 1960)3.
Autrement dit, Claude Julien dénonce l’ingérence des grandes puissances dans les affaires intérieures des pays qui cherchent leur propre voie de développement. Il prend position pour l’indépendance nationale dans le cadre d’une coopération mondiale accrue. Sur ce point, il ne rompt pas avec la politique étrangère de la France de de Gaulle4. Là où il le fait, c’est lorsqu’il prend parti pour la périphérie contre le centre, pour les sans-voix contre les hégémons culturels, en somme : pour les dominés contre les dominants. Autrement dit, Claude Julien cherchait à faire du mensuel un journal de référence, ancré à gauche et, pour ainsi dire, en phase avec l’esprit de son temps.
Avec ce repositionnement, Le Monde diplomatique connaîtra un succès durable. Ainsi, à partir de 1979, le nombre d’articles mensuels augmentera de façon continue, passant de 415 articles par année en 1979, année où le mensuel compte le plus petit nombre d’articles, à 910 en 1991, année comptant le plus grand nombre. Cette croissance s’explique aisément par le succès grandissant du mensuel, dont le tirage, pour le rappeler, passe de 112 875 exemplaires en 1981 à 126 250 en 1985, pour une audience elle aussi en croissance : elle s’élevait à 557 000 lecteurs en France métropolitaine en 1985 (Le Monde diplomatique, novembre 1985, p. 25).
Le maoïsme, Mai 68 et Le Monde diplomatique
La Chine communiste a déchaîné les passions tant en Chine qu’à l’étranger. La Guerre froide et encore plus la Révolution culturelle rendaient difficile, pour ne pas dire impossible, toute analyse distanciée et dépassionnée de la Chine communiste en acte. Nous retenons que la Révolution culturelle chinoise et le maoïsme ont exercé une influence majeure sur Mai 68 car ils offraient un contre-modèle politique. Les évènements de Mai 68 en France avaient porté sur le devant de la scène une jeunesse critique pour laquelle la Révolution culturelle était un exemple dont elle pouvait s’inspirer. Ses idées sur cette révolution – et à travers elle sur le maoïsme – étaient celles qui avaient non seulement été véhiculées, mais surtout publicisées par le pouvoir maoïste lui-même (Hourmant, 1997, p. 17-55).
C’est à la fois dans le contexte d’un engagement tiers-mondiste et des idéaux de la Révolution culturelle que le mensuel va accorder une relative prépondérance à la couverture de la Chine. Dès sa refondation, il va porter un regard positif, bien que critique, sur la situation chinoise. Cette attention particulière se vérifie par l’importance que la Chine occupe dans ses pages : elle est le quatrième pays le plus couvert après la France, l’URSS et les États-Unis, ces deux derniers monopolisant les débats mondiaux à l’époque5.
La Chine fera donc l’objet d’une couverture assidue entre 1975 et 1992, période étudiée dans le cadre de la recherche, avec un total de 228 articles, publiés au rythme d’un peu plus d’un par mois. Le Monde diplomatique suit donc avec attention ce qui s’y passe, car son potentiel – alors qu’elle n’est encore qu’un pays du Tiers-Monde – se révèle au fur et à mesure que Deng Xiaoping lance ses réformes et accroît la présence et la visibilité de la Chine sur la scène internationale. Le simple fait que la Chine soit le pays auquel Le Monde diplomatique accorde le plus d’attention, après la France et les superpuissances, témoigne bien de l’importance qu’il lui accorde. Or, en 1975, la nouvelle formule du Monde diplomatique est fixée, y compris l’optique dans laquelle il aborde les enjeux chinois, alors que la Chine elle-même amorce un cycle de transformations majeures. L’importance de la couverture de la Chine peut ainsi être interprétée comme le résultat de la politique éditoriale du Monde diplomatique tout autant que celui de l’écho dans le monde des transformations qui se produisent en Chine6.
Trois moments d’intense activité journalistique se détachent au cours de la période considérée – soit 1975-1976, 1978-1980 et 1987-1989 – chacun marqué par la publication de 10 articles annuellement, soit presque un par mois. Ces moments correspondent aux périodes d’incertitudes entourant le décès de Mao Zedong, à l’ascension de Deng Xiaoping, et au mouvement antitotalitaire global qui culmine en Chine au cours du Printemps de Beijing. Toutefois, parce que ces moments retiennent l’attention des médias dans leur ensemble, ce découpage ne suffit pas à caractériser la couverture journalistique de la Chine par Le Monde diplomatique. En effet, pour ce faire, il est nécessaire de les recouper avec d’autres indices tels la succession des évènements en Chine, les changements de direction au journal et la rotation des contributeurs attitrés.
Le sens d’un questionnement
La Chine postmaoïste commence à se mettre progressivement en place à partir de 1978. Cette évolution se produit après la période de refondation et de consolidation du Monde diplomatique au cours de laquelle il a redéfini sa posture éditoriale et adopté une ligne promaoïste dans sa couverture de la Chine7. Aussi, il ne peut être question de faire l’impasse sur la tension entre l’interprétation promaoïste de l’analyse de la situation chinoise, au moment où s’affirment des personnalités comme Hua Guofeng et Deng Xiaoping porteurs de projets différents. C’est pourquoi, l’enjeu de la recherche peut se formuler ainsi : puisque la couverture de la Chine par Le Monde diplomatique participe d’une vision du maoïsme encore vive en France au moment même où la Chine se distancie de cet idéal : le journal ajuste-t-il sa couverture, et comment le fait-il le cas échéant ?
Ces considérations nous ont conduit à préciser la question qui a guidé la recherche. Elle est toute simple en apparence : comment la presse, et en l’occurrence Le Monde diplomatique, parlent-ils d’une situation mouvante et complexe, étalée dans le long terme comme celle qui prévalait en Chine, après la mort de Mao Zedong (1976), un pays qui en moins d’une décennie (1979-1989) a substitué le capitalisme au communisme8. Autrement dit, comment évolue dans le temps la couverture médiatique d’un objet lorsque cet objet est lui-même en évolution ?
