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Nouvelle série, n°7

2nd semestre 2021

RECHERCHES

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CET ARTICLE






Portrait de la formation sur les risques et perceptions des journalistes sur son utilité durant la guerre en Afghanistan

Aimé-Jules Bizimana, Université du Québec en Outaouais
Benoit Gauthier, Université du Québec en Outaouais

Résumé

Cet article a comme objectif de documenter les expériences de formation au reportage en environnement hostile des journalistes qui ont été accrédités par l’armée canadienne pour couvrir la guerre en Afghanistan entre 2002 et 2011 et d’analyser les perceptions des journalistes sur l’utilité de la formation aux risques. À partir de témoignages par entrevues semi-dirigées, cette étude de cas démontre la standardisation de la formation aux risques pour les grands médias à travers principalement des firmes privées. La formation comme stratégie de gestion des risques confère aux journalistes un savoir-faire au moyen de compétences pratiques et de techniques spécifiques et un savoir-être à travers un état mental d’alerte, une conscience de soi et une conscience de l’environnement sur le terrain.

Abstract

The objective of this article is to document the training experiences on reporting in hostile environments of journalists who were accredited by the Canadian military to cover the Afghanistan war between 2002 and 2011 and to analyze journalists' perceptions on the usefulness of risk training. Based on testimonials through semi-structured interviews, this case study demonstrates the standardization of risk training for the major media outlets mainly through private companies. Training as a risk management strategy confers journalists with practical know-how through specific skills and techniques and mental know-how through a mental state of alert, self-awareness and situation awareness in the field.

DOI: 10.31188/CaJsm.2(7).2021.R145





L

a sécurité est devenue un enjeu majeur du journalisme national et international. Divers indicateurs traduisent les difficultés inhérentes à l’exercice du métier de journaliste. Entre 1992 et 2021, les données du Comité pour la protection des journalistes (CPJ) indiquent un nombre de 2083 journalistes et travailleurs des médias tués. Dans la compilation du CPJ, la politique est le domaine de couverture le plus dangereux avec 684 journalistes tués suivi par la guerre avec 587 journalistes tués. En tant de paix comme en temps de guerre, la violence est une réalité du journalisme avec des arrestations et des exactions perpétrées par des États, des groupes armés, des groupes criminels et des individus.

Depuis plusieurs années, ce contexte délétère a poussé les rédactions médiatiques, les organisations de défense des droits journalistiques et les organisations internationales à envisager des mesures de protection contre les dangers et les risques du journalisme. Le Guide de sécurité des journalistes du Comité pour la protection des journalistes note :

Les décisions prises par les journalistes sur le terrain ont une incidence directe sur leur sécurité et celle des autres. Les risques inhérents à la couverture de la guerre, des troubles politiques et de la criminalité ne peuvent jamais être éliminés, mais une planification et une évaluation prudentes des risques peuvent atténuer les dangers (CPJ, 2019).

L’évaluation des risques devient de plus en plus incontournable pour une pratique sécuritaire du journalisme dans les contextes local et international. Différents guides pratiques évoquent la formation en matière de sécurité et offrent des conseils pour les journalistes travaillant dans des environnements hostiles (RSF et UNESCO, 2017 ; CPJ, 2012 ; Dart Center, 2007 ; 2003). Une étude internationale de l’International News Safety Institute (INSI) a noté que la grande majorité des journalistes et personnel des médias estime que la formation a changé de manière significative entre 2004 et 2014 (Clifford et INSI, 2015). L’étude souligne que les pourvoyeurs de formations se sont multipliés et que les formations sont devenues plus spécialisées avec des cours plus diversifiés qui incluent des sujets entre autres comme les désastres environnementaux et la sécurité numérique.

Cet article a comme objectif de documenter l’état de la formation au sein du contingent journalistique qui a couvert la mission canadienne durant la guerre en Afghanistan et d’analyser la vision des journalistes sur l’utilité de la formation préparatoire qu’ils ont reçue. Nous tenterons de répondre aux deux questions suivantes :

Q1 : Quelles sont les expériences de formation au reportage en environnement hostile vécues par les journalistes qui ont été accrédités par l’armée canadienne en Afghanistan entre 2002 et 2011?

Q2 : Quelles sont les perceptions des journalistes accrédités sur l’utilité de la formation aux risques?

