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Nouvelle série, n°2

2nd semestre 2018

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Promouvoir la diversité des expressions culturelles à l’ère numérique : le rôle de l’État et des médias

Colette Brin, Université Laval
Maxime Mariage, Université Laval
Diane Saint-Pierre, Institut national de la recherche scientifique
Véronique Guèvremont, Université Laval

Résumé

L’essor du numérique pose de nombreux défis aux écosystèmes culturels nationaux ainsi qu’au rayonnement international de leur production culturelle. Les médias, eux-mêmes aux prises avec une crise de financement généralement associée au virage numérique, peuvent être considérés à la fois comme des producteurs de culture et des médiateurs culturels. Ce texte vise à recenser et comparer les interventions d’une demi-douzaine d’États concernant les médias, à l’aune des objectifs de la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles de l’UNESCO de 2005 et, plus particulièrement, des directives opérationnelles adoptées en 2017 pour sa mise en œuvre dans l’environnement numérique. Dans un contexte où de nouvelles formes d’aides publiques sont envisagées pour soutenir la production culturelle nationale, la place des médias dans l’écosystème culturel mérite une attention particulière.

Abstract

The rise of digital technologies raises important challenges for national cultural ecosystems, as well as for the international reach of cultural production. The media, also struggling with a financial crisis generally associated with digital disruption, can be considered both producers of culture and cultural mediators. The goal of this paper is to collect and compare the actions of a half-dozen states regarding media, in light of the objectives of the Convention on the Protection and Promotion of the Diversity of Cultural Expressions, adopted in 2005 by UNESCO, and more specifically, considering the operational guidelines on the implementation of the Convention in the digital environment. In a context where new forms of government aid are under consideration to support national production, the place of media in the cultural ecosystem warrants special attention.

DOI: 10.31188/CaJsm.2(2).2018.R049





L

es défis posés aux médias – et assurément au milieu journalistique – par l’essor du numérique sont aussi, en grande partie, ceux auxquels sont confrontés les milieux de création et, plus généralement, les écosystèmes culturels1 nationaux. D’une part, en s’affranchissant des contraintes spatiales et temporelles, et par extension juridiques et politiques, les technologies numériques permettent à une masse croissante d’expressions culturelles « dématérialisées », tels que les films, les séries télévisées ou les pistes musicales disponibles sur la plateformes numériques, de circuler plus librement et d’être accessibles à un plus large public (Benghozi, 2008 ; Coulangeon, 2010 ; Poole et Le-Phat Ho, 2011 ; OECD, 2012).

D’autre part, dans un environnement numérique désormais mondialisé, un petit groupe d’entreprises composé des géants du numérique, soit le GAFA (Google, Amazon, Facebook et Apple) et Netflix, profite d’une absence d’ancrage territorial pour échapper aux lois, réglementations et politiques nationales, voire aux normes supranationales, ainsi que pour imposer ses propres propres règles du jeu en matière de production et de diffusion culturelles. Offrant des services innovants, ces plateformes sont progressivement devenues incontournables, autant pour les usagers que pour les créateurs, tout en développant des stratégies de commercialisation qui, très souvent, leur permettent d’échapper à toute contrainte fiscale et les exemptent de contribuer aux systèmes nationaux de financement de la production culturelle. Les GAFA concentrent ainsi une part croissante des revenus et de l’expertise technologique, ce qui pourrait s’avérer une menace pour la diversité des expressions culturelles.

Chose certaine, ces transformations incitent les États à repenser leurs politiques et mesures visant à soutenir la création, la production, la diffusion et l’accès aux contenus culturels produits localement, et ce, afin de mieux les adapter aux spécificités de l’environnement numérique. Les États doivent également relever les défis relatifs à la « découvrabilité » de leurs contenus culturels (FMC, 2016), c’est à-dire trouver les moyens pour qu’ils se distinguent, qu’ils sortent du lot pour capter l’attention des usagers sur ces plateformes qui concentrent une part croissante de l’offre culturelle.

Les États ne sont toutefois pas les seuls acteurs à devoir s’adapter à de telles transformations. Les médias sont aussi concernés, puisqu’ils sont à la fois des producteurs de culture et des médiateurs culturels : ils produisent et diffusent des contenus journalistiques sur la culture, mais aussi des séries et films de fiction, des documentaires, des spectacles, des pièces musicales, des textes littéraires, pour ne nommer que ceux-ci. Ce faisant, ils participent à la promotion et à la protection de la diversité des expressions culturelles, y compris dans l’environnement numérique, tout en jouant un rôle clé dans le développement des lien entre créateurs et publics.

Or, il s’agit là d’une dimension peu abordée, autant dans la littérature scientifique vouée aux études sur les médias2 que dans les réflexions actuelles de la crise des médias dits traditionnels, avec notamment pour conséquence ces demandes de soutien accru dans leur mission d’information. C’est notamment le cas dans les contextes québécois et canadien3. Cette omission ou peut-être ce manque d’intérêt s’explique sans doute par une tradition de faible intervention étatique dans les domaines de la presse écrite et du journalisme, particulièrement pour les tenants d’une conception libérale de la liberté de presse, selon laquelle l’intervention de l’État constitue une menace plutôt qu’une protection de cette liberté.

Cet article a pour objectif de présenter les interventions étatiques répertoriées portant spécifiquement sur les médias, en lien avec la diversité des expressions culturelles, dans l’environnement numérique. Il s’inscrit dans un projet plus large réalisé dans le cadre de l’Action concertée « Culture et Numérique » du ministère de la Culture et des communications du Québec (MCCQ) et du Fonds de recherche du Québec - Société et culture (FQR-SC) : « Le rôle de l’État et des médias dans la promotion de la diversité des expressions culturelles à l’ère du numérique : un état des connaissances et des avancées. » Ce projet4 trouve ses fondements dans les objectifs de la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles de l’UNESCO de 2005 (ci-après « la Convention ») et plus particulièrement dans ses Directives opérationnelles sur le numérique adoptées en 2017.

Cela étant dit, et avant de faire état de la méthodologie et des résultats issus de la collecte de données des cas nationaux retenus pour cet article, il convient de présenter brièvement cette Convention et ses directives opérationnelles, en particulier leurs liens avec le milieu des médias et le monde journalistique.

Bref retour sur la Convention et ses Directives opérationnelles

Mis à part les mesures visant à promouvoir la diversité des médias, y compris au moyen du service public de radiodiffusion (art. 6), la Convention de 2005 ne reconnaît pas le rôle spécifique des médias dans les écosystèmes culturels. Quelque 12 années plus tard, signe de changements importants dans l’environnement numérique, les Directives opérationnelles sur la mise en œuvre de la Convention dans l’environnement numérique (UNESCO, 2011) rendent compte de nouveaux défis posés par les changements technologiques à la diversité des expressions culturelles, dont certains concernent directement les médias et les journalistes. Ainsi, outre les disparités quant à l’accès et à l’adoption de ces technologies – que d’aucuns qualifient parfois de « fracture numérique » –, l’article 5 des Directives opérationnelles souligne que « [l’]expansion accélérée des réseaux sociaux et des contenus générés par les utilisateurs, l’explosion des données, la complexification des modèles de distribution et la prolifération des appareils multimédia connectés à la disposition des utilisateurs ont eu un immense impact sur le secteur de la création partout dans le monde » (Ibid. : p. 96).