Contre toute attente, il est surprenant de constater qu’en 2018, seul un nombre limité d’études a été consacré au journal Le Monde diplomatique, alors qu’il est devenu un journal de référence dont les prises de position suscitent des controverses, y compris au sein du champ médiatique9. Ainsi, on ne compte que cinq thèses de doctorat, un mémoire de DESS, trois mémoires de DEA (diplôme d’études approfondies) et un mémoire de maîtrise. L’essentiel des travaux repose sur des analyses de contenu et particulièrement sur la couverture régionale. Ainsi, trois d’entre eux se concentrent sur la couverture du Proche-Orient et plus précisément sur celle des conflits qui ont marqué et déchirent encore cette région du monde (Abi Karam, 1984 Milczach, 2000 Ghiles-Meillac, 2005).
Ces études, pour la plupart non seulement ponctuelles, portent sur la courte durée. Aucune ne s’interroge sur l’évolution du mensuel, sur le contexte qui provoque cette évolution, ou sur les conséquences de cette évolution sur le choix et le traitement des articles. Au mieux, elles constatent la succession des grandes phases de l’histoire du Monde diplomatique. Au pire, elles entendent critiquer ou même réfuter les positions du journal10. Or, dans l’objectif d’appréhender son travail journalistique, il est important de rappeler les contextes parallèles en fonction desquels il a opéré. Cette précision soulève immédiatement une nouvelle question fondamentale oubliée par ces études : quelles sont les formes de médiation et de médiatisation du Monde diplomatique, et rompent-elles réellement avec les pratiques du champ journalistique ? Parce que Le Monde diplomatique se réclame d’une rupture avec les valeurs et les pratiques dominantes dans ce champ, cette rupture affirmée par le journal a été acceptée d’emblée par ces travaux sans être questionnée, ne serait-ce que pour en cerner les modalités.
Il faut aussi considérer l’organisation du Monde diplomatique. Dès sa nomination comme rédacteur en chef, Claude Julien innove : il cherche à rompre avec la hiérarchie du Monde et, particulièrement, avec le poids du service étranger sur le contenu du journal. Pour ce faire, il ouvre le journal à des collaborations externes, car le mensuel ne dispose pas de l’autonomie financière qui lui permettrait d’employer un corps de journalistes attitrés. Il fait donc appel à la contribution d’universitaires (Harvey, 2014, p. 53) qui présentent quatre avantages par rapport aux journalistes : 1. déjà rétribués par les universités et les centres de recherches auxquels ils sont rattachés, ils n’ont pas à être rénumérés11 2. ils disposent d’une autonomie intellectuelle 3. ils écrivent avec un style qui leur est propre 4. ils rivalisent pour asseoir leur notoriété intellectuelle, laquelle repose en partie sur leur activité de recherche et de publication.
Les contributions des collaborateurs universitaires produisent un ensemble d’effets. Comparées avec les articles d’un quotidien, elles ne cherchent pas à informer les lecteurs d’un événement immédiat ni même à le commenter, mais, au contraire, à partir d’analyses, à proposer des explications ou à poser des jugements destinés à s’imposer par leur pertinence. D’ailleurs, la renommée intellectuelle repose en partie sur une production dont la pertinence résiste au temps, y compris pour le mensuel même si sa visée est plus modeste. Mais cette pertinence est essentielle à son succès : elle doit pouvoir l’être tout au long du mois qui suit sa parution et même au-delà. Pour ce faire, le journal doit offrir un contenu qui puisse satisfaire la demande d’information au cours de cette même période, quel que soit le moment où elle se manifeste. De plus, les contributions universitaires doivent trouver un équilibre entre, d’une part, la mise à distance et l’abstraction qui caractérisent la recherche universitaire, et, d’autre part, la recension et le commentaire de l’immédiat, propres au journalisme quotidien, l’objectif étant de rester en prise avec l’actualité.
De plus, la réflexion universitaire mobilise un bagage culturel important tout autant qu’elle y contribue. Le lecteur doit lui aussi maîtriser ce bagage culturel ou, à tout le moins, être prêt à faire un effort afin de pouvoir apprécier la qualité des contributions. Toutefois, bien que Claude Julien ouvre le Monde diplomatique aux contributeurs universitaires, il n’en fait pas pour autant une publication spécialisée. La rédaction sélectionne, renvoie les ébauches pour corrections, met en forme aux normes d’un journal, voire réécrit les contributions universitaires. Ce processus peut durer des semaines, même plusieurs mois. Dans le cas de contributions étrangères qu’il faut traduire, le délai entre la première soumission et la publication peut atteindre un an dans certains cas (Harvey, 2014, p. 77). Toutefois, le recours aux contributeurs universitaires contribue à viser un lectorat plus éduqué et plus cultivé que celui des quotidiens. Ce choix transforme le supplément mensuel en un produit distinct du quotidien Le Monde il en fait en un journal d’information critique, ou plus précisément un journal d’analyse engagé.
De plus, en ouvrant le mensuel aux universitaires comme autant de collaborateurs ponctuels qu’il invite à soumettre des articles ou en leur passant directement des commandes, il va développer avec le temps un ensemble de réseaux sans cesse renouvelés qu’il peut activer au gré des circonstances, s’assurant ainsi une autonomie et une flexibilité alors inconnues dans la presse tant dans le choix des collaborateurs que des thèmes abordés.
Au cours des dix-huit années étudiées, Le Monde diplomatique a fait appel à 81 auteurs et coauteurs, pour rédiger 216 articles (12 articles ne sont pas signés). Quatre collaborateurs12 principaux ont écrit 40 % des articles portant sur la Chine. Ils forment à ce titre le premier cercle des collaborateurs sur ce pays. Leurs contributions comprennent 139 analyses, 29 recensions et 35 présentations d’ouvrages.