Il n’existe pas de vocable français stabilisé pour désigner le « Hostile Environment and First Aid Training ou HEFAT1) ». C’est une formation dispensée généralement au personnel des médias mais aussi à d’autres catégories de professionnels qui œuvrent dans des zones hostiles ou de conflits comme les employés d’ONG et d’organismes de charité ou des employés de services consulaires ou de sécurité. Nous avons choisi ici le terme « formation au reportage en environnement hostile » qui est plus proche de la réalité journalistique et qui traduit mieux l’évolution du domaine. Le reportage de guerre ou en zones hostiles est l’une des spécialisations du journalisme (Marchetti, 2002) avec ses exigences propres. Cet article apporte un nouvel éclairage sur l’utilité de la formation et sa place dans le débat général sur les risques du journalisme.

Les risques du journalisme en zones hostiles

La recherche universitaire s’est intéressée aux enjeux touchant à la sécurité des journalistes dans l’exercice de leur profession. Des tendances inquiétantes se dessinent avec une multitude de meurtres et de pressions dans différents contextes (Cottle, Sambrook et Mosdell, 2016). Le journalisme de guerre est l’un des créneaux qui a attiré beaucoup l’attention des chercheurs. « La couverture des conflits internationaux a un statut particulier dans la collecte de l'information et le reportage où le personnel des médias rapporte sous des conditions de danger physique et psychologique » (Tumber, 2002, p. 251). Les journalistes sont confrontés à une diversité de risques qui ont des effets induits pendant et après les conflits (Bizimana, 2006). Les terrains de guerre sont des environnements hostiles par nature où se pratique « un journalisme sous le feu » (Tumber et Webster, 2006 ; Tumber, 2002). Les journalistes peuvent être victimes de leurs camps, peuvent être victimes d’enlèvements, peuvent être ciblés en raison de leur apparence ou pour avoir braqué leurs caméras au mauvais endroit (Tumber, 2006, p. 440). Dans différents conflits, les correspondants de guerre ont péri de manière accidentelle ou de manière délibérée (Moorcraft et Taylor, 2008, p. 237). Chaque conflit est néanmoins caractérisé par des conditions d’exercice propres. Le reportage intégré (embedded) dans l’environnement opérationnel militaire induit des risques conjoncturels qui ont des effets directs et indirects sur la santé physique et mentale (Bizimana et Gauthier, 2021).

L’aspect psychologique des risques du journalisme a fait l’objet d’un certain nombre de travaux. Himmelstein et Faithorn (2002) ont examiné les mécanismes d’adaptation d’ordre mental des journalistes dans des environnements de stress. Feinstein, Owen et Blair (2002) ont constaté que les journalistes de guerre souffraient plus de difficultés psychiatriques que les journalistes qui ne couvrent pas la guerre avec une prévalence élevée du Trouble de stress post-traumatique (TSPT) et de dépression. À partir d’un échantillon de 85 journalistes intégrés et de journalistes indépendants (unilatéraux) qui ont couvert la guerre en Irak, Feinstein et Nicolson (2005) ont confirmé les précédents résultats sur la dépression, le stress psychologique et le TSPT mais n’ont pas constaté de différences entre les deux groupes. Feinstein a mené une enquête plus large et recueilli plusieurs témoignages de « journalistes de guerre ». Pour ceux et celles qui côtoient la mort, « ce n’était pas la mort elle-même mais bien ses conséquences sur les vivants qui constituaient les souvenirs les plus marquants et les plus dérangeants » (Feinstein, 2013, p. 35). Cette avenue de recherche s’est aussi intéressée aux situations traumatiques à travers le concept de « traumatisme lié au stress d’affectation » (Buchanan et Keats, 2011), les facteurs personnels (Backholm et Björkqvist, 2010), les facteurs organisationnels et les processus décisionnels (Greenberg et al., 2007), les réseaux de soutien (Greenberg et al., 2009) ainsi que les stratégies d'adaptation (Novak et Davidson, 2013 ; Buchanan et Keats, 2011).

L’évolution du métier de correspondant de guerre est caractérisée par l’essor d’une « culture de la sécurité » où il faut « penser, planifier et parler davantage de sécurité sur le terrain » (Palmer, 2018, p. 2). La profession journalistique est marquée par une prise de conscience sur les dangers et les risques encourus par les hommes et les femmes qui la pratiquent. « L’importance de la sécurité a sans doute accru l'appréhension des organes de presse, que le risque ait augmenté ou pas » (Tumber et Webster, 2006, p. 117).

La formation comme stratégie de gestion des risques

La formation est une stratégie de gestion des risques auxquels les journalistes s’exposent sur le terrain. La protection des journalistes inclut à la fois des stratégies discursives sur le plan international et des stratégies pragmatiques comme la formation sur l’environnement hostile (Lisosky et Henrichsen, 2009, p. 131). Dispensée par des firmes privées mais aussi parfois par les armées et d’autres organisations, « la formation des journalistes vise à prévenir ou à atténuer aussi bien les risques liés à la sécurité physique que les effets psychologiques » (Bizimana, 2006, p. 101).