Plus spécifiquement, ces directives opérationnelles invitent les Parties à revoir « leurs cadres législatifs et réglementaires relatifs aux médias de service public, privés et communautaires ainsi qu’aux organisations de médias indépendants, afin de promouvoir la diversité des expressions culturelles et la diversité des médias dans l’environnement numérique, en prenant en compte la convergence croissante des opérations au sein de la chaîne de valeur » (art. 11, p. 98).

Les médias sont donc doublement concernés par la Convention. D’abord, ils ont un rôle à jouer dans l’atteinte de ses objectifs, et ce, comme producteurs, diffuseurs, promoteurs des expressions culturelles nationales et même de celles en provenance d’autres pays. Puis, comme ils subissent aussi le choc des transformations numériques, ils réclament de plus en plus le soutien de l’État pour accomplir cette mission, de sorte que les États doivent adapter leurs différentes formes de soutien aux médias qui vivent aussi avec la réalité et les impacts du numérique.

Méthodologie

Nous avons retenu pour les fins de cet article cinq États signataires de la Convention dont les politiques culturelles sont relativement comparables ou autrement pertinentes pour le Québec et le Canada : l’Australie, la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni et la Communauté française de Belgique (Fédération Wallonie-Bruxelles)5.

Dans un premier temps, nous avons recensé la littérature scientifique sur les médias et la diversité des expressions culturelles dans l’environnement numérique. Cinq bases de données ont été consultées, dont deux dans le domaine de la communication et du journalisme, et trois plus générales6. Cette stratégie de collecte qui se voulait large de par les intitulés retenus a donné peu de résultats, reflétant sans doute un manque d’intérêt pour un domaine d’activités déjà rarement identifié de manière explicite dans la Convention et plus récemment dans ses directives opérationnelles.

Dans un deuxième temps, nous avons effectué une recherche systématique de documents publiés7 par les institutions responsables de l’élaboration ou de la mise en œuvre des politiques culturelles et d’organismes chargés d’en faire la veille. Nous avons d’abord utilisé le Compendium des politiques culturelles du Conseil de l’Europe (pour les pays européens), afin de bien cibler les institutions concernées – ministères et organismes de régulation principalement –, mais aussi pour obtenir un portrait général de la situation dans les États visés en ce qui a trait aux médias et à la diversité des expressions culturelles. Puis, une recherche sur le site Web de ces institutions nous a permis d’identifier des documents pertinents, notamment des rapports thématiques, des rapports annuels et des énoncés de politique, plans d’action… bref, toutes initiatives, mesures ou tous instruments pouvant être éclairants. Là encore, nous avons constaté le peu d’attention accordée aux médias (traditionnels), notamment lorsqu’il est question de leur rôle de producteurs, diffuseurs et promoteurs de contenus culturels dans l’environnement numérique.

Par ailleurs, dès le départ, il a été décidé de mettre l’accent sur les médias de service public pour la simple raison qu’ils ont très souvent un mandat culturel explicite : fortement financés par les États, ils doivent habituellement diffuser des contenus majoritairement nationaux8. Ce faisant, toute politique visant à favoriser le développement numérique des médias de service public nous semblait pertinente, particulièrement compte tenu de leur rareté. Par contre, nous avons pu observer à travers certaines initiatives de quelle manière les diffuseurs publics eux-mêmes tentaient de promouvoir les expressions culturelles à l’ère numérique. Ici aussi, nous avons consulté une diversité de documents produits par les médias : rapports annuels, plans annuels, documents liés au développement numérique, communiqués, rapports et plans stratégiques produits de diffuseurs de services publics et d’organismes de régulation de l’audiovisuel, etc.

Dans les sections suivantes, nous présentons les particularités pour chacun des États étudiés, pour ensuite dégager certaines tendances et observations générales concernant les rôles culturels des médias à l’ère numérique.

Allemagne

En Allemagne, la radiodiffusion de service public voit le jour en 1950, dans un contexte d’après-guerre9, avec la création d’un consortium de diffuseurs publics de la République fédérale d’Allemagne, l’ARD10. En 1963, s’ajoute la ZDF11 ou « Seconde télévision allemande », créée par le gouvernement fédéral conservateur, soucieux que certaines composantes régionales de l’ARD soient plus proches idéologiquement du SPD, parti progressiste. Ce n’est qu’en 1984 que la radiodiffusion commerciale fait son apparition dans ce pays. La radiodiffusion de service public revêt donc très tôt une importance particulière puisqu’elle est tenue de remplir un mandat éducatif et de garantir des services de base indépendants en matière d’information, d’éducation, de conseil et de divertissement (Compendium, 2016).

L’Allemagne dispose de deux télévisions publiques, l’Allgemeine Rundfunkanstalt Deutschlands (ARD) et la Zweites Deutsches Fernsehen (ZDF), ainsi que d’un réseau de radios publiques, Deutschlandradio (co-exploitée par ZDF et ARD). Ces télévisions publiques se différencient par le fait que la première est un consortium de diffuseurs publics régionaux qui coopèrent dans la production d’une programmation nationale, Das Erste (la « Première »), alors que la deuxième présente une seule programmation nationale. Quant à la Deutsche Welle, dont la responsabilité est partagée par les membres de l’ARD, elle a le mandat de diffuseur international allemand, tant à la télé qu’à la radio. Elle diffuse également ses programmes télévisés en direct sur Internet en quatre langues, soit en anglais, en allemand, en espagnol et en arabe.

De nos jours, la Deutsche Welle est considérée comme l’ambassadrice culturelle la plus importante de l’Allemagne, alors qu’elle produit des programmes télévisuels, radio et Internet diffusés aux quatre coins du monde, en allemand et en 29 autres langues. Elle est financée à hauteur de 285 millions d’euros par an par le gouvernement allemand (Federal Government Commissioner for Culture and the Media, 2014, p. 6). L’Allemagne a d’ailleurs un taux de financement public élevé, soit de 17,50 euros par habitant. Financé à l’origine par une taxe liée à l’utilisation comme en France (la taxe est fondée sur la possession d’un téléviseur), le service public est aujourd’hui soutenu par une redevance payable par tous les Allemands. Outre cette taxe, le gouvernement allemand intervient peu dans le domaine médiatique par le moyen de politiques culturelles, si ce n’est que par la transposition de la Directive SMA dans sa législation nationale.

En termes de développement numérique, les deux télédiffuseurs publics ont mis en ligne des plateformes de visionnement. ZDF offre un service de rediffusion de ses émissions pendant sept jours et un nombre croissant de contenus audiovisuels archivés pour une visualisation à la demande par l’entremise de ZDFmediathek. Il s’agit d’une plateforme de streaming vidéo intégrée, qui comprend également des flux RSS et des services de baladodiffusion (podcast). Depuis février 2013, les trois chaînes de télévision de la ZDF sont diffusées également en direct 24 heures sur 24 sur Internet dans toute l’Allemagne, alors qu’une programmation plus limitée est accessible dans le monde entier. Du côté d’ARD, la première chaîne, Das Erste, a sa propre médiathèque, mais il est également possible d’accéder par l’intermédiaire du site aux médiathèques de chacun des membres du consortium ARD12.

