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Nouvelle série, n°3

1e semestre 2019

DÉBATS

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ÉDITORIAL

Pour en finir avec « les médias » ?

Les désignations, c’est bien connu, tendent à cadrer le réel qu’elles évoquent. Les journalistes aussi, bien sûr, mais ils peuvent être eux-mêmes les victimes des termes amalgamants qu’on leur applique.






À

proprement parler, la cause est entendue : les journaux font partie des médias comme le journalisme fait partie des activités de communication. Mais sur ce point se manifeste une nouvelle fois la vieille tension entre théorie et pratique. Pour scientifiquement acquises que soient ces catégorisations sur le plan théorique, leurs connotations et la confusion qu’elles entretiennent dans le langage courant n’en sont pas moins perturbantes en pratique.

Dans ce numéro, deux contributions au moins le soulignent. L’amalgame entre « la presse » et « les médias », avance Michael Schudson était une manœuvre dépréciative imaginée par l’administration Nixon, manœuvre toujours aussi efficace aujourd’hui. Au détriment croissant de la première, souligne Brian Myles, pour qui c’est bien le journalisme qu’il faut défendre, plutôt que l’industrie des médias.

Tel est aussi, d’une certaine façon, le thème de la chronique de ce numéro, laquelle s’interroge sur l’éventualité d’un troisième tournant dans l’évolution du journalisme. Après l’ère de la vente aux lecteurs vers 1630, puis aux lecteurs et aux annonceurs publicitaires vers 1830, la collectivité devra-t-elle, vers 2030 se substituer aux forces du marché pour entretenir une activité dont le besoin est de plus en plus manifeste ? Si tel devait être le cas, la spécificité de la production journalistique dans le chaos des « médias » pourrait en sortir renforcée. Au prix, souligne toutefois ce texte, d’une réflexion approfondie sur cette spécificité : un prix peut-être trop élevé dans une culture professionnelle globalement peu portée aux questionnements méthodiques.

Ce n’est en tout cas pas le genre de problème qui doit tourmenter les prospères quotidiens indiens examinés par Antoine Char, ni les « radios poubelles » dénoncées avec vigueur1 par Dominique Payette, ni les community managers dont Didier Makal évoque le rôle ambigu sur les sites africains d’actualité.

Bien sûr, comme le devinait déjà l’équipe Nixon, parler des « médias » plutôt que des journalistes n’est pas seulement tracer un périmètre plus ou moins large autour du métier d’informer, c’est aussi cadrer sa perception publique. Un déplaisant retour des choses pour des professionnels que leur métier conduit justement à cadrer le réel qu’ils rapportent. Qu’ils le veuillent ou non : ils pourraient aussi difficilement s’abstenir de tels cadrages qu’il leur serait difficile d’abandonner le mot « média ». Comme le signalait Erwin Goffman, des cadres d’interprétation sont mobilisés à chaque instant pour donner le sens de situations, qui sans eux, seraient inintelligibles2. Près d’un demi-siècle après la parution de son livre (c’était, incidemment, l’année de la démission de Nixon), les effets de cadrage – cadrage des journalistes, cadrage par les journalistes… – constituent toujours un axe essentiel des travaux sur le traitement de l’actualité. Ils sont au cœur du défi que représentent les sujets touchant la santé mentale, défi auquel se consacre le dossier coordonné par Marie-Christine Lipani et Alain Kiyindou (voir sa présentation détaillée p. R3). C’est aussi de questions de cadrage que traitent justement deux autres textes, l’un dans la partie Débats (Samuel Lamoureux), l’autre dans la section Recherches (Michel Lemay).

Sans se concerter non plus, deux articles de ce numéro abordent pour leur part la situation des journaux régionaux, mais dans des contextes francophones fort différents, le Cameroun (Alexandre Djimeli), et le Québec (Aimé-Jules Bizimana et Oumar Kane). Avec eux, les autres articles et notes de recherche qu’accueille cette section (Gervais Mbarga, Marc-François Bernier et Thierry Watine) illustrent la diversité géographique, thématique et théorique des travaux qu’accueillent Les Cahiers du journalisme.

Dans cette livraison, un article emprunte, non sans précaution, un cadre théorique controversé, un autre assume une posture prioritairement descriptive, un troisième explore une hypothèse incitant à la discussion : tous ces textes ont avant tout en commun – outre leur évaluation en double aveugle – de rappeler l’importance de préserver la diversité des approches dans les recherches en journalisme. Y compris, voire surtout, lorsque ces approches ne coïncident pas avec les vues personnelles de chacun des responsables éditoriaux. 

Les Cahiers du journalisme





1

On ne rappellera jamais trop que la publication d’un texte dans les Cahiers du journalisme n’implique ni approbation ni improbation de la part de la revue.



2

Frame analysis ; An essay on the organisation of experience. Harper & Row, New York, 1974.






Référence de publication (ISO 690) :
LES ÉDITEURS. Pour en finir avec « les médias » ? Les Cahiers du journalisme - Débats, 2019, vol. 2, n°3, p. D3-D5.
DOI:10.31188/CaJsm.2(3).2019.D003


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