La préparation psychosociale implique la reconnaissance des risques, la gestion des risques, le développement de compétences en auto-évaluation, la conscience des conséquences des missions prolongées, la gestion de la consommation de substances, avoir des outils pour maintenir sa santé, gérer ses émotions et comportements dans diverses situations, et d'autres facteurs (Osofsky, Holloway et Pickett, 2005, p. 286).

Un certain nombre de travaux ont suggéré plus de formation pour les journalistes qui couvrent les crises ou les traumatismes. Une étude portant sur des étudiants en journalisme aux États-Unis a exposé leur impréparation et leur faux sentiment de sécurité en rapport avec les situations traumatiques :

Leurs commentaires ont également aidé à soutenir l'idée que la formation sur le traumatisme est non seulement nécessaire, mais que les étudiants eux-mêmes la veulent. Ils ne savent pas comment faire face à leurs réactions émotionnelles et ils ne réalisent pas qu'une réaction émotionnelle est humaine et correcte (Dworznik et Grubb, 2007, p. 202).

Toujours aux États-Unis, seuls 20% des journalistes sondés se sont dits « très bien préparés » pour faire face aux victimes d'événements violents ou traumatisants (Beam et Spratt, 2009, p. 433). Cette étude quantitative a avancé que le soutien organisationnel « peut être critique pour aider les journalistes à faire face efficacement aux traumatismes » (Beam et Spratt, 2009, p. 432). Une autre étude américaine s’est intéressée au lien entre l’éducation dans les curricula journalistiques et la littératie sur le traumatisme et a constaté un manque de formation au niveau universitaire (Seely, 2020). « Certains journalistes ont remarqué dans des interviews que certaines choses s'apprennent mieux "sur le tas" que dans une salle de classe » (Seely, 2020, p. 126).

Dans un contexte où les médias étaient critiqués à propos de leurs attitudes envers les victimes de crimes, les écoles en journalisme aux États-Unis ont initié dans les années 1990 des protocoles de formation sur la manière de couvrir et de gérer les événements d'actualité catastrophiques majeurs : « Le traumatisme devient alors une façon de parler du travail du journalisme qui reconnaît sa participation et sa solidarité potentielle, dans les contextes sociaux de violence » (Rentschler, 2010, p. 455-456). Cependant, les représentations discursives et iconographiques des manuels de formation ne sont pas exemptes de stéréotypes de sexe et de genre (Rentschler, 2007). Il faut rappeler ici que l’événement du 11 septembre 2001 a joué un rôle crucial dans l’évolution du journalisme américain vers une éducation liée aux traumatismes et aux émotions (Tumber et Prentoulis, 2003, p. 227-228). Ailleurs aussi, la multiplication des attaques envers les journalistes a provoqué une augmentation des mesures de formation à la sécurité (Høiby et Ottosen, 2019).

Une évaluation d’un petit échantillon de manuels de formation a révélé certaines différences entre les manuels à vocation internationale et des manuels à vocation locale et a conclu en soutenant que la formation devrait tenir compte à la fois des aspects personnels comme par exemple le genre, la religion et l’ethnicité ; des contextes locaux et des facteurs organisationnels (Høiby et Garrido, 2020). À partir d’une recherche aux Philippines, Høiby (2020, p. 81) explique que la différenciation des menaces signifie que la formation à la sécurité doit être adaptée à la pratique locale du journalisme et que l’approche universelle n’est pas la meilleure voie.

Une étude sur les photographes de guerre australiens a noté que la formation et l’aide psychologique (counseling) avaient beaucoup progressé depuis les années 1990 mais que, paradoxalement, le bien-être des photographes était compromis par d’autres facteurs (Anderson, 2018). En Australie, un procès historique intenté contre un journal par un photographe qui a souffert de TSPT a été l’un des facteurs qui ont poussé les médias à offrir plus de formation et de soutien à leurs employés qui couvrent les événements traumatiques (Ricketson, 2007).

Méthodologie

Cette recherche qualitative exploite les données d’une étude de cas plus large sur la couverture médiatique de la guerre en Afghanistan et les relations armée-médias durant la mission canadienne entre 2002 et 2011. L’unité d’analyse qui tient lieu de cas (Yin, 2003) est le « Programme des journalistes intégrés » (PJI), le dispositif médiatique qui a été mis en place par l’armée canadienne en Afghanistan. Les questions portant sur la formation ont été posées uniquement aux 63 journalistes (47 hommes et 16 femmes) et à 2 experts en gestion des risques avec lesquels nous avons réalisé des entrevues semi-dirigées d’environ une heure chacune sur leurs expériences. Les verbatim des entrevues ont été codés à l’aide du logiciel Atlas.ti2. Les résultats montrent quels journalistes ont été formés, par qui et leur vision sur les acquis et l’utilité des formations reçues.