Outre ces initiatives numériques des diffuseurs publics, le gouvernement fédéral ne semble pas avoir défini de politique culturelle visant spécifiquement à faciliter le développement numérique de ses diffuseurs publics, même si le maintien d’une taxe relativement élevée peut avoir une incidence sur leurs capacités en ce domaine.

Australie

Le gouvernement australien n’est pas intervenu par l’entremise de politiques culturelles pour promouvoir la diversité des expressions culturelles au sein des médias australiens, si ce n’est en supprimant les droits de licence de radiodiffusion devenus désuets et les règlements qui ne s’appliquaient qu’aux plateformes médiatiques traditionnelles (Mrdak, 2017). L’objectif sous-jacent de la réforme du secteur des médias était d’assurer un investissement continu dans le contenu australien de haute qualité et l’accès à ce contenu. La réforme devait permettre aux médias d’investir dans le contenu australien et leurs entreprises et de mieux concurrencer les fournisseurs de contenu en ligne.

Le gouvernement a révisé certaines de ses mesures de soutien visant la production et la diffusion de contenus australiens, y compris pour enfants, à la télévision et ce, en vue de les adapter au nouvel environnement multiplateformes qui a émergé depuis leur instauration. Parmi celles-ci figurent des mesures liées à des mécanismes de financement et au soutien aux productions télévisuelles, mais aussi les exigences minimales en matière de dépenses dans la production nationale pour les télédiffuseurs (Department of Communications and the Arts, 2016).

En Australie, le rôle de diffuseur public est assumé par deux médias, soit la Australian Broadcasting Corporation (ABC) et le Special Broadcasting Service (SBS), toutes deux ayant comme rôle d’informer, d’éduquer et de divertir les Australiens. L’ABC a comme fonction de contribuer à un sentiment d’identité nationale, ainsi que d’encourager et promouvoir les arts musicaux, dramatiques et autres arts de la scène en Australie13. La SBS, de son côté, est le radiodiffuseur public national multiculturel et multilingue de l’Australie. Elle s’appuie sur une programmation internationale et locale. Environ la moitié de ses émissions sont diffusées dans des langues autres que l'anglais (la plupart étant sous-titrées). Elle a pour rôle de refléter la société multiculturelle australienne. Les deux médias publics sont financés par le gouvernement australien et leur indépendance est assurée par des garanties de non-ingérence du politique14.

L’ABC s’engage à présenter les contenus australiens sur toutes ses plateformes. Elle produit une quantité importante de contenu australien à la télévision, à la radio et sur les plateformes numériques. Ses chaînes radiophoniques diffusent presque exclusivement de la musique produite par des artistes australiens. Elle fixe des objectifs pour le contenu musical australien sur tous les réseaux qui diffusent de la musique. Un certain nombre de ses chaînes numériques présentent exclusivement de la musique australienne. Par exemple, 100 % du contenu de triple j Unearthed est australien – cette chaîne a pour mission de faire découvrir à la découverte de jeunes talents au pays – tandis que Classic 2 joue uniquement de la musique classique australienne (ABC, 2017b). La popularité des radios en ligne en Australie s’est accrue au cours des dernières années, atteignant en moyenne 11,2 millions d’écoutes de morceaux chaque mois sur les applications Radio Player et Radio (ABC, 2016a).

L’ABC compte six chaînes, dont trois (ABC1, ABC2 et ABC3) diffusent plus de 50 % de contenu australien. ABC1 diffuse 80 % de contenu australien, alors qu’ABC2 se concentre sur la découverte de nouveaux talents et ABC3, aujourd’hui ABC ME, est devenue une chaîne dédiée aux programmes jeunesse, prioritairement numérique et soutenue par une application. Ce nouveau positionnement démontre un changement éditorial qui vise à refléter et à inclure davantage de jeunes Australiens (ABC, 2017a). Ce changement témoigne également d’un choix assumé des dirigeants : dans un environnement de plus en plus fragmenté, où il en coûte 10 fois moins cher d’acheter les droits pour des contenus produits à l’étranger que de les produire nationalement, ils considèrent que l’ABC peut jouer un rôle en tant que source principale de contenus australiens dans l’environnement numérique et ainsi servir de mécanisme clé pour atteindre les objectifs de la politique culturelle (ABC, 2013).

L’ABC distribue ses contenus par le moyen de la plateforme en ligne iview. Les Australiens se sont tournés vers iview pour regarder en majorité des dramatiques (31 % de l’écoute totale), mais également des émissions diffusées exclusivement sur la plateforme (ABC, 2016). La plateforme offre également une application jeunesse, ABC KIDS, qui domine le marché dans cette catégorie de programmes. Enfin, iview a lancé en octobre 2016 le service « Regional Australia », qui permet au public d’explorer une collection soigneusement conservée de contenus australiens, en mettant l’accent sur les nouvelles et les réalités régionales et rurales (ABC, 2017a). Pour attirer davantage de téléspectateurs vers iview, l’ABC a rendu l’application disponible sur Apple TV en mars 2017.

D’autres initiatives intéressantes en faveur de la diversité des expressions culturelles australiennes dans l’environnement numérique comprennent ABC/Screen Australia Art Bites, qui a donné aux créateurs de contenu émergents l’occasion de créer une série de 6 x 5 minutes adaptée à la nouvelle chaîne Arts d’iview, et South Australian Film Corporation/ABC TV LABS iview Originals, qui a financé trois épisodes comiques et deux épisodes documentaires de 6 x 5 minutes pour iview, reflétant les diverses expériences australiennes15.

Enfin, du côté de SBS, les Digital Creative Labs montrent diverses facettes de l’Australie multiculturelle à travers le récit interactif, la télévision sociale, la visualisation de données et la réalité virtuelle (RV). L’engagement envers le caractère distinctif est au cœur de la stratégie d’innovation des Digital Creative Labs pour soutenir le contenu multiplateforme essentiel de SBS afin de créer une expérience immersive pour les auditoires. SBS continue également à investir dans l’expérience utilisateur et la mise à niveau technique de SBS On Demand, où plus de 6 000 heures de programmation sont fournies sur plus de 22 plateformes de distribution (SBS, 2017).

Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB)

La Fédération Wallonie-Bruxelles, comme la plupart des États retenus pour cette étude, n’intervient pas vraiment pour promouvoir la diversité des expressions culturelles au sein des médias, si ce n’est qu’en légiférant pour maintenir des quotas, dont l’application dans l’espace numérique s’avère problématique, face à l’abondance des contenus étrangers accessibles sur les grandes plateformes. La Fédération a néanmoins mis en place un Fonds d’aide à la création radiophonique (FACR), dont le rôle est de promouvoir et de développer ce secteur. Ce fonds « intervient dans les frais de production d’œuvres, créatives et originales, valorisant le patrimoine de la Communauté française dans les domaines de l’information et du documentaire, de la fiction, de la musique et des magazines culturels » (Service général de l’audiovisuel et des médias, 2018). Bien qu’il soit destiné à soutenir des réalisateurs-producteurs ou des structures de production, le Fonds a aussi soutenu des projets soumis par des radios.

