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Nouvelle série, n°6

1er semestre 2021

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Retour critique sur une décennie d’information sur smartphone comme produit de contraste des ambitions des plateformes

Virginie Sonet, Université Paris Nanterre

Résumé

Par une analyse rétrospective de la métamorphose des formats de l’information mobile, des premières applications aux assistants vocaux (2008-2020), cet article propose de comprendre ce que les diverses strates d’infomédiation observables sur le smartphone font à la communication journalistique traditionnelle. L’article met en lumière un double mouvement stratégique des plateformes qui contribuent au délitement progressif de la souveraineté des médias d’informations. D’une part, un mouvement de démultiplication et d’homogénéisation des modalités d’agrégation qui participe de la substituabilité des éditeurs. D’autre part, un mouvement que nous qualifions de méta-éditorialisation qui signale les velléités des plateformes à préempter la prescription d’information.

Abstract

Through a retrospective analysis of the metamorphosis of mobile news formats, from the first applications to voice assistants (2008-2020), this article proposes to understand how the various layers of infomediation in the smartphone influence the traditional journalistic communication. The article highlights a dual strategic movement led by the platforms that contributes to the progressive disintegration of the sovereignty of the news media. On the one hand, a movement to increase and standardize aggregation methods which contributes to the substitutability of publishers. On the other hand, a movement that we qualify as meta-editorialization which signals the inclinations of platforms to preempt the news prescription.

DOI:10.31188/CaJsm.2(6).2021.R011





L

e Digital news report 2020 (Newman, Fletcher et al., 2020) indique que les Français ont une confiance de plus en plus faible dans les médias d’information, qui, tous supports confondus sont crédités de 23 % de confiance, taux le plus bas d’Europe. Parallèlement, alors que le smartphone est désormais le terminal principal des pratiques informationnelles (59 %) et que les réseaux sociaux sont à l’origine de près de 40 % des contacts informationnels (contre 18 % en 2013), tous les autres supports de communication subissent une baisse de fréquentation : imprimé, télévision, web. Le 17 juin 2020, la journaliste en ligne Lucie Ronfaut, s’amuse sur Twitter de l’incompréhension d’utilisateurs face à un compte TikTok certifié alors qu’il n’a que 300 abonnés. Ce mystérieux compte est celui du journal Le Monde qui s’est lancé sur la plateforme de microvidéo deux jours plus tôt. Corroborant l’analyse de Mercier (Mercier et Pignard-Cheynel, 2017), un sondage informel réalisé par nos soins auprès des étudiants à la rentrée 20201 au sujet de leurs pratiques médiatiques permet de prendre la mesure des enjeux. Au-delà de l’hégémonie du smartphone comme terminal de la communication, du divertissement et de l’information, se dévoile le poids des applications comme Snapchat ou Instagram dans ce qu’ils identifient comme des pratiques informationnelles. Si l’on comprend que les médias de la filière presse et information2 (Cabedoche, Damian-Gaillard et al., 2011) se tournent vers ces plateformes pour tenter d’y trouver les jeunes audiences essentielles au maintien d’une croissance, se dresse en revanche le constat alarmant de la quasi-ignorance des médias « sources » des informations auxquelles les smartphonautes sont exposés. Ces étudiants ne sont pas en mesure de déterminer « qui » les informe, seulement le « où », le canal : « On va sur Insta’ », « On regarde sur notre smartphone et ce que les gens postent ».

Si les grands médias historiques sont toujours présents et continuent de produire toujours plus d’informations, sous des formes de plus en plus variées, force est de constater que dans les espaces numériques du smartphone, un pilier fondamental de leur protocole éditorial leur est progressivement confisqué : le système de distribution. En dehors de leur support originel (papier, télévision, radio) et de leur site internet, ils produisent aujourd’hui pour d’autres acteurs. Or, dans le domaine des industries médiatiques comme culturelles, c’est le système de distribution qui délimite ce qu’il est apte à recevoir. Son gestionnaire détermine la sélection des contenus, les conventions de leur mise en forme et, partant, les conditions commerciales de leur publication (Hirsch, 1972 ; Becker, 2010). En d’autres termes, il balise le champ des possibles de l’éditorialisation, entendue selon les termes d’Epron et Vitali-Rosati (2016, p. 28) comme « le processus de mise en forme et de structuration d’un contenu dans un environnement numérique. » Ainsi que le synthétise Bomsel (2013), le système de distribution d’un média est, avec l’activité d’édition des contenus, l’élément qui détermine la singularité éditoriale, le métier même de l’éditeur (presse écrite, télévision, radio), les modalités de sa consommation, la relation avec ses publics et la logique de son modèle économique. La maîtrise du système de distribution est une condition sine qua non pour un média de garantir sa capacité à prescrire de l’information dans l’espace public – d’y assurer l’agenda-setting (McCombs et Shaw, 1972). Le transfert de l’activité de distribution des contenus journalistiques aux acteurs tiers que sont les plateformes d’infomédiation soulève donc des enjeux sociétaux importants.

À l’appui de nos recherches menées depuis 2009 sur la configuration des logiques économiques et des usages sociaux des médias sur le smartphone, nous proposons ici une approche rétrospective. Ces travaux3 s’inscrivent dans une perspective communicationnelle et mobilisent les outils de la sociologie des usages et de l’économie industrielle appliquée aux médias et au numérique. En étudiant dans une perspective certaldienne la construction concomitante des usages des smartphonautes, des stratégies technoéconomiques des plateformes mobiles et des tactiques des entreprises médiatiques, nous avons pu comprendre ce que ces trois facettes indissociables font à l’éditorialisation. Aussi, il ne s’agit pas dans cet article de présenter l’analyse d’un corpus inédit, mais au contraire de proposer une relecture critique et circonstanciée de nos travaux antérieurs pour proposer une réponse à la question suivante : de quoi l’évolution des formats médiatiques sur le smartphone est-elle le symptôme ? Notre objectif est moins de démontrer que les démarches de diversification de leurs contenus déployées par les éditeurs sont inopérantes économiquement, que de lire à travers la métamorphose progressive des formats de l’information mobile, l’établissement d’une organisation industrielle préjudiciable aux éditeurs.