Charaudeau a proposé une typologie des genres médiatiques. Tout d’abord, il rappelle que tout texte « s’inscrit dans une situation de communication laquelle est déterminée entre autres choses par la visée d’une finalité qui détermine le type d’influence que l’instance d’énonciation veut avoir sur l’instance de réception ». Ce qui importe pour lui est le « lieu de pertinence » de cette visée, soit son « origine ». Il en fait même le principe d’une « typologisation des genres ». De plus, il définit les composantes du texte médiatique dont trois sont pertinentes pour la recherche : 1. le « type des modes discursifs », car l’analyse relève de « l’évènement commenté » et que le commentaire engage « le point de vue de l’analyste » 2. « le type d’instance énonciatrice », car Le Monde diplomatique, hormis Claude Julien, seul journaliste attitré, ne faisait appel qu’à des collaborateurs externes, essentiellement des universitaires (bien que certains d’entre eux seront titularisés à partir des années 1980) et 3. « le type de contenu » puisque la « nature du thème » est ce sur quoi « porte [...] le discours faisant l’objet de la nouvelle ». Aussi, la typologie retenue pour la recherche – à l’exception d’un seul « courrier du lecteur » qui se rapporte à la Chine – s’inscrit dans la logique de la catégorisation de Charaudeau. Cette catégorisation décline des modalités du « commentaire-analyse », produit par des « experts journalistes », selon les termes mêmes de Charaudeau, car comme dans tout évènement commenté ceux-ci « engagent leur point de vue d’analyste » (Charaudeau, 1997, p. 129-143, passim). C’est d’ailleurs cet engagement qui à la fois caractérise les articles du Monde diplomatique, et bien évidemment soulève des critiques comme nous l’avons déjà souligné.
Nous avons retenu les commentaires-analyses13, car les auteurs portent un jugement sur la situation chinoise. C’est donc par l’examen de leurs propos que vont se révéler la continuité ou la rupture des représentations véhiculées par Le Monde diplomatique sur l’évolution de la situation en Chine.
Médiatisation et médiation du Monde diplomatique
La médiatisation, pour la distinguer de la médiation, peut être définie comme l’opération de mise en forme des informations opérée par un journal, et la médiation, la relation qu’il institue avec ses lecteurs. L’opérativité du journal se situe au point d’articulation de la médiatisation, de la médiation et de la réception. Précisons que pour Charaudeau, « le processus de transaction [...] commande le processus de transformation et non l’inverse14. » Dit autrement, l’image que l’emetteur se fait du récepteur commande la mobilisation des catégories pour décrire le monde qui structurent le message. En conséquence, il ajoute : « [l]e sujet informateur, pris dans les filets du processus de transaction, ne peut construire son information qu’en fonction des données spécifiques de la situation d’échange » (Charaudeau, 2011, p. 31). C’est ce dont rend compte la notion de « contrat de communication » (Charaudeau, 2011, p. 52-103), qui reprend la notion « [d’]horizons d’attentes », mais en mettant l’accent sur la réciprocité des « attentes ». Charaudeau met l’accent sur « l’acte de transaction » en fonction du « type de cible » visée. Tout dépendra de la « coïncidence ou non-coïncidence de celle-ci avec le type de récepteur qui interprétera l’information donnée selon les paramètres qui lui sont propres et n’ont pas été nécessairement postulés par l’informateur » (Charaudeau, 2011, p. 21).
Malgré cette imprévisibilité, inhérente à toute relation de communication, l’auteur d’un article dans Le Monde diplomatique est lié au lecteur potentiel, tout comme le lecteur mobilise des attentes fondées sur son expérience passée du journal. Précisons, en le soulignant à nouveau, que l’article publié dans Le Monde dipomatique est le résultat d’ajustements progressifs pour faire d’un texte soumis un article journalistique. Effectués par une série de reformulations (en tout ou en partie), ils illustrent le modus operandi du processus de transaction du Monde diplomatique pour rencontrer les exigences de son lectorat, afin de se donner l’assurance du succès de la médiation anticipée. Ainsi, médiatisation et médiation sont-elles étroitement articulées l’une à l’autre dans chacune des décisions prises lors de la préparation de l’édition du mois suivant.
L’article définitif s’élabore en trois temps. Le premier est celui de la transposition d’un évènement en discours journalistique. Mises en circulation, ces informations servent généralement de matériaux de base pour la rédaction des articles du Monde diplomatique qui prennent appui sur l’actualité. La seconde étape consiste à rédiger le premier jet de l’article à paraître. S’ensuit un nombre indéfini de modifications, ajustements et mises au point effectués au cours de plusieurs allers-retours entre la rédaction du Monde diplomatique et le collaborateur (Harvey, 2014, p. 290)15.
Il convient en outre de tenir compte de l’environnement, traité plus haut, qui caractérise un certain état d’esprit du moment, et qui imprègne l’espace social, culturel, économique et politique dans lequel évoluent les acteurs sociaux. Autant les rédacteurs, les contributeurs que les lecteurs avec leur savoir et leurs opinions interagissent dans cet environnement. On peut donc considérer qu’ils y évoluent en fonction de certaines convictions et représentations qu’ils partagent ou par rapport auxquelles ils se distinguent les uns des autres.
Le traitement journalistique du Monde diplomatique
Viser un lecteur informé mais non spécialisé
Un article du Monde diplomatique se distingue de celui produit par un quotidien. Il n’est pas surdéterminé par « l’univers de l’actualité » ni soumis à un « rythme journalier de production » (Verón, 1981, p. 39 49), ce qui n’implique pas pour autant qu’il se désintéresse de l’actualité. Il tient un discours « second » sur la conjoncture évènementielle : il « parle de ce dont il a été déjà parlé » pour transposer dans la pratique journalistique du Monde diplomatique ce que Eliseo Verón a constaté à propos des hebdomadaires. Pour lui, la production et la diffusion de l’information se distribuent sur un plan temporel, ce qui lui permet de distinguer le « discours de l’information », à proprement parler, ancré dans l’actualité, « et quelque chose qui n’est plus du discours sur l’actualité », mais qui s’y réfère, la commente ou l’analyse. Il précise : « L’actualité meurt à peu près là où les hebdomadaires produisent leur discours ». Viennent ensuite les « "bilans"16 comme ceux du Monde diplomatique » (Verón, 1981, p. 155-156).