La Radio Télévision Belge de la Communauté française (RTBF) est « l’entreprise publique autonome à caractère culturel16 » de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Parmi les principes généraux qui la guident, la RTBF se doit d’être « attentive aux artistes, producteurs et distributeurs d’œuvres artistiques et culturelles de la Fédération Wallonie-Bruxelles, et à leurs créations, et à mettre en valeur les talents émergents17 ». L’article 25(2) du contrat de gestion établit de nombreux objectifs en matière de programmes culturels, notamment ceux :

– de proposer la culture sous toutes ses formes et s’appuyant sur tous les genres de programmes ;

– d’ancrer son offre culturelle dans la mise en valeur des ressources culturelles, artistiques, patrimoniales et touristiques de la FWB;

– de renforcer son rôle d’incubateur de talents et d’espace de diffusion des œuvres et des artistes de la Fédération Wallonie-Bruxelles en accordant une attention particulière aux créateurs, auteurs, artistes, interprètes, éditeurs, producteurs, réalisateurs et distributeurs de la Fédération Wallonie-Bruxelles, et notamment aux œuvres subsidiées par la FWB;

– d’accorder une attention particulière aux talents émergents de la FWB18.

Depuis 2002, le contrat de gestion de la RTBF prévoit également l’obligation de diffuser des œuvres subsidiées par le FACR à raison de minimum 20 heures par an, chaque lundi de 22h à 23h sur la chaîne Première, ce qui offre une audience supplémentaire à ces œuvres19.

Dans son plan « Visions 2022 », la RTBF entreprend entre autres de produire des contenus originaux pour toutes les plateformes en interne et en coproduction et de diffuser des contenus sur toutes les plateformes selon les usages du public (Lauwens, 2017). Cette vision se reflète dans les initiatives et programmes mis en place par la RTBF.

La plateforme Auvio rassemble l’ensemble des contenus audio et vidéo de la RTBF, parmi lesquels se trouvent des programmes TV et radio en direct ou en rediffusion, des contenus exclusifs de la plateforme, des séries, de l’information, du sport, des documentaires, des émissions culturelles, une rubrique dédiée aux enfants, etc. Au total, ces contenus représentaient en 2017 quelque 40 000 vidéos pour 400 000 visionnements par jour (RTBF, 2017), à la fois sur tablette, téléphone intelligent et ordinateur. En plus de présenter l’entièreté du contenu disponible sur le site, l’application contient des fonctionnalités supplémentaires, telles que la possibilité de recevoir des notifications au moment où commence la diffusion d’une émission, mais également de profiter du multiécran20. Depuis le 21 mars 2018, la RTBF a rendu disponible l’accès aux contenus Auvio dans l’entièreté de l’Union européenne, notamment pour permettre aux résidents belges à l’étranger d’accéder à ces contenus (RTBF, 2018). Auvio perfectionne également des algorithmes, dans l’objectif « de progressivement personnaliser l’accès aux utilisateurs aux contenus produits par la RTBF » (Ibid.).

Un autre exemple de la transition de la RTBF vers le numérique est celui de Tarmac, un label crossmédia orienté vers les « cultures urbaines » lancé en 2017. Tarmac vise un public d’adolescents et de jeunes adultes et ses programmes sont exclusivement diffusés sur des plateformes numériques. Elle tente de combler une absence de programme pour les 15-16 ans notamment, un public qui n’était pas pris en compte par la programmation de la RTBF auparavant. Les animateurs et les artistes mis en valeur dans les programmes qui y sont diffusés proviennent des milieux liés aux « cultures urbaines », soit le break dance, le deejaying, les musiciens de hip-hop, etc. D’autres sont des youtubeurs ou des humoristes. La plupart de ces artistes proviennent de la scène belge (CSA, Belgique, 2017).

Enfin, un dernier projet intéressant est celui de la cellule RTBF Webcréation, projet qui « connaît un succès grandissant et contribue au développement d’un nouvel écosystème de talents belges autour de nouvelles formes de narration » (RTBF, 2017). La webcréation de la RTBF s’articule autour de plusieurs pôles, dont :

– les webséries, qui proposent des histoires tous genres confondus dans des formats courts à visionner et partager sur le web et les réseaux sociaux ;

– les expériences transmédias, qui immergent les utilisateurs dans un univers global qui se décline sur différents médias développant chacun une narration propre ;

– les webdocumentaires, qui explorent l’information pour approfondir des sujets d’actualité, de société ou d’histoire et invitent les internautes à prendre part au débat (RTBF, 2017).

De plus, à travers ses appels à projets pour des webséries et autres innovations, la Webcréation vient en aide à une nouvelle génération de créateurs, d’auteurs et de producteurs qui cherchent à se faire remarquer et produit les histoires qui sont sélectionnées. Elle permet aux internautes de voter pour les contenus qu’ils souhaitent voir diffusés. La cellule Webcréation demeure également attentive aux jeunes talents de la FWB en accompagnant les jeunes humoristes, « vlogueurs », geeks et autres créatifs nés sur le Web et en leur offrant une plus grande visibilité.

France

À l’instar des autres pays étudiés, les mesures en faveur de la diversité des expressions culturelles au sein des médias concernent majoritairement des quotas de diffusion, notamment ceux protégeant l’expression française à la radio.

Le monopole public en matière de radiodiffusion en France a pris fin en 1982. Aujourd’hui, les chaînes publiques21 sont responsables de la diffusion de programmes culturels publics, tandis que les chaînes privées privilégient davantage le divertissement (ce qui peut inclure certains programmes culturels).

Les chaînes publiques ont généralement tendance à mettre à la disposition des auditeurs un large éventail de programmes sur leurs sites de télévision « de rattrapage ». Cette mise en ligne des programmes est souvent accompagnée de contenus supplémentaires, un « enrichissement des programmes [qui] constitue une valeur ajoutée, peu présente sur les plateformes des chaînes privées, et [qui] correspond à l’identité et à la mission de diffusion des chaînes publiques » (Farchy et coll., 2013, p. 175). Enfin, les chaînes publiques ont une longueur d’avance dans la création de contenus audiovisuels propres à Internet (Ibid.).

Plusieurs bons exemples d’innovation en matière de promotion de la diversité culturelle dans l’environnement numérique proviennent des diffuseurs publics français. France Télévisions a par exemple recours à cinq plateformes de diffusion numérique : Culturebox, Francetv Éducation, Francetv Information, Francetv Pluzz et Francetv Sport. À titre d’exemple, la plateforme Culturebox rassemble l’offre culturelle à la demande de France Télévisions. Elle permet à la fois de prendre le pouls de l’actualité culturelle et de regarder gratuitement, en direct et en replay, des captations de spectacles vivants et de concerts en HD. Elle offre également l’opportunité de voir et revoir toutes les émissions culturelles des chaînes du groupe et d’accéder en exclusivité à des émissions. En 2017, Culturebox a proposé plus de 670 captations de spectacles vivants, dont près de 430 exclusivement pour le web (Ministère de la Culture, 2018a, p. 10).

France Culture, une composante de Radio France, a de son côté inauguré une salle de concert virtuelle le 22 décembre 2017. Grâce à cette initiative, elle offre gratuitement un catalogue unique de concerts et d’œuvres musicales vidéo et audio, en direct et à la demande. Une version anglaise est opérationnelle depuis le premier trimestre de 2018. Francemusique.fr propose un espace dédié aux captations de plus d’un millier d’œuvres musicales vidéo et audio issues de concerts des quatre formations musicales de Radio France depuis l’Auditorium de Radio France, le tout en partenariat avec ARTE.