Les expériences de formation

La grande majorité des correspondants des médias canadiens et internationaux qui ont participé à cette étude (53 sur 63, plus de 84%) ont suivi une formation au reportage en environnement hostile. La nature des formations varie en fonction des pourvoyeurs qui peuvent être privés ou militaires. En général, elles sont de style militaire car même les firmes privées sont généralement constituées d’anciens militaires. La formation est devenue une pratique courante des grands médias qui disposent de moyens financiers conséquents mais ce n’est pas encore le cas pour tous.

La formation des firmes privées

Les données montrent que les firmes de sécurité privées britanniques Centurion et AKE ont été celles qui ont offert le plus grand nombre de formations pour les journalistes accrédités par l’armée canadienne en Afghanistan. Pour plusieurs grands médias, la « formation au reportage en environnement hostile » était un préalable au processus d’affectation en zone de guerre. C’est le cas de l’agence Presse canadienne et des quotidiens Globe & Mail et Toronto Star dont les journalistes ont suivi la formation de Centurion ; et de CBC/Radio-Canada qui a fait généralement affaire avec AKE. Les formations étaient d’une durée d’environ une semaine dans différentes villes. Bien que basées en Europe, les deux firmes ont offert des cours en Amérique du Nord, notamment en Virginie (Centurion), à Atlanta et dans les Cantons de l’Est au Québec (AKE).

D’autres médias comme le réseau Global et le journal La Presse ont eu recours aux services des deux entreprises. Deux correspondants de l’agence Postmedia, qui est devenue plus tard Canwest ont mentionné avoir suivi une formation moins avancée que celle des deux firmes comme en témoigne l’un d’eux:

J'ai suivi un cours d'Ambulance Saint-Jean3, c'était un cours de premiers soins très basique. Le tout s'est déroulé sur un ou deux jours. Et puis nous avons eu quelqu'un qui a couvert l'Afghanistan auparavant, quelqu'un de Canwest et nous avons également fait venir un ancien officier militaire pour nous donner une idée de ce à quoi nous pouvions nous attendre. J'ai trouvé la formation assez basique4.

De manière générale, les médias de moindre taille comme les médias régionaux n’ont pas bénéficié des formations des firmes privées dont les tarifs sont prohibitifs. Alec Castonguay qui a couvert la guerre pour le quotidien Le Devoir et pour le magazine L’Actualité explique que les prix gonflent rapidement quand on combine les coûts de la formation et du séjour :

Quand j’étais au Devoir, évidemment c'est un organe de presse qui est pas très riche, donc on avait pas le budget, […] ça coûtait je pense dix mille dollars pour une semaine, c’était quelque chose de très cher5.

Aucun des cinq correspondants de l’agence QMI du groupe Quebecor (TVA, Le Journal de Montréal, Le Journal de Québec, Sun Media) n’a suivi la formation spécialisée des firmes privées.

Au terme de la formation des firmes privées, les journalistes qui ont suivi le stage obtiennent un certificat valide pour une période limitée. Après cette période, des mises à jour sont recommandées. Tous les journalistes de CBC/Radio-Canada doivent mettre à jour leur formation aux trois ans. Benoit Suire, l’expert en gestion de risques du réseau public, explique que les cours de rafraichissement remettent au gout du jour ce qui est jugé indispensable comme l’aspect médical et traumatologique mais de façon plus légère6. Bien qu’ils soient importants aux yeux de certains, les cours de rafraichissement ne sont pas toujours suivis ou ne sont pas toujours considérés comme indispensables. Stephen Puddicombe de la CBC avoue qu’ils ne lui ont pas vraiment appris grand-chose tout en leur reconnaissant un intérêt pour se tenir informé7.

Être formé pour être assuré ?

La question de la formation est liée jusqu’à un certain degré à la question des assurances. Benoit Suire distingue les assurances à régime normal et les assurances « risques de guerre6 ». Les assurances du reportage de guerre sont des assurances spéciales adaptables qui se négocient au cas par cas au prorata du risque. À CBC/Radio-Canada « on n’envoie pas les journalistes sur les zones dangereuses s’ils n’ont pas leur formation et donc ils ne sont pas couverts6 » fait remarquer Suire. Ce dernier précise qu’une évaluation des risques précède tout déploiement d’un journaliste avec trois éléments clés :

On exige d’eux un triptyque qu’ils doivent impérativement avoir : il y a la formation, un document autre qu’ils doivent remplir qui concerne les mesures d’urgence et enfin, l’aspect médical. S’il manque un de ces éléments dans le triptyque, on ne peut pas les faire partir6.