Pour cela nous mobilisons la notion d’affordance. L’affordance est la capacité d’un objet à suggérer sa propre utilisation (Bardini, 1996 ; Ertzscheid, 2017). Elle repose sur les moyens par lesquels la matérialité d’un dispositif façonne un ensemble d’utilisations spécifiques en les favorisant et en les contraignant. Elle définit la relation entre une technologie et ses utilisateurs (Faraj et Azad, 2012). Propriétaires des systèmes de distribution, ce sont les plateformes mobiles et socionumériques qui contrôlent les termes de leur affordance. On peut en identifier au moins trois composantes stratégiques qui participent de la conformation des contenus journalistiques. Les usages tout d’abord : les plateformes rassemblent des volumes considérables d’utilisateurs qui y déploient les pratiques permises par le dispositif et favorables à leur propre modèle économique. La massification de ces usages est une incitation forte pour les médias à proposer des déclinaisons de leurs contenus dans ces espaces. L’arrivée d’une nouvelle plateforme plus innovante, plus populaire, plus engageante ou plus jeune se présente comme une invitation à s’y déployer pour tenter de suivre les audiences. Les outils informatiques ensuite : fournis par les plateformes elles-mêmes, ils permettent et imposent aux médias de délivrer leurs contenus dans les formats adaptés, de les héberger au sein de la plateforme, de faciliter l’interactivité prévue par l’infomédiaire. Enfin, les conditions commerciales et d’organisation de la production déployées par les plateformes à destination des éditeurs : elles prennent la forme de dispositions coercitives comme les injonctions d’Apple pour la conception des interfaces des applications destinées à iOS (Sonet, 2014) ou comme les relations industrielles prétendument privilégiées entre la plateforme et les médias, censées garantir à ces derniers un traitement de faveur (Rebillard et Smyrnaios, 2019). Ces trois composantes de l’affordance déterminent les utilisations qui peuvent être faites de la plateforme par ceux qui la consultent et ceux qui l’alimentent, qu’ils s’agissent de profanes ou d’éditeurs professionnels. Nous soutenons ici l’hypothèse que ce qui apparaît initialement comme des innovations éditoriales, comme des outils ad hoc pour favoriser la visibilité des médias dans de nouveaux canaux de distribution, s’apparente dans une perspective industrielle à l’imposition de cahiers des charges dans lesquels on retrouve la prescription de l’outillage, l’organisation du processus de production des contenus, les injonctions éditoriales, la fixation du niveau des revenus. Derrière les opportunités offertes de proposer des formats adaptés à la demande finale, c’est l’organisation d’un système d’appels à l’action nécessaire au modèle économique des plateformes qui se révèle. Pour soutenir cette hypothèse, nous la divisons en deux axes d’analyse. Le premier axe vise à montrer que l’évolution des formats révèle l’organisation de la substituabilité4 des éditeurs professionnels par les différentes plateformes d’infomédiation mobiles. Il fait l’objet de la première partie. La seconde partie cherche à comprendre en quoi les formats les plus récents signalent un mouvement inédit que nous qualifierons de méta-éditorialisation, par le truchement duquel les plateformes préemptent la fonction de prescription de l’information historiquement dévolue aux éditeurs de la filière presse et information.

De la diversification éditoriale à l’organisation de la substituabilité des éditeurs

La numérisation de l’information a participé d’un faisceau de facteurs ayant fragilisé les entreprises de presse traditionnelles : surabondance de contenus professionnels et amateurs, atomisation des audiences, démultiplication des espaces publicitaires potentiels, exacerbation de la gratuité. Comme le développe Attias (2008), le numérique encourage l’hétérogénéisation des pratiques informationnelles qui exige des éditeurs de prendre en compte une demande diversifiée : ils doivent être en mesure de proposer une certaine profondeur d’offre, des contenus d’information accessibles à différents niveaux pour des catégories différentes de consommateurs. De surcroît, les audiences des supports historiques (imprimés, chaînes de télévision, stations de radio) vieillissent à mesure du déport des publics les plus jeunes vers les pratiques en ligne. Dans ce contexte, le smartphone fait figure de terminal prodigue (Sonet, 2014). Apple commercialise son premier iPhone en 2007. Loin d’être le premier téléphone intelligent, il est celui qui démocratise ce type de terminaux. Écran « total », d’une intuitivité sans précédent (il est livré sans mode d’emploi), il consacre la manipulation des contenus, sans appendice (ni clavier, ni stylet) et la promesse d’une modularité infinie grâce aux applications. Accélérant le phénomène de connexion permanente, il augure la possibilité de s’adresser individuellement à des publics libérés des contraintes spatiales et temporelles de la consommation médiatique. Les promesses de performance publicitaire suivent cette même logique, et les investissements triplent entre 2011 et 2014 (SRI-PWC, 2015). À point nommé, les éditeurs se voient offrir par Apple et Android la liberté de développer des applications pour atteindre une audience mobile, plus qualifiable et plus jeune et de sortir des fourches caudines éditoriales et commerciales des opérateurs de télécommunication qui jusqu’ici contrôlaient les portails d’accès aux contenus mobiles.

Ainsi, au cours de toute la période observée (2008 à 2020), aux pressions économiques s’ajoutent les incitations des différentes plateformes pour encourager les médias à rejoindre leurs écosystèmes. C’est le début de la prolifération des formats éditoriaux. Mais, à travers les applications, les réseaux sociaux numériques (RSN), et les messages, c’est à une éditorialisation contrainte que nous assistons, qui prive progressivement les éditeurs des actifs spécifiques qui supportent leur différenciation, notamment la singularité éditoriale et la connaissance des consommateurs.

Le développement des applications et la dégradation de l’éditorialisation originelle.

En 2008, iOS et Android ouvrent leurs boutiques d’applications et mettent à disposition publiquement et « gratuitement » leur SDK5. Conscients de la nécessité de proposer des contenus de qualité aux smartphonautes pour activer les effets de réseaux sur lesquels repose leur modèle économique, et conformément à l’idéologie de la Silicon Valley (Durand, 2020), ils accompagnent cette ouverture d’un discours vantant la liberté offerte aux développeurs (Morio, 2007). Dès 2010, 134 000 applications mises au point par plus de 28 000 « développeurs indépendants » sont disponibles sur l’AppStore (Deschamps, 2010), sans que la firme n’ait eu à participer à leur financement. Les médias s’y déploient massivement et avec enthousiasme, ainsi qu’en témoigne Philippe Jannet, PDG du Monde interactif : « Le Monde s’est ainsi lancé sur le mobile en sortant une application iPhone gratuite, qui se voulait simple et efficace. Gratuite pour toucher tout le monde, simple, car l’iPhone est vendu sans mode d’emploi (il fallait donc une appli intuitive) et efficace en proposant un contenu adapté à l’écran.6 » Le développement du système applicatif dans la filière presse et information enclenche un premier mouvement de dévalorisation de l’éditorialisation à travers un phénomène de commoditisation, d’homogénéisation et d’imposition des rapports de force avec les plateformes mobiles.