Le Monde diplomatique traite à la fois de « ce dont il a été parlé » et de ce dont il avait été parlé. D’une part, il se veut en prise sur la conjoncture actuelle : il entend éclairer ses lecteurs sur les tenants et les aboutissants d’évènements qui ne retiennent peut-être plus l’attention des quotidiens, mais qui s’inscrivent néanmoins dans les préoccupations du moment présent. D’autre part, ce travail de distanciation repose sur une mise en contexte qui fait appel fréquemment à des événements passés, mais encore récents, donc susceptibles d’être connus du lecteur sans devoir les rappeler en détail. Il lui arrive à l’occasion de faire carrément appel à des évènements passés pour interpréter le présent17.
Comme le souligne de Cheveigné à propos de la télévision, le lecteur du Monde diplomatique, face à sa copie de l’article, pas plus que téléspectateur « ne reçoit [...] d’autres informations sur les conditions de production ou de réception que celles qui sont données dans le texte » (2000, p. 25). Or, si le Monde diplomatique compte bien sur l’information et les connaissances préalables du lecteur, comme autant de conditions nécessaires à une économie du propos, ces conditions ne sont pas suffisantes, car si le journal s’adresse certes à un lectorat informé, au fait de l’actualité – et intéressé par la question chinoise dans le cas qui nous préoccupe – il ne vise pas un public de spécialistes. Dans cet esprit, on peut souligner que le Monde diplomatique va constamment chercher à réaliser une double économie : d’une part, celle d’un recours au discours didactique, qui risquerait de contrecarrer les représentations de public cultivé que projette son lectorat. D’autre part, il évite le discours de spécialité, car il renverrait nombre de lecteurs à leur niveau de compétence objective du sujet traité. Or, comme l’a montré Eliseo Verón pour les médias, il s’agit de maintenir une relation de complicité avec le lectorat (Verón, 1984, p. 33-56). On comprend pourquoi le journal adopte des stratégies pour contextualiser l’information sans briser la « promesse » (Verón, 1984, p. 33-56 Jost, 2012, p. 23-35) de s’adresser à un lecteur intéressé, informé, mais non spécialisé.
La complicité implicite du lecteur
À la suite d’une analyse des titres du journal Le Monde, Mouillaud, conclut que « la structure [...] que l’on découvre [...] est la forme "développée"18 et "complète"19 qui est réalisée dans d’autres journaux sous des formes qui sont plus ou moins complètes, mais qui ne sont pas étrangères à ce modèle » (Mouillaud, 1982, p. 74). Dans l’ensemble, les titres du Monde diplomatique suivent le modèle de la double articulation des énoncés. Le surtitre énonce donc une situation – toujours supposée connue du lecteur potentiel –, alors que le titre embraye sur les conséquences potentielles de l’évolution de cette situation, mais sans livrer d’indices sur l’issue éventuelle. Ainsi, le système titre laisse ouverte la possibilité d’une amélioration future ou au contraire d’une dégradation. Autrement dit, l’information potentielle de l’article devient attractive pour le lecteur dans la mesure où le titre embraye sur une tension narrative. Cette mise en abîme de l’information met en œuvre une stratégie de communication reposant la fois sur la publicité et le récit.
Au lieu d’opter pour l’assertion, une modalité de titrage commune aux quotidiens, Le Monde diplomatique maintient jusque dans ses titres la distance universitaire qui fonde son inscription différentielle dans le champ journalistique. De plus, ils ne présentent pas de marques de modalité de jugement : ils parlent simplement du monde. En d’autres mots, le système titre, contrairement aux préceptes du titrage journalistique, et à ceux de la pratique des quotidiens et des hebdomadaires, ne livre pas l’essentiel du contenu de l’information, c’est-à-dire, dans le cas du Monde diplomatique l’argument avancé par l’auteur, laissant en quelque sorte le lecteur en suspens.
Parce que l’empan informationnel du Monde diplomatique s’étend sur au moins 30 jours, il cherche à produire des titres qui restent attractifs pour une durée indéterminée en dissimulant l’aspect temporel des évènements au lecteur de manière à rester actuel. Cette stratégie garantit l’actualité de l’information même pour les numéros des mois passés. Le Monde diplomatique instaure ainsi un rapport à l’information qui n’est pas celui des quotidiens : il ne se soucie pas de « l’attente de l’événement » (Tétu, 1982, p. 398) et cela se reflète dans la formulation des énoncés des titres.
De plus, dans une logique de rationalisation de l’effort, le chapeau vise à optimiser un gain d’information couplé à un gain de temps. Il est donc régi par un principe d’économie. Le Monde diplomatique respecte ce modèle : l’ambiguïté de certains titres est partiellement levée par le chapeau, les causes et les facteurs susceptibles de caractériser la situation y étant avancées. Mais surtout, dans Le Monde diplomatique, il fournit généralement au lecteur la clé de l’argument développé par la suite de même que l’angle d’approche privilégié par le journal, le gratifiant ainsi, quel que soit son niveau de familiarité préalable avec le sujet, d’un schème d’interprétation de l’information subséquente, le plus souvent fondé sur une opposition simple.
La personnification de l’information
Les collaborateurs n’hésitent pas à égrener des noms de personnalités dans chaque article. Ainsi, pas moins de 167 personnalités différentes sont nommées dans le corpus analysé, soit en moyenne quatre nouvelles figures par article. On compte en moyenne 22 occurrences de mention de personnes par article. Toutefois, ce premier constat appelle quelques nuances. La très grande majorité des personnalités mentionnées sont inconnues du public, et elles le resteront, car leur mention n’apparaît qu’une fois dans l’article et il n’y sera jamais fait référence à nouveau dans les analyses subséquentes.