De plus, depuis l’automne 2017, le nouveau service « Un monde de Radio France » offre aux auditeurs français, francophones ou francophiles la possibilité de retrouver « le meilleur de Radio France », quel que soit l’endroit où ils se trouvent dans le monde. Ce service permet dorénavant à chacun de créer sa radio « sur mesure », à partir des émissions produites par toutes les antennes du groupe, afin de faciliter la navigation dans l’ensemble des offres, en particulier par une mise en valeur de la diversité et de la richesse des contenus produits chaque jour par le service public(voir à ce propos Gallet, 2017).

Enfin, la chaîne culturelle franco-allemande ARTE a adopté une stratégie plutôt particulière, soit celle de prolonger son objectif de diffusion des connaissances sur le Web, de manière à rencontrer un public complémentaire, plus jeune, qui passe de moins en moins de temps devant le téléviseur. La densité de l’offre de programme en ligne d’ARTE est généralement plus faible que les autres chaînes, puisqu’elle a choisi de produire des contenus spécifiques pour sa plateforme numérique plutôt que d’y rediffuser la totalité de ses émissions de télévision conventionnelle. Il s’agit donc, selon Farchy et al., « de développer un véritable service à part entière, regroupant un choix de programmes pertinents, et non de constituer une simple plateforme de rattrapage de la totalité des programmes de l’antenne », ce qui pourrait « aller à l’encontre de la valorisation des programmes de stock, comme les documentaires, abondants sur la chaîne » (2013, p. 176).

Cette prise de conscience de l’importance d’évoluer vers le numérique est aussi présente chez France Médias Monde, qui vise à « conforter l’empreinte multicanal des programmes traditionnels » et à adapter les contenus aux plateformes et réseaux sociaux dans l’objectif de « viraliser » ses contenus par la dissémination sur les grandes plateformes participatives (voir Saragosse, 2017, p. 22-23 et 25).

Il ne fait aucun doute que les décideurs politiques et les dirigeants des médias de service public en France sont conscients du « rôle moteur [que le service public a] à jouer sur le plan de la promotion de la diversité culturelle à l’ère du numérique ». Mais pour assurer ce rôle, il doit « pouvoir disposer des ressources nécessaires pour investir dans la création de nouveaux formats : web docus, web fictions ou œuvres transmédias » (CESE, 2014, p. 52). Mathieu Gallet, alors président de Radio France, propose à ce titre que la redevance française s’inspire du système allemand, soit celui d’une contribution universelle payée par chaque foyer fiscalement éligible. Or, ces moyens ne serviraient pas à assurer le fonctionnement de ces médias tels qu’ils existaient jusqu’alors. Les nouvelles garanties financières requises « sont liées à la nécessité d’investir rapidement dans le développement numérique » (2017, p. 19).

Benjamin Amalric et Louis-Cyrille Trébuchet parlent d’une « vision intégrée et ambitieuse de l’offre numérique de l’audiovisuel public » qui permettrait, grâce à la coordination des actions et à la mutualisation des ressources, « de garantir aux usagers une offre ergonomique, exhaustive et cohérente ; aux contribuables une efficacité économique renforcée ; aux citoyens, une rénovation du rôle que joue l’audiovisuel public dans la cohésion sociale, en retrouvant les clés d’un accès à de larges franges de la population » (2015, p. 2). Ils proposent de regrouper les fonctions d’hébergement, de publication et de relation client au sein d’une même entité, dont la vocation

sera de fournir (1) l’infrastructure technique d’hébergement, d’indexation et de distribution des contenus, (2) les outils transverses d’ "intelligence client", d’animation marketing permettant les recommandations, les croisements entre les différentes offres et la présence sur les réseaux sociaux, et enfin (3), les dispositifs de monétisation des offres payantes et des offres financées par la publicité. Sa mission sera d’assurer la mise à disposition des contenus et services auprès des usagers et de mettre en relation les créateurs de contenus et éditeurs de service avec leur audience […](op. cit., p. 12).

L’accès à l’offre s’en trouverait ainsi simplifié, la mutualisation des infrastructures techniques aurait pour effet d’abaisser les coûts et la mise en commun et l’indexation des contenus permettrait « d’améliorer le référencement naturel de l’offre sur les moteurs de recherche, de simplifier et d’optimiser l’accès aux contenus pour les usagers et de contribuer à l’accroissement de l’audience » (Ibid.).

Malgré tout, le ministère de la Culture considère que les médias de service public français demeurent timides dans leurs avancées en termes de développement numérique. Par exemple, France Télévisions ne consacre que 3 % de son budget au numérique (Ministère de la Culture, 2018a, p. 8). Le ministère a d’ailleurs pour objectif un investissement supplémentaire dans le numérique de 100 à 150 millions d’euros par an d’ici 2022. La priorité donnée au numérique « implique un redéploiement des moyens, qui peut se traduire par un resserrement de l’offre linéaire ». Cela implique aussi un rassemblement des moyens : les nouvelles offres numériques doivent être « communes à l’ensemble des sociétés »(Ministère de la Culture 2018a, p. 11) À l’instar de l’idée proposée par Amalric et Trébuchet, on propose ici « un grand média des arts et de la culture, rassemblant des centaines heures de captations, des podcasts, des webséries proposant des formats innovants [créée] grâce à une collaboration entre sociétés, pour devenir une marque référente commune » (Ibid.). Les propos de l’ex-ministre Françoise Nyssen, qui souhaite faire de l’audiovisuel public français un « champion du numérique » (Ministère de la Culture, 2018b), annoncent en quelque sorte la mise en place de nouvelles des politiques culturelles adaptées au numérique.

Royaume-Uni

Au Royaume-Uni, le Communications Act 2003 a créé l’Ofcom, organisme indépendant de réglementation des médias. Ses travaux, de même que la Loi sur les communications, visent à faire en sorte que la télévision et la radio commerciales, les réseaux de télécommunications et les services sans fil et par satellite fonctionnent, entrent en concurrence et se développent dans l’intérêt public (Compendium, 2011). En termes de régulation des services publics, l’Ofcom dispose d’un certain nombre de pouvoirs en ce qui concerne la télévision et la radio et la loi de 2003 lui impose de procéder à des examens réguliers de l’accomplissement de la mission de service public de télévision prévue par la loi, son premier examen de ce type ayant été achevé en 2005.

Le Royaume-Uni compte cinq radiodiffuseurs publics : la BBC (financée majoritairement par une redevance), Channel 4 (une société publique autofinancée par la publicité), la S4C (une société publique de radiodiffusion au Pays de Galles, financée par une combinaison de financement de la BBC, de subventions gouvernementales et de publicité), ainsi que Channel 3 et Channel 5 (dont les licences sont détenues par des sociétés de télévision commerciale financées par la publicité) (Department for Digital, Culture, Media and Sport, 2015). Outre la redevance, ces diffuseurs bénéficient de divers avantages l’accès garanti au spectre (ou à une partie des ondes) selon leur besoin pour la radiodiffusion et une place prépondérante dans les guides électroniques d’émissions de télévision.