Fidèles à leurs protocoles éditoriaux historiques, les médias conçoivent leurs applications sur le registre attentionnel de la fidélisation (Boullier, 2009) censé favoriser le financement publicitaire. Sous la pression de la concurrence et fortement incités par les guidelines7 des OS pour construire leurs interfaces, les médias développent des « carrefours de pratiques » censés favoriser la récurrence de consultation par les smartphonautes (Sonet, 2014, 2016a). Ainsi que l’illustre l’application de Libération (infra), l’agrégation applicative, inédite pour la filière presse et information, se traduit par l’édition d’une palette de services prétendument draineurs d’audience : contenus plurimédias, jeux, direct médias audiovisuels, rattrapage, pastilles et rubriques thématiques, numéros intégraux de titres de presse en PDF, radios, contributions des lecteurs, etc. L’intégration des fonctions de partage associées à Facebook, Twitter, aux mails et aux SMS, « encouragée »8 par les guidelines des OS mobiles y est systématique. L’agrégation applicative mêlant navigation et communication, exige donc d’emblée et de facto, d’assembler « autre chose » que des contenus journalistiques et de les assembler « autrement ». Un travail inédit d’éditorialisation se déploie.

On assiste alors à une première forme de commoditisation. La commoditisation est le phénomène de dévaluation des produits finis par leur transformation en commodité, c’est-à-dire en une matière première plus ou moins indifférenciée d’un autre produit (Gille, 2009). Dans le format applicatif, l’éditeur insère le produit fini de son éditorialisation originelle (le journal, la chaîne de télévision, la grille de radio) et tout ce qu’il a exigé de travail et de ressources au sein d’un nouveau produit éditorial : l’application. Celle-ci étant composée d’une palette de produits et de services inédits, l’objet publié originel devient une commodité parmi les autres et perd ainsi de sa valeur d’usage et d’échange.

L’homogénéisation des éditorialisations est un autre vecteur de la substituabilité des éditeurs. La course aux smartphonautes et l’imposition des SDK et des bonnes pratiques de conception des applications encouragent l’érosion de la singularité éditoriale. Ainsi que le montrent les illustrations infra, elle se révèle d’abord à travers la similarité formelle des fonctionnalités, puis avec la généralisation de la vidéo, et enfin dans la dépolarisation des modèles historiques de flot et d’édition. Les éléments historiques de différenciation des médias, tels que leur modalité originelle d’agrégation et les formats conventionnels des contenus, s’assimilent au profit d’une éditorialisation qui fait obstacle à leur distinction.

L’homogénéisation des formats est synonyme de réduction de la singularité éditoriale qui définit le métier de l’éditeur, le contrat de lecture entre le producteur et le récepteur, et supporte les modalités de consommation, de captation de l’attention et de création de la valeur des différents médias (Bomsel, 2013). L’homogénéisation formelle déstabilise de facto les protocoles éditoriaux historiques des médias et favorise la substituabilité de ces derniers.


Figure 1. Les similitudes formelles et fonctionnelles des applications de radio, de presse et de télévision (2015, 2020) – France Inter et Le Monde (2015), Les Echos, BFM TV
et Le Figaro (2020)


Figure 2. Les similitudes formelles et fonctionnelles des applications de radio, de presse et de télévision (2015, 2020) – France Inter et Le Monde (2015), Les Echos, BFM TV
et Le Figaro (2020)


Figure 3. Le glissement du modèle de l’édition vers celui du flot, sous l’influence des RSN – Les timelines des applications Le Figaro, Le Monde, Les Echos, Le Parisien9

L’homogénéisation est également lisible dans les notifications. L’écran d’accueil du smartphone est la place de marché des pratiques auxquelles le terminal donne accès. Or, chaque smartphonaute peut y positionner ses applications sur différentes pages en fonction de la fréquence de leur utilisation (Sonet, 2016c). Les moteurs de recherche et les réseaux socionumériques y sont donc largement privilégiés. Il est en revanche plus difficile pour les éditeurs de rester en tête de gondole et de maintenir la fidélisation de leur public indispensable à la monétisation de leur application. La notification vise à recapter l’attention du smartphonaute par le régime de l’alerte (Boullier, 2009) et à rabattre les audiences vers les applications natives des médias. Or, ces alertes respectent toutes le même format, quel que soit le média d’origine, et imposent un texte très court permettant difficilement de se distinguer.

Par ailleurs, la démocratisation du smartphone a favorisé la constitution d’un duopsone puissant. iOS et Android, se partageant les smartphonautes, deviennent en quelques années les deux OS incontournables pour les éditeurs qui doivent développer des applications opérantes dans les deux systèmes d’exploitation, leurs mises à jour successives, et sur les quelques milliers de modèles de smartphones qui embarquent Android. Ce nouveau format est donc générateur de coûts supplémentaires pour les éditeurs qui se dotent d’outils et de compétences inédits et développent de nouveaux contenus, mais pas seulement. Pour intégrer ce canal de distribution, ils doivent en accepter les contraintes. Comme nous l’avons montré dans différents travaux (Sonet, 2014, 2016b, 2016d), la publication d’applications, et particulièrement chez Apple, est l’objet d’une acculturation forcée au respect des outils de conception, des cahiers des charges, aux rapports de force asymétriques construits sur l’arbitraire, l’opacité des règles ou encore la rétention des données des smartphonautes. Lors d’un entretien de recherche (août 2012), le directeur des services d’actualités mobiles d’un opérateur télécom nous explique : « Apple nous dit "C’est ça ou rien." ». Propriétaires des outillages de conception des applications (les SDK), ordonnanceurs des conditions technologique, éditoriale et commerciale de publication et détenteurs de la relation avec les consommateurs, les OS mobiles contrôlent le système de distribution. Ils se comportent dès lors en donneurs d’ordres autoritaires face à des éditeurs mis en position de sous-traitants non rémunérés pour leur contribution au fonctionnement économique de la plateforme. L’imposition de telles conditions de publication participe déjà de l’organisation de la substituabilité des éditeurs, qui sont ici logés à la même enseigne que tous les autres développeurs d’applications, sans égard pour la nature de l’application, son rôle dans l’espace public ou sa notoriété historique.