Autrement dit, on peut envisager que ces surgissements de noms ne sont là, d’une part, que pour attester de la maîtrise du sujet et de la véracité du propos. Pour le lecteur, dont on peut présumer, sauf exception, qu’il n’a qu’une connaissance limitée de ce qui se passe en Chine et qu’il n’a pas accès aux documents sources, ces noms isolés qui ancrent concrètement le propos par leur précision apparente contribuent à l’effet de réel. D’autre part, l’apparition de ces noms dans le texte, parce qu’ils marquent le lieu, évoque la sinité. Ils contribuent donc à la vraisemblance du propos sans pour autant donner de nouvelles informations au lecteur. Ainsi, ces marqueurs souscrivent-ils aux conventions du champ journalistique dont les conventions, pour l’intelligibilité du propos destiné au lecteur, requièrent que les acteurs, leurs gestes ou les conséquences de ces gestes, le lieu, les circonstances et le motif soit précisés, ne serait-ce que pour contextualiser et rendre concret le propos.
Par contre, quelques figures emblématiques reviennent systématiquement d’un article à l’autre et d’un auteur à l’autre, quels que soient les modèles explicatifs mobilisés par chacun d’eux pour interpréter l’évolution de la conjoncture chinoise. Au-delà des différences de perspective proposées par les collaborateurs, tous sans exception organisent leur propos autour de deux figures principales : Deng Xiaoping (174 occurrences) et Mao Zedong (163 occurrences). Autour d’elles gravitent des figures secondaires : Hua Guofeng (62 occurrences), Lin Biao (40 occurrences), Zhou Enlai (39 occurrences), Zhao Ziyang (35 occurrences) et ainsi de suite en ordre décroissant. Bien sûr, on observe quelques différences entre les collaborateurs, et l’importance de ces figures évolue au cours de la période étudiée, de nouveaux noms arrivant sur le devant la scène alors que d’autres disparaissent. Autrement dit, les analyses dans Le Monde diplomatique se construisent essentiellement autour des faits et gestes de quelques figures politiques en Chine et, à un degré moindre, autour de personnes touchées de près ou de loin par l’évolution de la conjoncture politique.
En ce sens, Le Monde diplomatique ne se distingue pas des autres journaux qui rapportent surtout ce que font et ce que disent les hommes politiques, personnifiant ainsi les enjeux, les situations et les circonstances au détriment de toute autre perspective d’analyse. Ce sont donc les figures au cœur de l’actualité de la vie politique qui dominent dans le discours du journal. Cette réduction de la complexité des situations politiques à quelques figures symboliques remplit deux grandes fonctions. La première répond à un principe de double économie. Une économie de l’information d’abord, puisque le collaborateur au Monde diplomatique n’a pas à reconstruire l’arrière-plan, présupposé connu du lecteur. Il le tient pour acquis, se contentant d’apporter les éléments de contexte supplémentaire nécessaires à la cohérence et à l’intelligibilité du propos. Puis, une économie intellectuelle pour le lecteur, puisqu’il n’a pas à reconstruire les tenants et les aboutissants d’une situation donnée avant d’en arriver à l’interprétation proposée par le collaborateur, ses représentations préalables des protagonistes lui fournissant un cadre d’interprétation prêt à être réactivé.
La seconde fonction découle de la première dans la mesure où la familiarisation progressive du lecteur avec ces figures symboliques, ne serait-ce que par son exposition aux médias, leur confère des attributs. Moscovici et Hewstone ont appelé « ontisation » ce processus consistant à « faire correspondre aux idées et aux mots des choses, des qualités, des forces ». À terme, ces figures se voient « conférer une épaisseur de réalité » (Moscovici et Hewstone, 1984, p. 555), c’est-à-dire quelque chose qui devient saisissable. Ce dispositif est en quelque sorte la condition nécessaire à la « mise en intrigue » (Lochard et Boyer, 1998, p. 32) des faits rapportés. Ainsi, dans les quotidiens, un évènement peut faire la manchette pendant quelques jours, chaque élément nouveau – ou redondant – s’inscrivant dans une suite dont le tout forme un récit unique mettant en scène des sujets. De cette façon, information quotidienne et rythme de l’intrigue vont progresser de concert, durant quelque temps, en jouant sur l’alternance des rôles dévolus aux sujets et cela jusqu’à ce qu’une autre séquence narrative-évènementielle vienne la remplacer. Le Monde diplomatique, par contre, joue sur la rémanence de ces figures pour ancrer le commentaire.
Les discours des quatre principaux collaborateurs du Monde diplomatique
Pour le rappeler quatre collaborateurs principaux, sur près d’une centaine au cours de la période étudiée, ont écrit 40 % des articles portant sur la Chine : Jean Daubier, Xavier Luccioni, Jacques Decornoy et Roland Lew. À toutes fins pratiques, ce sont eux qui sont les porte-paroles de la ligne éditoriale du mensuel sur la Chine20.
L’espace qui nous est imparti ne permettant pas de présenter une analyse détaillée de l’ensemble des articles étudiés, nous préciserons simplement qu’elle a consisté en une étude systématique des représentations, conduite dans l’esprit des travaux de l’école de Moscovici (Schiele, 2017). Mentionnons toutefois que, comme dans toute analyse des représentations, il s’est agi de repérer les régimes d’oppositions pour en arriver à dégager le système central qui assure la stabilité du cadre interprétatif mobilisé, et, par-là, la constance d’un même discours d’un article à l’autre, donc du maintien d’une même posture intellectuelle, au-delà des variations du système périphérique (Abric, 1994), rendues nécessaires pour préserver la cohérence de la représentation du collaborateur confronté au surgissement de situations nouvelles en Chine. Nous synthétisons ci-après les représentations véhiculées par les quatre principaux collaborateurs, en insistant sur le fait que chacun d’eux reproduit tout au long de sa période d’activité, le même cadre interprétatif quelle que soit l’évolution de la conjoncture en Chine, y compris lorsqu’il est confronté à des situations qui le remettent en question.