Les radiodiffuseurs publics du Royaume-Uni jouent un rôle important en matière de diversité des expressions culturelles, puisqu’ils représentent toujours la grande majorité des investissements dans les émissions produites au Royaume-Uni, soit 82 % des commissions en 2016 (Ofcom, 2018). Leur mandat et leur expérience dans des genres tels que les actualités et les arts font que les radiodiffuseurs publics sont parfaitement placés pour créer le contenu national exigé par les téléspectateurs britanniques22. Les radiodiffuseurs publics britanniques ont également été à l’avant-scène du développement technologique. En effet, Channel 4 a été le premier radiodiffuseur public à lancer un service de vidéo à la demande et le succès du iPlayer de la BBC a ouvert la voie à Netflix. De telles avancées technologiques ont effectivement réduit les risques associés à de tels développements pour les radiodiffuseurs commerciaux et engendré de nouvelles habitudes de consommation (Secretary of State for Culture, Media & Sport, 2016).

La BBC constitue le diffuseur britannique le plus important et le plus innovant. Il est également le seul à bénéficier pleinement de la redevance, lui permettant ainsi de ne pas avoir à diffuser de publicité ou de commandite sur ses services publics, et d’éviter que sa programmation ne soit par la fait même dictée par les annonceurs. La BBC gère néanmoins d’autres services commerciaux dans le monde entier, qui ne sont pas financés par la redevance et sont séparés des services publics de la BBC. Les bénéfices sont notamment utilisés pour permettre de maintenir la redevance à un faible coût pour les ménages britanniques.

Parmi les objectifs de la BBC, il faut retenir celui de refléter, représenter et servir les diverses communautés de toutes les nations et régions du Royaume-Uni et, ce faisant, de soutenir l’économie créative à travers le Royaume-Uni23. Elle a également comme rôle d’enrichir la vie culturelle du Royaume-Uni par l’excellence créative dans une programmation distinctive et originale, de favoriser la créativité et le développement des talents et de promouvoir l’intérêt, l’engagement et la participation à l’activité culturelle auprès de nouveaux publics (Jowell 2006, p. 16). En raison du contexte britannique particulier, la BBC a aussi des obligations de diffusion de contenu propre à chaque région. Par exemple, BBC One et BBC Two ont le mandat d’offrir en Écosse, au Pays de Galles et en Irlande du Nord une gamme de genres qui reflète la culture de ces trois régions (BBC, 2017a, p. 130)24. Ces mêmes obligations s’appliquent à la radio.

À l’automne 2017, l’Ofcom a exigé que la BBC augmente sa part de contenu britannique, particulièrement aux heures de pointe, où le seuil est maintenant fixé à 90 % pour BBC One et BBC Two. Les radios doivent également en faire davantage en matière de promotion des artistes émergents du Royaume-Uni. Enfin, au moins la moitié des heures de réseau des chaînes de télévision de la BBC doivent être produites en dehors de Londres, avec des quotas minimums séparés pour chaque nation britannique, reflétant globalement la taille de leur population (Ofcom, 2017). Ces nouvelles obligations ne sont cependant pas applicables au numérique.

Depuis 2007, la BBC utilise la plateforme iPlayer pour diffuser en ligne des programmes, laquelle a d’abord servi de plateforme de rattrapage, pour ensuite devenir une option de remplacement à la télévision. Aujourd’hui, le iPlayer comprend 11 canaux différents, dont un pour l’Écosse (BBC Alba) et un pour le Pays de Galles (S4C). BBC Three est, quant à elle, devenue entièrement numérique. En 2017-2018, la BBC a investi 34 millions de livres sterling dans la production de contenu britannique pour enfants pour toutes ses plateformes (BBC, 2017a, p. 26), reflétant l’engagement du diffuseur public envers le contenu national. Ses chaînes CBBC et CBeebies offrent en première diffusion la grande majorité des émissions pour enfants du Royaume-Uni (Clementi, 2017, p. 38). iPlayer permet également d’accéder à Performance Live, un projet en partenariat avec l’Arts Council England et le Battersea Arts Centre, mettant en vedette des artistes de grand talent du domaine du spectacle, et à Opera Passion, un festival numérique en direct lancé avec huit compagnies d’opéra britanniques.

La BBC a également investi dans des projets visant à promouvoir les contenus culturels britanniques à l’extérieur du pays. En 2015, BBC Worldwide, la branche commerciale du radiodiffuseur public, a créé le BBC Store, afin de permettre aux téléspectateurs d’acheter, de télécharger et de conserver des copies numériques des programmes actuels de la BBC. Les consommateurs pouvaient également acheter un « laissez-passer de série » qui ajoutait automatiquement les épisodes d’une émission à la section « mes programmes » au fur et à mesure qu’ils étaient diffusés.

Cette initiative visait essentiellement à créer des revenus supplémentaires pour l’organisation, compte tenu notamment du ralentissement des ventes de DVD (Tesseras, 2015). Le BBC Store a toutefois été abandonné en 2017, alors que les séries à succès tels Sherlock et Doctor Who sont devenus disponibles sur les sites d’abonnement comme Netflix et Amazon Prime, ce qui a mené à une baisse de la demande de téléchargements de programmes à conserver (BBC, 2017b).

En 2017, BBC Worldwide et ITV, le plus grand radiodiffuseur commercial du Royaume-Uni, ont lancé conjointement BritBox. Il s’agit d’un service d’abonnement vidéo numérique qui propose la plus grande offre de télévision britannique aux États-Unis et au Canada. Le service propose entre autres des émissions emblématiques, des premières exclusives, des séries et des feuilletons actuels, la plupart disponibles un jour après leur diffusion au Royaume-Uni (BBC Worldwide, 2018). Le service est disponible au Canada depuis le printemps 2018.

Dans son examen de la radiodiffusion publique en 2015, l’Ofcom a affirmé que les radiodiffuseurs de service public auront besoin de liberté pour continuer à innover, les auditoires désirant de plus en plus de contenus diffusés sur de multiples appareils et conçus spécifiquement pour l’environnement Internet (Ofcom, 2015, p. 5). Selon le régulateur britannique, les décideurs politiques devraient poursuivre la réflexion sur la réforme des règles qui garantissent une visibilité et un accès appropriés au contenu des services publics. Les règles actuelles sur l’importance des grilles de programmation pour les radiodiffuseurs publics ayant été conçues pour une ère de radiodiffusion analogique, elles doivent être réformées pour s’adapter à l’évolution de la technologie et faire en sorte que le contenu du service public reste disponible et facile à trouver, quelle que soit la façon dont il est perçu.

L’Ofcom admet avoir un rôle de soutien important à jouer, tel qu’établi par le Parlement britannique, pour permettre aux radiodiffuseurs de service public de s’adapter (Ofcom, 2018, p. 2). Elle doit continuer à jouer le rôle de premier plan des diffuseurs de service public. Toutefois, l’Ofcom soutient que sa prospérité dépend directement de la préservation de sa capacité de créer du contenu britannique distinctif et de grande qualité. Elle encourage également les diffuseurs britanniques à travailler en partenariat avec leurs concurrents privés (par ex. l’initiative BritBox), et les grandes multinationales (par exemple, en favorisant les coproductions, comme ce fut le cas pour Troy : Fall of a City, une coproduction de BBC et Netflix)25.

Conclusion

Au terme de cet examen rapide des cinq instances étatiques retenues, et malgré la diversité et l’originalité de certaines mesures répertoriées, des priorités communes et des initiatives convergentes ressortent de notre étude.