L’infomédiation socionumérique et l’assimilation aux contributeurs profanes

En juillet 2010, soit trois ans seulement après son ouverture au public, Facebook revendique 550 millions d’utilisateurs et représente la plus importante base de données personnelles jamais constituée. Les annonceurs sont sous le charme de l’algorithme et de la puissance de ciblage du réseau qui démultiplie les relais de publicité, à travers un bouton « j’aime » et la recommandation interpersonnelle. Les recettes publicitaires de Facebook passent de 665 millions de dollars en 2009 à plus de 1,3 milliard fin 2010 (Stone, 2010). La consultation des RSN depuis les smartphones, soutenue par leurs logiques sociales, algorithmiques et ergonomiques ne cesse d’augmenter (Mauduit, 2012). L’actualité y occupe également une place privilégiée. Dans une malléabilité temporelle optimale, les deux domaines permettent et alimentent en effet la promesse de l’accès à un flot d’évènements inédits, renouvelés sans cesse, capables de combler quelques secondes ou d’immerger plusieurs heures (Sonet, 2014, 2016d). La puissance publicitaire annoncée, le volume et la qualité attentionnelle des usages incitent une fois de plus les médias à s’y déployer (Rieder et Smyrnaios, 2012). D’abord sur des plateformes comme Facebook et Twitter, les éditeurs s’engagent ensuite dans la frénésie alimentée par la multiplication des applications socionumériques et leur popularité : Instagram, Snapchat, TikTok, Periscope. L’infomédiation socionumérique exacerbe l’injonction faite aux médias de multiplier les formats pour correspondre aux codes des plateformes. Ils créent leur propre compte et y multiplient les publications.


Figure 4. Le Figaro et Le Monde dans Periscope – Le Monde et Le Mouv’ dans Snapchat


Figure 5. Extraits de stories Snapchat : Le Monde, Le Figaro et Le Parisien

L’intégration des réseaux socionumériques en tant que système de distribution contrôlant les trois piliers de l’affordance accentue la substituabilité des éditeurs. Dans ces espaces, le phénomène est soutenu par les pressions exercées sur les modalités de production et de commercialisation des médias, l’imposition des formats et leur raccourcissement progressif et l’assimilation éditoriale des médias professionnels et des contributeurs profanes.

Tout d’abord, à la nécessité concurrentielle d’être présents dans ces espaces numériques, s’ajoutent les encouragements des plateformes d’infomédiation sociales qui mettent au point des outils dédiés aux médias, censés amplifier la visibilité de ces derniers dans les flux. Dans la droite ligne du système applicatif, l’ouverture de ces outils cache des injonctions techniques, éditoriales et commerciales qui contribuent à la fragilisation des actifs spécifiques des médias. Ainsi, entre 2015 et 2016, Google propose AMP, un outil qui garantit un affichage mobile optimisé des contenus. Facebook lance Instant Articles, puis développe les Lives, fonctionnalité d’abord réservée aux médias pour retransmettre un flux vidéo en direct (Turcan, 2018). Snapchat ouvre le programme Discover, qui permet d’enrichir les stories des éditeurs et de les archiver. Ces outils ont pour condition commune l’hébergement des contenus des médias directement dans les plateformes. Parfois, d’autres exigences bien plus drastiques sont imposées et relèvent ici encore d’un rapport inéquitable de sous-traitance. Ainsi, pour intégrer Discover, les éditeurs doivent se doter de compétences spécifiques. Le Monde, par exemple, y consacre une équipe ad hoc composée de 7 personnes. Le partenariat prévoit la possibilité d’embarquer des publicités au sein mêmes des stories. Mais la régie étant assurée par Snapchat, c’est la plateforme qui fixe le partage des revenus publicitaires à 50/50 et qui conserve de surcroît la liberté d’intégrer ou de sortir les médias du flux général, à sa guise.

Vient ensuite l’imposition des formats et la réduction progressive de l’information à des contenus consommables en quelques secondes. Comme ils l’ont fait pour leurs applications mobiles, les éditeurs, pour intégrer le canal de distribution des RSN en acceptent les règles et contraignent leur éditorialisation socionumérique aux formats imposés par les plateformes. Pêle-mêle : Ici 180 caractères, là un court titre et une photo, ici encore une vidéo de quelques secondes, un live de quelques minutes. Au même titre que tous les autres contributeurs, les éditeurs n’ont d’autres choix que de respecter les caractéristiques formelles des contenus qui sont ensuite agrégés et diffusés dans le flux. Le raccourcissement des contenus, observable dans les publications Facebook, Twitter, mais également dans les stories et autres microvidéos TikTok complexifie la monétisation des contenus et concourt également à leur substituabilité et à celle de leur émetteur. Il est en effet complexe d’exprimer une singularité éditoriale dans un contenu réduit à quelques mots, une image ou une vidéo de quelques secondes.

Enfin, les outils de conception imposent aux éditeurs les mêmes modalités de publication qu’aux smartphonautes, utilisateurs qui les précèdent d’ailleurs dans ces espaces numériques. Publics et médias s’expriment au même endroit, dans les mêmes formats. De surcroît, le registre d’entrée en contact avec les contenus est celui de l’exposition fortuite (Sonet, 2016a ; Goyanes et Demeter, 2020) : les smartphonautes n’y cherchent pas une information, mais parcourent le flux agencé par la plateforme. Or, quels que soient les RSN, la programmation du flux des contenus et l’agencement entre contenus professionnels et contenus profanes relèvent toujours et intégralement de la politique économique de la plateforme traduite dans son algorithme (Badouard, 2017). Ainsi, dans les RSN, la substituabilité s’installe entre éditeurs, mais aussi entre ces derniers et tous les autres pourvoyeurs de contenus, y compris les smartphonautes eux-mêmes.

Dans le giron des RSN, se développe plus tard l’éditorialisation conversationnelle. Afin de s’immiscer dans les pratiques les plus courantes des smartphonautes et de tenter d’engendrer une relation plus engageante avec leur public (Chazelle, 2019), certains médias rejoignent les applications de messagerie interpersonnelle souvent affiliées aux grands RSN comme Messenger ou WhatsApp. Certains s’appuient sur des chatbots, ces robots conversationnels qui permettent de fournir une réponse à l’utilisateur en piochant dans une banque de contenus. C’est le cas de FranceInfo en 2016 qui se lance sur Messenger. Le smartphonaute peut y « discuter directement avec FranceInfo » comme avec un ami, recevoir des actualités personnalisées, sous forme de texte, de photo, de vidéo, le tout sans quitter le giron de Facebook Messenger (Sonet, 2017).


Figure 6. À G., chatbot de FranceInfo (capture 2016) ; à D.,
Le Monde dans Messenger et dans WhatsApp

D’autres utilisent ces espaces de conversation comme des fils d’actualité. L’arrivée d’un message du média est alors signalée au smartphonaute de la même manière que les messages de ses contacts personnels. Formellement, ces messages sont composés d’un titre, d’une photo et d’un lien vers un article. Certains médias autorisent les réponses, sous la forme de commentaires.