Jean Daubier (27 articles), qui donne le ton à la première phase (1975-1978) est un promaoïste qui a pris part à la Révolution culturelle en Chine et qui ne conçoit l’action politique qu’à travers le prisme de l’opposition entre esprit et matière : l’esprit, comme l’énonçait Mao Zedong, devant l’emporter sur la matière. Il voit donc en Mao Zedong l’aboutissement de ce primat de l’esprit (Daubier, 1971). Dans ses analyses, Jean Daubier promeut la politique chinoise tant et aussi longtemps que le maoïsme et les maoïstes dominent en Chine. Il va donc pourfendre l’évolution de la politique chinoise dès que Deng Xiaoping, en qui il voit la figure antagoniste de Mao Zedong, prend de l’ascendant. C’est pourquoi il conçoit son opposition à Deng Xiaoping comme la poursuite d’une lutte sans cesse recommencée contre les réactionnaires et les révisionnistes, une lutte qui serait l’essence même de la Révolution culturelle et du maoïsme. De 1979 à 1981, il reste convaincu que les maoïstes l’emporteront à terme, même lorsque Deng Xiaoping s’impose définitivement. Il conclut, contre l’évidence même, qu’une nouvelle révolution culturelle est inévitable, même si la Chine a tourné la page du maoïsme et adopté un nouveau modèle.
Xavier Luccioni (31 articles) est le porte-parole de la seconde phase (1981-1986). C’est un socialiste qui a séjourné en Chine, après Mai 68. Architecte et professeur à Paris 8, il n’est pas un spécialiste de la Chine. Il voit dans la Révolution culturelle et le maoïsme des erreurs politiques majeures et juge que Mao Zedong « s’est trompé » (Luccioni, 1978). Par contre, il estime que le pragmatisme de Deng Xiaoping contribue au renouveau du socialisme. Il dénonce donc les ex-maoïstes qui renient la Chine communiste de Deng Xiaoping. Xavier Luccioni retournant le schème d’analyse de Jean Daubier, soutient à l’instar de Deng Xiaoping que l’esprit doit s’effacer devant la matière. Il soutient et promeut la politique chinoise au cours de ces années. Ultimement, il voit dans le socialisme, qu’il finit par assimiler au conservatisme, une entrave à la démocratie. Par contraste, Hong Kong, l’enclave capitaliste en Chine, préfigure une démocratie en acte en Chine socialiste. Même confronté aux vagues de répression violente et récurrentes à l’égard de toute opposition, il reste convaincu que Deng Xiaoping est attaché à la libéralisation économique et politique en Chine.
Par comparaison, la troisième phase (1987-1992) donne la parole à deux personnalités. Jacques Decornoy (21 articles) est un journaliste de métier et Roland Lew (10 articles) un sinologue, professeur à l’Université Libre de Bruxelles. Tous deux prônent un engagement socialiste antiautoritaire et défendent les Droits de l’Homme. À la différence de Jean Daubier et de Xavier Luccioni, ils se centrent sur la complexité et le dynamisme de la société chinoise, sur les effets pervers des réformes, ainsi que la répression officielle et les problèmes structuraux du pouvoir communiste. Ils opposent une société intrinsèquement dynamique à un pouvoir qu’ils jugent ossifié. Plus significativement, à leurs yeux, les différents secteurs de la société parviennent à mettre en échec les initiatives du Parti qui cherchent à renforcer leur sujétion. C’est pourquoi ils sont convaincus que la vague de démocratisation qui emporte les régimes autoritaires de toute allégeance au tournant des années 1990 n’épargnera pas le Parti communiste chinois. Cependant, même témoins de la répression du Printemps de Beijing en 1989 et de la consolidation subséquente du pouvoir, ils restent convaincus que le Parti est dépassé par le dynamisme de la société, bien que la répression de la vague de démocratisation ait renforcé le pouvoir du Parti.
L’effet de prégnance médiatique
C’est au cours de ces phases stables (1975-1978, 1981-1986, 1987-1992) que se manifeste ce que nous avons appelé l’effet de prégnance médiatique, c’est-à-dire la reproduction d’une même posture d’un article à l’autre quant à une classe d’évènements donnés, réels ou potentiels. À ce sujet, rappelons l’analyse de la couverture médiatique de l’accident de Three Mile Island entreprise par Verón qui concluait que les médias présentaient trois grandes caractéristiques : 1. une dépendance à l’égard des agences de presse 2. un surajout de l’interprétation au contenu brut de la dépêche et 3. une absence de correction des erreurs d’information ou d’interprétation dans l’immédiat (Verón, 1981, p. 13). Autrement dit, et c’est ce troisième élément qui est significatif pour nous, dès la réception des premières dépêches à propos d’un sujet de nouvelle, les médias adoptent des schèmes d’interprétation, différent pour chacun – il faut le préciser – qui tendent, inconsciemment, plus à construire l’évènement qu’à le rapporter. Bien que Le Monde diplomatique ne s’alimente pas au fil de presse proposé par les agences, comme la recherche l’a montré, il adopte lui aussi des schèmes d’interprétation, par collaborateurs principaux interposés, pour les différentes classes d’évènements qu’il couvre21.
Construisant sur les résultats de Verón, de Cheveigné en s’intéressant à la couverture des évènements liés à l’environnement, a montré que, quel que soit l’évènement singulier, les mêmes stratégies discursives et un même schème d’interprétation sont mobilisés du moment que cet évènement se rattache à une même classe d’évènements (de Cheveigné, 2000, p. 10). En d’autres termes, pour de Cheveigné, la classe, puisqu’elle abstrait des propriétés communes d’évènements potentiels, préexiste à l’évènement singulier comme fait empirique et ainsi surdétermine son interprétation. Plus précisément, c’est la mise en forme du discours se rapportant à une même classe d’évènements qui est porteur de sens plus que l’évènement lui-même.
Sur un autre plan, mais complémentaire, Moscovici a montré que l’acte même de communiquer contribue à la formation et au renforcement des représentations sociales, tout comme leur mise en circulation repose sur leur mobilisation dans des situations de communication. Il nous faut préciser que par représentations, il entend « une organisation psychologique, une forme de connaissance particulière à notre société, et irréductible à aucune autre ». Elles référent ainsi à un « univers d’opinions », et par la même constituent un « acte de pensée par lequel un sujet se rapporte à un objet » (Moscovici, 2004, p. 66). Elles constituent le système explicatif et opératoire qui structure l’expérience personnelle.