D’abord, la création de plateformes numériques de diffusion en différé et à la carte de contenus audiovisuels permet de valoriser la production des télédiffuseurs publics sous forme de catalogue, à l’instar des services sur abonnement, comme Netflix, ou de location/achat, comme iTunes. Ce faisant, ces contenus bénéficient d’une visibilité et d’une durée de vie accrues dans l’espace numérique. Ils peuvent ainsi atteindre des publics dont les habitudes de consommations sont diversifiées, et de moins en moins utilisateurs de la télévision conventionnelle.

En outre, la jeunesse – que l’on parle de jeune public ou de jeunes créateurs – reçoit une attention considérable, permettant ainsi à une culture émergente de s’imposer dans l’environnement numérique, sans pour autant occulter la création plus « classique ».

Enfin, tel qu’évoqué en début de texte, les diffuseurs publics jouent un rôle déterminant dans la promotion de la diversité des expressions culturelles dans l’environnement numérique. L’importance accordée à la diversité des médias par les Parties à la Convention devrait éventuellement encourager le déploiement de soutiens additionnels à des acteurs autres que des diffuseurs publics, notamment avec cet objectif sous-jacent de bonifier la diversité des expressions culturelles en ligne. Il est certainement trop tôt pour se prononcer sur la mise en œuvre effective (ou non) des directives opérationnelles de 2017 relativement à l’environnement numérique.

Ceci dit, les États et les mesures examinés dans le cadre de cette étude semblent confirmer cette préoccupation quant à l’environnement de plus en plus compétitif que présente l’univers numérique. Cependant, les États étudiés tardent encore à renouveler et à moderniser leurs instruments de protection et de promotion des expressions culturelles nationales, pour la plupart perçus comme dépassés. Par exemple, l’arrivée de nouveaux joueurs comme Netflix, Amazon, Apple Music, Spotify, et autres26 rend les quotas de contenu national quasiment inapplicables. D’ailleurs, la promotion des expressions culturelles dans l’environnement numérique relèverait surtout des les médias de service public eux-mêmes – souvent incitée par des organismes de régulation – que par ces nouveaux joueurs27 et non par la mise en œuvre de politiques culturelles et numériques spécifiques. Bien plus, outre cette sorte de responsabilité qui leur incombe quant à la promotion des expressions culturelles dans un environnement de plus en plus compétitif, les médias de service public se voient dans l’obligation d’innover afin de demeurer pertinents et de continuer à accomplir leur mandat.

Quant à la mission d’information des médias et au journalisme culturel, les documents recensés sont plutôt muets quant à des mesures ou instruments publics concrets les liant aux objectifs de la Convention à l’ère numérique. De fait, nous n’avons recensé aucune initiative en ce sens dans les États retenus. Cela confirme cette hypothèse de départ selon laquelle la conception du journalisme comme production culturelle (Pélissier, 2010) serait peu prise en compte par ces États et leurs politiques publiques.

La disparition d’émissions culturelles spécialisées en culture, autant à la radio qu’à la télévision, l’appauvrissement général de l’information et de la critique culturelles ainsi qu’une tendance au traitement médiatique de la culture dans une perspective principalement commerciale sont déplorés par plusieurs observateurs (Voyer-Léger 2014 ; Morissette 2016). Même si les préoccupations quant à la place de la culture dans les médias ne sont pas toutes récentes, elles se complexifient à l’ère numérique.

Par exemple, sur le Web et les plateformes mobiles, où la concurrence s’intensifie pour capter l’attention des publics, les médias cherchent à produire des contenus qui seront consommés, partagés, voire commentés par un nombre élevé d’usagers. Les médias sociaux et les moteurs de recherche, devenus pour bon nombre de citoyens les principales sources d’information et de repérage de contenus culturels, contribuent aussi à cette captation de l’attention par l’entremise d’algorithmes qui déterminent la visibilité de chaque élément publié. Il faut également prendre en compte la contribution et l’influence de nouveaux acteurs médiatiques, plus ou moins spécialisés (blogues, critiques vidéos, sites web indépendants, applications mobiles), à la médiatisation culturelle.

Notons enfin que quelques propositions d’appui accru aux médias, afin de leur permettre de relever les défis du numérique, semblent susciter un large consensus dans les milieux médiatiques au Québec, en particulier les instruments fiscaux visant à redistribuer une part des revenus d’entreprises non établies au pays (principalement Google et Facebook) à la production de contenus nationaux. L’assouplissement des règles concernant le financement philanthropique des médias et l’engagement des gouvernements et des institutions publiques à acheter de la publicité dans des entreprises médiatiques nationales, plutôt qu’étrangères, sont également envisagés.

Mais de telles mesures, si elles permettraient de soutenir (du moins indirectement) les entreprises médiatiques dans leur mission culturelle, ne résolvent pas le problème de l’attention des publics qui tend à se déplacer vers les plateformes numériques et les contenus d’ailleurs. Au Québec comme ailleurs, on observe donc une tendance au « cosmopolitisme culturel », surtout chez les plus jeunes, mais aussi dans certains cas à la découverte d’artistes et de productions nationales (Cicchelli et Octobre, 2017).

Le problème de la « découvrabilité » des contenus culturels nationaux mobilise justement les médias, autant en tant que producteurs de ces contenus que comme vecteurs de visibilité pour les autres producteurs culturels (OTM, 2016). Il est sans doute un peu tôt pour observer la mise en œuvre de véritables politiques culturelles numériques globales. Il nous semble toutefois que celles-ci doivent faire une place aux médias, non pas comme un « cas à part », mais plutôt comme un élément vital jouant un rôle clé dans des écosystèmes culturels en pleine transformation28.

Colette Brin est professeure titulaire au département d’information
et de communication à l’Université Laval (Québec).

Maxime Mariage est agent de communications et engagement du public
au sein d’Avocats sans frontières et chercheur collaborateur
au Centre d’études sur les médias.

Diane Saint-Pierre est professeure
au Centre Urbanisation Culture Société,
Institut national de la recherche scientifique (Québec).

Véronique Guèvremont est professeure titulaire
à la Faculté de droit de l’Université Laval (Québec).




Notes

1

Cette expression, désormais courante dans les milieux culturels, rend compte de la coexistence et de l’interaction de toutes les composantes des arts et de la culture d’une société donnée, qu’elles concernent la formation, la recherche, la création, la production, la diffusion ou encore la participation culturelle.




2

Quelques chercheurs, dont Luckerhoff (2011) et Broustau (2017), se sont intéressés au rôle des médias dans l’écosystème culturel, mais il s’agit presque toujours d’une préoccupation secondaire, voire marginale des travaux sur les transformations des médias à l’ère numérique.




3

Au Québec et au Canada, voir par exemple FNC-CSN (2016), Gasher et al. (2016), Forum des politiques publiques (2017), Comité permanent du patrimoine canadien (2017).




4

Nous tenons à remercier les étudiants qui ont contribué à cette étude en tant qu’auxiliaires de recherche : Mélissa Bernatchez, David Carpentier, Ariane Deschênes, Annick Essoh, Ariane Gruet-Pelchat, Gabriela Molina, Iris Richer et Clémence Varin.




5

L’analyse de la Catalogne, sixième État retenu, n’était pas encore terminée lors de la rédaction du présent texte.