Le cas du réseau de messagerie Telegram est particulièrement symptomatique des contraintes qui peuvent être appliquées aux médias dans ces espaces. On y observe deux registres d’éditorialisation des contenus. Le premier concerne Le Monde et Libération qui partagent un compte commun (2393 abonnés au 30 octobre 2020). Discussions et commentaires n’y sont pas ouverts. Chaque message comprend un court texte, une photo, un lien vers l’article intégral dans l’application smartphone ou sur le web et un « aperçu éclair ». Ce dernier n’affiche que le texte et l’illustration principale de l’article dénué de liens et de contenus tiers et hébergé dans Telegram. Le lecteur demeure donc sur la plateforme et ne rejoint pas les supports monétisés des deux titres.

Le second registre d’éditorialisation concerne un nombre plus important de médias : L’Équipe, Le Figaro, Les Echos, Le Parisien, La Croix, L’Obs ou encore Le Point10. Ils proposent des messages comportant un titre, un court texte, une photo et la possibilité de laisser un commentaire. Mais l’on découvre avec surprise que chaque jour vers 16 h, ces médias déposent le PDF intégral de leur édition papier. Les numéros sont accessibles sur plusieurs mois dans les archives de la conversation, sont téléchargeables et partageables par n’importe quel système de communication du smartphone (mail, sms, Whatsapp, Airdrop…). Ils ne bénéficient d’aucune protection de type DRM, privant de fait l’éditeur de revenus d’abonnement ou de vente au numéro.


Figure 7. Libération dans Telegram : messages et aperçus


Figure 8. PDF intégraux de La Croix et L’Équipe dans Telegram

Propriétaires du système de distribution, les plateformes sont en mesure d’imposer aux médias les contraintes formelles de l’éditorialisation, l’hébergement des contenus, le partage des revenus publicitaires, voire l’organisation de la production éditoriale. La dégradation des actifs spécifiques des éditeurs et donc leur substituabilité est ici accentuée par le principe même de cette infomédiation socionumérique qui favorise la confusion des émetteurs d’informations en assimilant la production des médias traditionnels à celle des smartphonautes profanes.

Confrontés à des impératifs économiques internes de reconquête d’audiences et au développement par les plateformes d’infomédiation d’outils censés favoriser leur visibilité et leur trafic, les éditeurs intègrent des plateformes d’infomédiation qui déterminent l’affordance – ce que l’on peut y faire et comment – et concourent à l’organisation de leur substituabilité. Leur dissémination « multicanal » engendre des coûts inédits de production de contenus ad hoc mais surtout conduit les médias à dissocier leur contenu d’un système de distribution : les modalités d’agrégation, les formats, les modes d’interaction avec le public, la connaissance même des publics, y sont contrôlés par les gestionnaires de plateformes.

Un mouvement de méta-éditorialisation

La multiplication des modalités d’éditorialisation a pour effet de renforcer la saturation informationnelle et l’atomisation des audiences et de l’attention du smartphonaute qu’il convient donc de recentraliser. En ce sens, et après avoir imposé aux médias les conditions de l’éditorialisation de leurs contenus et organisé leur substituabilité, les principales plateformes déploient des stratégies de méta-éditorialisation. L’information est un produit très attractif pour les industries de l’attention. Elle permet en effet de générer fidélisation, alertes et réactions monétisables. Aussi, les plateformes déploient leurs propres offres centralisées. Dans ces nouveaux espaces, les smartphonautes sont exposés à des informations sélectionnées, hiérarchisées, organisées et prescrites par les gestionnaires de plateformes, mais non produites par ces derniers. Ces informations sont le produit d’une primo-éditorialisation réalisée par un média originel dans différents espaces numériques. Les plateformes procèdent donc à ce que nous qualifions de méta-éditorialisation : un phénomène d’absorption du travail d’éditorialisation réalisé par les médias, de commoditisation des valeurs économiques et de court-circuitage de la fonction de prescription (Sonet, 2019a, 2019b). L’analyse des formats éditoriaux nous permet de mettre en lumière les ressorts et les implications de ce phénomène qui se manifeste dans les RSN, les widgets, les applications d’actualité, et plus récemment dans les assistants vocaux. Autant de systèmes de distribution d’information, qui, en s’appuyant sur la substituabilité des éditeurs et sur leur maîtrise des termes de l’affordance (technologies, usagers, choix de gouvernance), ne se contentent plus d’héberger ou d’agréger. Ils éditorialisent, centralisent la consommation et confisquent la prescription de l’information.

Les RSN, premiers dispositifs à investir le push

Les bruyants scandales autour des élections américaines (2016, 2020) ou encore du Brexit (2016) sont des exemples flagrants de la puissance de prescription acquise par les RSN. Nous l’avons vu, les RSN contribuent à la substituabilité des médias entre eux et entre tous les autres producteurs de contenus. Mais c’est leur modalité d’agrégation des contenus qui leur permet d’opérer un mouvement de méta-éditorialisation et dès lors de devenir prescripteurs d’information.

Les RSN disposent de la structure technologique qui rassemble les publications provenant d’une multitude d’émetteurs (médias, amis, influenceurs, marques) et qui les agence sous la forme d’un flot continu. Ce flux est éditorialisé par la plateforme à travers son algorithme et les stratégies que ce dernier supporte et il s’impose au smartphonaute. Il s’agit donc d’un régime dit de push. Assurant simultanément la programmation des contenus et leur diffusion au smartphonaute, le RSN devient prescripteur, au même titre qu’une chaîne de télévision (Benghozi et Paris, 2003). C’est d’ailleurs précisément en ces termes que le PDG de Snapchat France présente son métier en octobre 2020 : « Nous proposons beaucoup de contenus et nous avons voulu faire un focus sur ce sujet à l’attention des médias en organisant comme les chaînes de télévision une présentation de notre grille de programmes » (Therin, 2020). Dans ce régime, c’est l’agrégation temporelle – autrement dit l’assemblage des contenus et leur délivrance dans un flux – qui est l’objet publié porteur de la valeur d’usage et d’échange et non les contenus ou leurs producteurs pris individuellement (Bomsel, 2013). Facebook, qui avait décidé de favoriser les contenus profanes au détriment des médias dans son flux, permet à nouveau à l’utilisateur de revenir à un affichage uniquement antéchronologique. Néanmoins, la plateforme parvient à en décourager les smartphonautes en exigeant le paramétrage à chaque connexion à l’application. À défaut de cette manipulation systématique, c’est le mode « programmé » qui est réactivé. Il reste à l’utilisateur la liberté de s’attarder ou non sur un contenu, mais pas d’y être exposé (Sonet, 2014, 2016d). En effet, l’utilisateur en choisissant son programmateur, ici le RSN, lui délègue le choix des contenus et leur assemblage. La plateforme absorbe la valeur du travail de primo-éditorialisation des contenus réalisés par les éditeurs et la concentre dans la pertinence de la programmation : devenu prescripteur, le RSN s’impose en émetteur des informations au détriment des primo-éditeurs. Dès lors, comme on a « vu ceci sur TF1 », on a « lu cela sur Facebook ».