C’est pourquoi les médias contribuent à la propagation des représentations, du seul fait qu’ils les activent dans et par les prises de position qu’ils adoptent. De plus, ils tendent à les renforcer en satisfaisant les attentes de leur public, anticipant ainsi le développement du concept de « contrat de lecture ». Toutefois ce processus, parce que la couverture médiatique ne retient comme évènement que ce qui est singulier, entraîne un ajustement des représentations, sans affecter leur noyau (Moscovici 2004, p. 326-327).
Autrement dit, tant et aussi longtemps que des dispositifs médiatiques sont en phase avec le noyau représentationnel de l’univers d’opinion d’un groupe social – ou mieux d’un ensemble de groupes sociaux pour tenir compte de la variabilité des éléments périphériques – la couverture d’une même classe d’évènements par un média donné réactivera vraisemblablement les mêmes schèmes interprétatifs. Et c’est ce que montre l’analyse des discours des quatre porte-paroles durant les trois phases étudiées, lesquelles correspondent moins à une évolution de la situation en Chine qu’à une transformation de l’opinion publique à l’égard de la Chine : facteur important, puisque comme l’on montré les travaux sur les médias, le succès d’un média donné repose sur le maintien d’une « connivence » avec son public (Lochard et Boyer, 1998, p. 25). Le Monde diplomatique, pas plus qu’aucun autre journal, ne peut se dispenser de cette « connivence ».
Les moments de rupture de cadres d’interprétation se caractérisent par le remplacement des principaux collaborateurs. Et c’est par leur remplacement, grâce à la souplesse de sa structure organisationnelle, que Le Monde diplomatique assure ainsi sa transition d’un cadre d’interprétation à un autre. Ainsi, dans l’esprit de Lochard et Boyer, il faut considérer, in fine, que le journal s’ajuste bien à l’évolution de son lectorat.
L’analyse des trois discours-types tenus sur la Chine a montré que l’effet de prégnance médiatique se manifeste puisque chaque collaborateur adopte dès le début un schème interprétatif, et s’y tient tout au long de sa phase d’activité, quelle que soit l’évolution de la situation en Chine. Ce schème n’est ajusté que marginalement face aux évènements et aux faits qui démentent l’interprétation avancée par les collaborateurs. Tout au long de la phase d’activité de chaque contributeur principal, nous observons donc un équilibre médiatique parce qu’un seul et même discours est reproduit, quelle que soit l’évolution de la conjoncture sociale et politique en Chine.
Ce qui nous a conduit à envisager que la posture évoluait lorsque la transformation de la conjoncture en Chine coïncidait avec une modification des attentes du lectorat, et que c’était l’effet combiné de ces deux classes de facteurs qui incitait le journal à ajuster sa posture. En Chine comme en France, le reflux du maoïsme s’est accompagné d’une recomposition du consensus social autour d’une pensée économique (Boltansky et Chiapello, 1999 Harvey, 2007). Ainsi, tout en restant fidèle à son approche critique, Le Monde diplomatique a donc été à même de s’adapter au changement de conjoncture.
De ce fait, la posture éditoriale reste en tension dynamique avec son lectorat. Tant que le consensus se maintient, le mensuel la reconduit lorsque le consensus se recompose, il s’adapte. C’est pourquoi la transition étalée sur deux ans entre Jean Daubier et Xavier Luccioni témoigne d’une première recomposition du consensus, le lectorat abandonnant progressivement une utopie de transformation radicale pour une vision plus économiste du devenir de la société. Toutefois l’intérêt réside ici dans la durée de cette transition. Elle témoigne d’une hésitation du mensuel : ne sachant comment se positionner, il laisse deux discours opposés s’exprimer durant près de deux ans. Par contre, la transition de Xavier Luccioni à Jacques Decornoy et Roland Lew, réalisée en moins d’un an, signale le basculement rapide du système d’attentes du lectorat, désormais centré sur les valeurs de l’individu (Taylor, 1991).
Conclusion
Donc, trois moments, trois discours et trois systèmes de représentation qui reposent somme toute sur des régimes d’oppositions simples, axées autour de quelques acteurs clés. Et comme dans tout système de représentation, lorsque les circonstances en menacent la cohérence, notamment les facteurs de l’évolution de la conjoncture en Chine qui risquent de compromettre la stabilité du noyau, des ajustements se produisent à la périphérie pour protéger la cohérence du noyau central de la représentation.
Cette persistance représentationnelle permet bien évidemment de rappeler au lecteur que le journal reconduit le contrat de lecture, la réitération des schèmes mobilisés rendant ce système explicite. Par ailleurs, tout au long d’un moment d’équilibre médiatique ponctué, sélectionnés et interprétés par les filtres du cadre interprétatif, les évènements qui rythment la couverture de la Chine reproduisent bien évidemment pour le lecteur ce système de représentations, lequel en retour lui permet d’élaborer au fil des articles une image de la Chine, d’autant plus familière et naturalisée qu’elle lui est renvoyée d’un article à l’autre, le confortant ainsi dans sa compréhension de la réalité chinoise.
Alexandre Schiele est membre de l'Observatoire de l’Asie de l’Est,
Université du Québec à Montréal.
Notes
1Le corpus est constitué de tous les articles publiés dans Le Monde diplomatique entre 1975 et 1992 qui directement ou indirectement traitent de la Chine. Ils ont été sélectionnés à partir de la version de 2013 du CD-ROM produit par Le Monde diplomatique qui contient toutes les archives numérisées des articles publiés entre 1954 et 2012.
2Jusqu’en 1973, le mensuel, un supplément du Monde, faisait à toutes fins utiles office de carnet mondain de la vie diplomatique à Paris.
3Si Mai 68 s’inscrit dans un contexte de contestation globale (Hobsbawm, 2003, p. 320-343), nous ne retenons que son impact en France.
4Pour le rappeler, de Gaulle préconisait une politique d’indépendance vis-à-vis des deux grands blocs (Duroselle et Kaspi, 2012, p. 279-299).