6

Il s’agit des bases de données Communication & Mass Media Complete, ComAbstracts, Sage Journals, Proquest et Taylor & Francis. Nous avons combiné des mots-clés tels « diversité des expressions culturelles » ou « diversité culturelle » et « médias » avec les noms des pays visés. Cette recherche a été effectuée également avec les équivalents anglais pour l’Allemagne, l’Australie et le Royaume-Uni. Enfin, nous avons utilisé le terme « diversité culturelle », bien que celui-ci ait une signification différente de celui de « diversité des expressions culturelles », et ce, en raison de la confusion qu’il existe parfois au sein même de la littérature, le premier terme étant souvent utilisé à tort comme englobant le deuxième.




7

Les sources citées dans cette section constituent l’essentiel des textes contenant des actions liées aux médias. Au total, environ 550 documents des cinq États ont été recensés pour les fins de l’étude, mais très peu d’entre eux s’avéraient pertinents pour le cas particulier des médias.




8

Selon l’UNESCO, la radiotélévision de service public « a un rôle important à jouer comme moyen d’accès et de participation à la vie publique. Dans les pays en développement surtout, la radiotélévision de service public peut contribuer à faciliter l’accès à l’éducation et à la culture, à développer les connaissances et à susciter des interactions entre citoyens [c’est nous qui soulignons] ». Voir UNESCO, 2003, Programme et budget approuvés 2004-2005, 32e session de la Conférence générale de l’UNESCO.




9

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, l’une des priorités immédiates des Alliés a été de démanteler les structures nazies existantes. La radio était particulièrement ciblée parce qu’elle avait été utilisée comme outil de propagande pendant le Troisième Reich. Les Alliés étaient désireux de rétablir l’indépendance de la radio par rapport à l’État, d’agir comme une voix critique et d’essayer d’empêcher que l’extrémisme ne s’installe de nouveau (von Hellfeld, 2010).




10

ARD : Arbeitsgemeinschaft der öffentlich-rechtlichen Rundfunkanstalten der Bundesrepublik Deutschland ou consortium de diffuseurs publics de la République fédérale d’Allemagne.




11

ZDF : Zweites Deutsches Fernsehen ou « Seconde télévision allemande ».




12

Aujourd’hui, l’ARD se compose de neuf sociétés régionales de radiodiffusion publique pour les 16 États fédéraux : Bayerischer Rundfunk (BR), Hessischer Rundfunk (HR), Mitteldeutscher Rundfunk (MDR), Norddeutscher Rundfunk (NDR), Radio Bremen, Rundfunk Berlin-Brandenburg (RBB), Saarländischer Rundfunk (SR), Südwestrundfunk (SWR) et Westdeutscher Rundfunk Köln (WDR). Le dixième membre est Deutsche Welle (DW), le diffuseur international allemand.




13

Charte de l’Australian Broadcasting Corporation, articles 1(a)(i) et 1(c) respectivement.




14

La SBS obtient par ailleurs des revenus supplémentaires de sources commerciales.




15

Ces initiatives ont été mises en place en 2015-2016. Voir ABC (2016, p. 41).




16

Quatrième contrat de gestion, article 1er.




17

Quatrième contrat de gestion, article 5(d).




18

Ainsi, en télévision, la RTBF diffuse, notamment, au moins 50 spectacles musicaux (classiques et non classiques), lyriques (opéra) et chorégraphiques (ballets) par an, dont au moins 12 sont produits en Fédération Wallonie-Bruxelles ; 12 spectacles de scène par an (théâtre, humour, etc.) produits en Fédération Wallonie-Bruxelles, dont au moins 10 sont des œuvres théâtrales ; 30 courts métrages de fiction ou d’animation par an, émanant de jeunes auteurs, réalisateurs ou producteurs de la Fédération Wallonie-Bruxelles ; 120 films de longs métrages cinématographiques par an et 40 œuvres cinématographiques destinées à des publics spécifiques relevant du « cinéma d’auteur » ou du « cinéma d’art et d’essai » (art. 25.4). En radio, la RTBF doit diffuser au moins 300 concerts ou spectacles musicaux ou lyriques par an, dont au moins 150 sont produits en Fédération Wallonie-Bruxelles (art. 25.5).




19

Fonds d’aide à la création radiophonique, Bilan 2017, p. 10 ; RTBF, Contrat de gestion 2013-2017, art. 25.




20

C’est-à-dire qu’il est possible, par exemple, de commencer la lecture d’un contenu sur un ordinateur et de la reprendre en cours de route sur un téléphone intelligent ou une tablette.




21

L’audiovisuel public se compose de six groupes, soit France Télévisions (France 2, France 3, France 4, France 5, Outre-Mer 1ère, France Ô), Radio France (France Inter, France Bleu, France Info, France Culture, France Musique, Mouv’, FIP), France Médias Monde (RFI, France 24, MCD), les chaînes cofinancées (TV5 Monde, Arte), les chaînes parlementaires (LCP, Public Sénat) et l’Institut national de l’audiovisuel (INA).




22

Selon la UKCCD (Coalition britannique pour la diversité culturelle), la BBC offre le plus haut niveau de programmation originale (en interne ou sur commande) en Europe. Voir Intergovernmental Committee for the Protection and Promotion of the Diversity of Cultural Expressions, 2013, p. 1.




23

Article 6 (4) de la Charte royale 2016.




24

BBC One et BBC Two doivent, à eux deux, diffuser plus de 6 000 heures de programmes présentant un intérêt particulier pour les nations et les régions – dont 95 % doivent être réalisés dans les zones auxquelles ils se rapportent. Voir Ofcom, 2017.




25

Voir les points 4.6 et 4.12 dans Ofcom, 2018, p. 13-14.




26

Notons que les mesures et politiques s’appliquant aux services de vidéo sur demande par abonnement comme Netflix ne sont pas considérées dans cette étude, puisque ce ne sont pas des médias au sens traditionnel du terme.




27

Dans le contexte canadien et dans celui de consultations publiques récentes sur l’avenir de la télévision, Anciaux, Demers et al. (2018) observent que le rôle du diffuseur public Radio-Canada semble voué à s’amenuiser au profit de nouveaux joueurs émergents. Les auteurs signalent également des lectures différentes au Québec francophone et ailleurs au pays, relativement à la diversité des expressions culturelles. « Le positionnement francophone dans cet ensemble multiculturel se problématise de moins en moins comme production canadienne – ce qui semblait un acquis, menacé – et de plus en plus comme production minoritaire canadienne, parmi d’autres, et principalement rattachée à une province » (p. 79).




28

Dans les prochaines étapes de notre recherche, nous comptons valider les résultats de notre synthèse documentaire auprès d’experts et de décideurs dans les États retenus, puis les soumettre à la discussion avec les organismes partenaires (la Coalition pour la diversité culturelle, l’Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et de la vidéo (ADISQ), l’Association des professionnels de l’industrie musicale (APEM)) ainsi que le ministère de la Culture et des Communications du Québec.






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Référence de publication (ISO 690) :
BRIN, Colette, MARIAGE, Maxime, SAINT-PIERRE, Diane, et GUÈVREMONT, Véronique. Promouvoir la diversité des expressions culturelles à l’ère numérique : le rôle de l’État et des médias. Les Cahiers du journalisme - Recherches, 2018, vol. 2, n°2, p. R49-R68.
DOI:10.31188/CaJsm.2(2).2018.R049


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