La centralisation de l’attention sur l’écran d’accueil : les widgets

Comme nous l’avons vu avec les notifications, l’écran d’accueil du smartphone, tête de gondole attentionnelle, est un objet de convoitise des plateformes. La mise à jour d’iOS 10 sur des millions d’iPhones en septembre 2016, est une manifestation criante du rôle crucial de la maîtrise conjointe des termes de l’affordance et du régime du push (Sonet, 2016c). S’appuyant sur la capacité de l’ergonomie de ses interfaces à provoquer des actions spécifiques, Apple modifie le résultat d’un geste relevant de l’automatisme : le balayage vers la droite. Ce coup de pouce, répété depuis neuf ans par les possesseurs d’iPhones et d’iPads, déverrouillait l’écran et ouvrait la première page d’applications. Après la mise à jour de l’OS, ce geste impose soudain un écran d’accueil agencé par Apple sur lequel apparaissent des widgets : des raccourcis applicatifs affichant une version limitée des informations proposées par leur application mère11. News, le widget d’Apple installé d’office, sélectionne et diffuse – et partant prescrit – uniformément à tous les possesseurs d’iPhone et d’iPad, une sélection d’actualités retenue et éditorialisée par la firme. Ainsi, on y trouve quatre titres d’articles composés de 60 à 100 signes et d’une illustration. Ils ne sont pourvus ni du logo ni de la marque du média, la seule provenance indiquée est celle du site, en gris clair. La logique du renouvellement de l’affichage n’est pas connue. Les articles proviennent d’une liste de 20 à 25 médias reconnus (presse, TV, radio), sans que l’utilisateur ne puisse ni choisir ses sources ni déterminer de paramètres (thèmes, sources, fréquence, etc.). Si l’appareil est géolocalisé, le widget propose parfois un article de la PQR. En France, l’application native Apple News n’existant pas encore, l’ouverture d’un article dirige vers la page du site web du média ou vers son application. En France, les visites générées par ce widget peuvent représenter 30 à 40 % de l’audience de certains médias, mais placent les « élus » sous une épée de Damoclès. Le 12 avril 2018, Marianne en dénonce les travers dans un article qui déroule l’opacité du référencement, la sélection discrétionnaire des titres et les implications sur les audiences (Girard et Saviana, 2018). « Apple News a une audience potentielle en France de plus de dix millions d’utilisateurs, autant de personnes que TF1, France 2 et M6 à une heure de grande écoute », rappelle l’article. Ainsi, lorsqu’Apple décide unilatéralement et sans sommation de supprimer un titre de sa liste, les audiences et les revenus mobiles s’effondrent. Symptôme de la puissance du dispositif, la violence des conditions de distribution, à défaut d’unir les éditeurs, provoque division, omerta : « Rares sont les cadres de grands groupes de presse qui osent critiquer ouvertement Apple. Pour réaliser cet article, nous avons dû promettre l’anonymat à de nombreux témoins, qu’ils bénéficient d’Apple News et souhaitent éviter de fâcher la firme ou qu’ils craignent de ne jamais y revenir. » Une telle posture autorise Apple à imposer ses conditions : l’effacement de la marque-média des primo-éditeurs dont les nom et logo sont remplacés par une mention grisée de leur site web permet à la firme de s’octroyer le statut de prescripteur. En effet, visuellement, c’est la marque du programmateur qui s’impose. Ainsi, le widget mobilise le régime du push qui positionne la plateforme en prescriptrice d’informations et traduit sa volonté et sa capacité à se constituer en guichet privilégié d’accès à l’information, dès l’écran d’accueil, pour l’ensemble des possesseurs d’iPhones. La firme a potentiellement accès à un milliard d’iPhones actifs dans le monde en 2020 (Cimino, 2020).

Les applications d’actualités d’Apple et de Google

Les applications d’information d’Apple et de Google illustrent plus clairement encore le phénomène de méta-éditorialisation (Sonet, 2018, 2019a). Les contenus, mais aussi les médias originels y sont « réempactés » et centralisés dans un nouveau produit informationnel autonome, lui-même éditorialisé par un travail de sélection, de hiérarchisation et de mise en forme.

Ancien agrégateur de contenus d’un des plus puissants infomédiaires historiques, Google Actualités12 revisite profondément son application en 2017. La version contemporaine dévoile le travail de méta-éditorialisation. L’application repose sur quatre onglets : À la une qui s’ouvre par défaut, Pour vous, Favoris et Kiosque, la boutique d’applis dans l’appli13.

La rubrique à la une assure la prescription. Google Actualités indique clairement que « les utilisateurs dont la langue et le pays sont identiques voient les mêmes sujets ». Elle programme et diffuse cinq sujets dans des carrousels de sept articles, tweets, ou vidéos. La firme explique que l’éditorialisation (mise en page, présentation et ordre des contenus) est fonction d’abord de la popularité, de la qualité, de la pertinence des contenus, puis éventuellement de l’activité du smartphonaute au sein des services Google. Le tout est soutenu par une curation humaine : une équipe « responsable de l’expérience-produit peut ajouter des sujets temporaires à l’occasion d’événements importants comme une élection ou les Jeux Olympiques » (Google, 2020).


Figure 9. L’application Google Actualités France : la boutique d’applications interne, l’application de L’Humanité, À la une, Kiosque thématique

Apple News dans sa version applicative (sortie en 2015) est disponible au Royaume-Uni, aux États-Unis et en Australie. Approvisionnée par plusieurs journaux partenaires (Wall Street Journal, Wired, etc.), elle éditorialise des stories thématiques, un carrousel de vidéos, des Morning, Afternoon et Evening Digests et des Conversation Starters. Apple ne se contente donc pas d’y agréger des titres de presse.