51) France (8,8 %), 2) URSS (4,4 %), 3) États-Unis (2,8 %), et 4) Chine (1,9 %). Ce pourcentage peut paraître insignifiant, mais que représente alors la couverture accordée aux deux superpuissances ?
6L’augmentation progressive du nombre d’articles entraîne par ricochet une diminution relative de la présence de la Chine dans les pages du journal. Ainsi, proportionnellement, la Chine est plus représentée entre 1975 et 1980 qu’elle ne le sera entre 1987 et 1991, même si le nombre d’articles est approximativement le double de ce qu’il était entre 1981 et 1986.
7Nous distinguons posture éditoriale de ligne éditoriale. Par posture éditoriale, nous désignons un ensemble d’attitudes manifestes exprimées par la direction du journal, mais diffuses parce qu’elles caractérisent une orientation sans toutefois s’appliquer à des classes définies d’évènements. Par contre, une ligne éditoriale désigne un cadre d’interprétation qui commande le traitement de classes définies d’évènements.
8Rappelons que depuis le tournant des années 1990, le projet communiste a pratiquement disparu et qu’aucune économie avancée ne repose sur ses bases y compris la Chine. C’est pourquoi Bergère (2013) qualifie de capitalisme d’État le système économique chinois.
9À titre d’exemple, Eugénie Bastié, dans les pages du Figaro, fait du Monde diplomatique le maître à penser du mouvement Nuit Debout au printemps 2016 en France (Bastié, 28 avril 2006).
10Le Gledic, M., 1981, L’Amérique latine vue à travers le Monde diplomatique 1970-1980, (thèse de doctorat), Paris 10 Milczach, S., 2000, Les regards de la presse écrite française sur le conflit jordano-palestinien de 1970-1971, une étude du Monde, le Figaro, la Croix, l’Humanité, le Progrès de Lyon, Témoignage chrétien, Paris-Match, l’Express et Le Monde diplomatique, (thèse de doctorat), Lyon 2 Szczepanski-Huillery, M., 2009, Du diplomate au citoyen. Études sur la politisation du Monde diplomatique et de ses lecteurs (1954-2008), (thèse de doctorat) Harvey, N., 2011, Le Monde Diplomatique : Un concept éditorial au confluent du journalisme, de l’université et du militantisme, (thèse de doctorat), Rennes 1 Holzinger, F., 2013, « Le Monde diplomatique » d’Ignacio Ramonet de 1991 à 2008 : analyse de la géopolitique des représentations, (thèse de doctorat), Paris 8 Abi Karam, N., 1984, Le conflit libanais d’après les articles du Monde diplomatique (1973-1983) (mémoire de DEA), Paris 2. Compaore, M., 1994, Le Monde diplomatique et les conflits en Afrique de 1989 à 1994 (mémoire de DEA), Paris 2 Ndiaye, C. T., 1994, L’Afrique noire dans les relations internationales, la vision du Monde diplomatique, (mémoire de DEA), Paris 2 Ghiles-Meilhac, S., 2005, Le Monde diplomatique et Israël 1954-2004 : Histoire moderne de l’État juif à travers un journal français de référence, (mémoire d’IEP), IEP de Grenoble Guilhem, J., 1974, Les relations franco-polonaises après la chute de Gomulka à travers la presse française : Le Monde, le Monde diplomatique, l’Humanité, le Figaro, (mémoire de DESS), Paris 1.
11Ce qui n’exclut pas une compensation symbolique.
12Puisque les articles sont systématiquement réécrits par le journal le terme « collaborateur » nous apparaît plus juste que celui d’« auteur ».
13Sur les 228 articles, 139 sont des analyses (en fait des « commentaires-analyses » selon la catégorisation de P. Charaudeau), car ils proposent une explication argumentée.
14Le processus de transaction, pour le définir brièvement, désigne la réalisation d’un message conçu en vue de produire un effet anticipé en fonction d’une certaine image que se fait l’émetteur du récepteur potentiel, alors que le processus de transformation consiste à structurer le monde à partir de « catégories […] exprimées par des formes » (Charaudeau 2011, p. 30-31, passim).
15Ce processus de réécriture a pour objectif, comme nous l’avons aussi déjà précisé, d’adapter l’article aux pratiques d’écriture du champ journalistique et de s’assurer, autant que faire se peut, de rencontrer les attentes des lecteurs. De temps en temps, l’orientation générale de l’article est infléchie en fonction de la posture éditoriale du journal. Harvey mentionne que ces « prises de position » entraînent à l’occasion des « conflits d’ordre éditorial ». Mais c’est surtout au cours du « processus de révision et de réécriture des articles que survien[nent] les conflits ». Harvey impute ces conflits aux différences entre les normes et les pratiques du champ journalistique et celles du champ universitaire, les universitaires ayant généralement la possibilité « d’accepter ou non les modifications demandées », ce qui est rarement le cas des journalistes, habitués par ailleurs à voir leurs textes remaniés (Harvey 2014, p. 290-291, passim).
16Mis entre guillemets par l’auteur.
17Moirand qualifie de « moment discursif » la mention d’un évènement en règle générale éphémère, de quelques jours à peine dans le meilleur des cas (Moirand, 2007, p. 4). L’analyse de la couverture du Monde diplomatique qui ramène dans le débat public « ce dont il avait été déjà parlé » élargit cette notion de moment discursif puisqu’elle englobe à la fois l’événement et le métadiscours dont il est l’objet.
18Mis entre guillemets par l’auteur.
19Mis entre guillemets par l’auteur.
20Durant la même période cinq contributeurs ont rédigé de 5 à 8 articles, six autres entre 3 et 4, treize de 1 à 2, et les autres un seul.
21On peut postuler que ce cadrage de la posture du journal est aussi assurée par la sélection des collaborateurs secondaires et par le travail de réécriture des articles.
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Référence de publication (ISO 690) :SCHIELE, Alexandre. Étude du dispositif du Monde diplomatique : la couverture de l’évolution de la conjoncture chinoise entre 1975 et 1992. Les Cahiers du journalisme - Recherches, 2018, vol. 2, n°2, p. R31-R48.
DOI:10.31188/CaJsm.2(2).2018.R031