Figure 10. L’Application News d’Apple News – Royaume-Uni (captures 2018)

Au service de cette méta-éditorialisation se trouve une équipe composée d’anciens journalistes et de rédacteurs en chef. Ainsi, selon un « Smell Test », la rédactrice en chef d’Apple News, Lauren Kern, et son adjoint, ancien rédacteur en chef au New York Times, sélectionnent notamment les articles qui composeront la une de l’appli (Nicas, 2018). Fin 2018, l’application anglophone est consultée en moyenne par 90 millions de personnes, ce qui fait dire au New York Times que sa rédactrice en chef « est tranquillement devenue l’une des figures les plus puissantes des médias anglophones. Les histoires qu’elle et ses adjoints sélectionnent pour Apple News reçoivent régulièrement plus d’un million de visites chacune. » La volonté de prendre en charge les fonctions politiques et sociales des médias est clairement assumée chez Apple News, comme le déclare sa rédactrice en chef : « Nous avons une conscience profonde qu’une presse libre robuste est essentielle pour un public informé, et qu’un public informé est essentiel pour une démocratie fonctionnelle, et qu’Apple News peut y jouer un rôle14. »

Le développement des assistants vocaux

Enfin, plus récemment apparaissent de nouveaux guichets de centralisation, de méta-éditorialisation et de prescription de l’information, les assistants vocaux. Ils accompagnent le smartphonaute dans des contextes où il ne peut ni manipuler ni regarder un écran, en lui offrant d’interagir vocalement avec les dispositifs et les contenus (Sonet, 2019b). À l’échelle mondiale, Amazon (Alexa), Google et Apple (Siri) se partagent actuellement le marché15. Les assistants vocaux embarqués dans les smartphones, activés par défaut, sont les plus utilisés. Les pratiques les plus fréquentes y sont la recherche d’informations et la météo (Hadopi-CSA, 2019).

Suivant la logique des boutiques d’applis mobiles, les plateformes ouvrent ce nouveau canal de distribution aux médias qui s’y déploient sous la forme de skills ; de petites applications conçues pour fonctionner par commande vocale et qui permettent de distribuer un contenu audio. Radio France, Les Echos, Le Parisien, Le Figaro, 20 minutes, L’Équipe, entre autres, rejoignent les rangs des boutiques de skills.

Comme pour l’homogénéisation des applications, la dégradation de la singularité éditoriale des médias vient d’abord de l’imposition des formats par chaque plateforme. Pour Apple, il faut produire des podcasts natifs (Chan-Olmsted et Wang, 2020). Google privilégie des textes courts lus par des voix de synthèse qui peuvent également lire les titres de la une (Eutrope, 2018). Pour toutes les plateformes, le contenu doit être court. Ici 300 signes, là une minute (Mind Media, 2019). Dans le domaine vocal, c’est Alexa d’Amazon qui, pour l’heure, orchestre la plus forte méta-éditorialisation. En effet, les médias doivent pourvoir la plateforme de contenus permettant d’alimenter les Flash Briefings que contiennent les routines des utilisateurs. Les éditeurs produisent donc des capsules, sortes de résumés multithématiques de l’actualité, idéalement lus par une voix humaine, et remis à Amazon chaque jour par un flux RSS. Format méta-éditorialisé des assistants vocaux, à l’instar des Morning Digests d’Apple News, une routine permet d’écouter un condensé de l’actualité, de météo, de trafic assemblé par la plateforme, alimenté par les contenus des médias et délivré par la plateforme elle-même, au moment déterminé par l’utilisateur ou par la commande « Alexa, lance ma routine ». Par l’expression même de la commande, la plateforme se substitue aux éditeurs comme source de l’information.


Figure 11. L’information dans Alexa : les skills des médias (à G.) ;
Routines et Flash (au centre) et exemple de résultat non sourcé d’une requête orale (à D.)

Le phénomène de méta-éditorialisation vocale est également supporté par l’absence de repère de la marque-média et l’imposition d’un référencement exclusif. Renforçant la substituabilité des éditeurs et assurant à la plateforme la maîtrise de la fonction de prescription des contenus, cela se révèle dans les formats de réponses aux requêtes vocales. D’une part, l’oralité reverticalise la communication. En effet, au contraire d’un écran, il est impossible de parcourir visuellement plusieurs sources simultanément dans une liste de résultats et de faire un choix parmi ceux-ci. Ceci rend cardinale la problématique du référencement, puisqu’une requête est à réponse unique. Or, il est impossible de s’assurer d’être la source privilégiée de la plateforme et encore moins d’être expressément cité par le questeur. Les éditeurs sont enjoints de constituer des banques de réponses à des questions potentielles. Or, la réponse délivrée au smartphonaute n’indique pas systématiquement la source, ce qui, au-delà de complexifier la mémorisation et la fidélisation de la marque média, contribue surtout à transférer la force de prescription à la plateforme : pour l’utilisateur, c’est Alexa qui répond.

Dans ces espaces, les éditeurs, qui n’ont pas la maîtrise des données contextuelles et personnelles, ne peuvent anticiper les attentes du smartphonaute afin de lui fournir un contenu pertinent, contextualisé et potentiellement monétisable. À l’inverse, Google, Alexa, et Siri, en opérant un travail de méta-éditorialisation par le truchement de leurs digests et routines, en taisant à leur guise la marque-média source de l’information et en disposant des données nécessaires, sont en mesure d’offrir à l’auditeur une information ambiante personnalisée et de s’en octroyer l’origine. Ce mécanisme est renforcé par le fait que ces dispositifs (assistants vocaux ou enceintes connectées) commandent à l’utilisateur de s’adresser directement à eux par leur nom : « Dis, Siri » ; « Google ? » ; « Hey Alexa ».

Ainsi, les grandes plateformes, en déployant des stratégies de méta-éditorialisation, dévoilent leurs ambitions et leurs capacités à se comporter en médias de masse exploitant des contenus issus d’une forme préexistante d’éditorialisation qu’ils absorbent. Bénéficiant de parcs d’utilisateurs gigantesques et captifs, elles développent ainsi leur capacité à prendre en charge la fonction d’agenda setting historiquement dévolue aux éditeurs de la filière presse et information.

Conclusion

L’analyse de l’évolution des formats de l’information mobile, depuis les premières applications natives jusqu’aux récents dispositifs méta-éditoriaux des plus puissantes plateformes, met en évidence la progressive érosion de ce que nous pourrions qualifier « d’autodétermination » des éditeurs de la filière presse et information. Aubaine a priori pour réagréger des audiences, l’éditorialisation destinée aux plateformes mobiles et socionumériques se transforme en dépendance pernicieuse pour les médias. Désormais contraints d’y déverser leurs contenus, les éditeurs n’ont aucune maîtrise de ces systèmes tiers de distribution organisant leur substituabilité.

La diversification et la mutation des formats nous révèlent le déséquilibre des rapports de force que les plateformes parviennent à instaurer au détriment des éditeurs. Les manifestations d’un pouvoir de contrainte sont légion. Là, Facebook modifie son algorithme pour privilégier les contenus sociaux et met en péril plusieurs médias. Ici, News décide arbitrairement de la sélection des médias qui apparaissent dans le widget. Constituant un oligopsone tout à la fois incontournable et indispensable, maîtrisant les termes de l’affordance que sont les usages, la structure technologique et les conditions industrielles, les plateformes sont en mesure d’imposer les règles du jeu, y compris au regard des choix de gouvernance. Elles engagent les éditeurs dans une distribution duale dans laquelle ils sont incités à se comporter comme s’ils ne possédaient pas d’actifs de marque. Dans une forme de paradoxe, ces outils mis à la disposition des médias pour amplifier leur visibilité, leur trafic et l’interaction avec leurs publics, favorisent une consultation des médias hors de leurs propres supports et partant, un éloignement du smartphonaute et une dégradation de leur modèle économique. La structure de marché et les rapports de force instaurés par les gestionnaires de plateformes sont essentiels à la compréhension des enjeux de l’évolution de l’information au prisme du mobile. L’oligopsone d’infomédiaires est certes variable en fonction des modes et certaines applications perdent parfois leur ascendant sur les éditeurs, mais il est toujours renouvelé. L’énième innovation exhorte les éditeurs à fabriquer les formats compatibles avec ce nouveau système de distribution. Les médias sont ainsi aspirés dans un cycle délétère où l’atomisation des recettes publicitaires se dispute leur assèchement au profit de ces mêmes infomédiaires supposés originellement supporter la réagrégation des audiences. Google et Facebook, mais aussi Snapchat, comptent parmi les plus grosses régies publicitaires en ligne. Les éditeurs, qui leur confient déjà leurs contenus – contre une promesse de trafic finalement accaparée par les infomédiaires eux-mêmes – sont progressivement tentés de leur confier la commercialisation de leur inventaire publicitaire et dès lors contraints de partager aussi leurs revenus.

Au-delà de la détérioration des termes de l’équation économique des éditeurs qui rétrogradent dans la chaîne de valeur, ce qui doit nous interpeller dans les formats que nous avons étudiés, c’est précisément la démarche de confiscation de la fonction de prescription qui permet historiquement aux médias d’exercer leurs rôles de supports démocratiques en insérant des événements dans l’espace public. Ces firmes concentrent aujourd’hui une force de frappe jamais égalée par les médias traditionnels jusqu’ici. La préemption de la prescription d’information et partant des fonctions politiques et sociales des médias, mouvement stratégique actuel des plateformes porté par leurs formats méta-éditorialisés, exacerbe le risque de réduction du pluralisme, du droit à l’information et de la variété des sources, et ouvre la voie à des infrastructures en puissance déjà capables de se substituer aux législateurs.  

Virginie Sonet est maîtresse de conférence à l’Université Paris Nanterre.




Notes

1

110 étudiants en sciences de l’information et de la communication en classe de L1, L2, L3 et M1, à l’université Paris Nanterre.



2

Nous mobilisons ici la délimitation mise au point par les auteurs, c’est-à-dire les médias produisant des contenus journalistiques dans la filiation de la presse écrite auxquels se joignent dans les espaces numériques les contenus journalistiques initialement conçus pour la télévision ou la radio (p. 77).



3

Nous ferons référence aux articles, communications et thèse au fil de notre développement. Ces travaux relèvent d’une méthodologie plurielle mise en œuvre depuis 2009. Les corpus accumulés nous permettent aujourd’hui de nous appuyer 1) sur un matériel empirique issu de l’observation de l’offre médiatique mobile et d’un recueil de témoignages dans la presse assuré par une veille systématique, 2) sur une analyse des interfaces d’information mobile et le décorticage des stratégies des plateformes et des tactiques des médias, 3) sur une analyse des usages du smartphone dans les pratiques d’information et de divertissement et 4) sur des entretiens avec des professionnels tout au long de la période.



4

Il faut entendre ici l’organisation de la substituabilité comme le phénomène économique qui conduit des agents originellement différents à devenir indifférenciables. Dépossédés de la spécificité de leur fonction ou de leurs actifs (marque, capacité de production, fonction sociale ou connaissance des consommateurs par exemple), ils sont rendus interchangeables dans la production de valeur économique pour le système qui en tire profit.



5

Les Software Development Kits sont les outils informatiques qui permettent de développer des applications adaptées à leur OS propriétaire et exclusif chez Apple, ouvert et gratuit chez Google.



6

13e Cfpj Lab, 13 avril 2011.



7

Ce document d’Apple destiné aux développeurs fournit les recommandations de conception des applications.



8

Pour publier une application dans iOS, une validation technique et éditoriale est réalisée par la firme pour s’assurer que l’ensemble des « conseils » de conception fournis aux développeurs (Guidelines) sont respectés. Ce parcours semé d’injonctions de validation d’une application jusqu’à sa mise à disposition dans les boutiques des OS mobiles (Apple) a fait l’objet d’un article (Sonet, 2016b).



9

Sauf précision contraire, toutes les captures d’écran de cet article ont été réalisées par l’auteure en 2020.



10

Les titres affichent une moyenne de 470 abonnés (de 1786 pour Le Figaro à 69 pour La Croix). Une moyenne de 40 vues par message, très peu de commentaires, la plupart des messages n’en ont aucun.



11

Le Monde, France Info, L’Équipe et d’autres se saisissent de ce nouveau format qui soutient peu ou prou la même tactique que les notifications. Pour apparaître sur l’écran, le widget d’un média doit faire l’objet d’une installation spécifique de la part de l’utilisateur dans les réglages de l’appareil.



12

Dans iOS, cette appli propose un widget installable sur l’écran d’accueil qui assure la fonction de vitrine.



13

On y trouve des axes thématiques et des rubriques alimentées par 1500 sources, mais aussi des applis de médias ayant conclu un contrat de licence avec Google (20 Minutes, Libération, Le JDD, France 24, Geo, Gala, L’Humanité, etc.). Énième canal de distribution pour les éditeurs, ces applis dans l’appli sont intégralement hébergées dans Google Actualités dans un format ad hoc accélérant l’affichage.



14

Traductions de l’auteur d’après l’article de Nicas (2018).



15

Selon Strategy Analytics – Voicebot.ai – 4e trimestre 2018.






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