Les coûts de la formation et des assurances constituent un facteur de décision pour les médias. Alec Castonguay revient sur le coût des assurances quand il travaillait pour L’Actualité en 2013:

Le moins cher que le magazine a trouvé c’était autour de 1650 dollars pour deux semaines à peu près. […] plus les billets d’avion, plus le reste, ça commence à faire beaucoup d’argent pour les journaux ou les magazines du Québec qui évoluent dans un petit marché comparativement aux États-Unis ou ailleurs5.

Pigiste de grande expérience sur les terrains de guerre, Anne Nivat a un point de vue très critique mais très minoritaire :

Je me fiche complètement de l’assurance parce ce que tout cela ne sert absolument à rien, si on meurt, on meurt c'est tout. Il n’y a pas d’assurances contre la mort, sinon les assureurs ne feraient plus leur boulot. C'est du business, je veux pas rentrer dans aucun système de business, ça ne m’intéresse pas. Moi ce qui m’intéresse, c'est de faire ce que j’estime être mon métier et justement, c'est raconter la vie dans la guerre. Alors que je sois assurée ou pas ça m’est totalement égal et c'est le problème de ceux qui éventuellement veulent que je leur fasse un papier. […] Pour avoir un de mes papiers, comme un papier, d'ailleurs, de n’importe quel bon journaliste, les médias sont prêts à tout, ils s’en foutent complètement8.

Les mesures de gestion des risques prises par les médias contribuent par contre à baisser les primes d’assurances. Harris Silver, le chef déploiement des activités à hauts risques de la CBC, note que le réseau public obtient des tarifs avantageux en démontrant à la compagnie d’assurance que le diffuseur possède un programme de gestion des risques très robuste avec des procédures en place claires, des formations, un plan de gestion de crise et des révisions régulières.

Dans la pratique des grands médias, la formation au reportage en environnement hostile est une exigence des assureurs. Sans formation, point de couverture. Les médias moins nantis vivent une autre réalité et ont plus de difficultés à assurer adéquatement leurs employés. Jonathan Montpetit de la PC croit que la formation est plus liée aux besoins des assurances qu’à un véritable bénéfice en terrain de guerre9. Dans son étude sur l’essor d’une « culture de la sécurité », Palmer (2018, p. 19) a noté aussi que certains journalistes avaient indiqué que les cours de formation étaient plus importants pour les compagnies d'assurance que pour les gens des médias. Ce regard critique traduit un certain malaise par rapport aux assurances mais nous verrons plus loin que les journalistes ont une vision généralement positive des formations.

La formation de familiarisation de l’armée

Plusieurs journalistes ont également suivi la formation offerte par l’armée canadienne. En prévision de l’instauration du programme d’intégration (embedding) en Afghanistan, l’armée canadienne a organisé une première formation de familiarisation des médias de trois jours en 2003 sur la base de Meaford en Ontario. Lors de la mission de combat à partir de 2006, les militaires canadiens devaient s’entraîner avant le déploiement de chaque groupement tactique en Afghanistan. L’entraînement pré-déploiement d’une période d’environ 1 an, pour ce que l’armée appelle la montée en puissance, se déroulait principalement lors de l’exercice Maple Guardian au Centre canadien d'entraînement aux manœuvres de la base de Wainwright en Alberta. Les médias et les étudiants en journalisme étaient invités pour se familiariser avec l’environnement opérationnel dans un décor similaire au terrain afghan. Christina Stevens de Global indique que la formation de l’armée a porté sur une panoplie d’éléments dont les soins de premiers secours, les exercices de consolidation d'équipe, quoi faire en cas de prise en otages, la structure de base des forces armées, les grades, les armes, etc.9. Plusieurs journalistes ont également suivi les troupes canadiennes au cours de l’entraînement pré-déploiement dans les bases américaines en milieu désertique notamment à Fort Bliss au Texas et au Nouveau-Mexique. Un journaliste anonyme a mentionné avoir suivi un cours de journalisme sur l’armée à l’Université de Calgary en collaboration avec le Centre for Military and Strategic Studies.

Contrairement aux formations des firmes privées qui se concentrent sur les techniques de survie, les formations de familiarisation de l’armée cherchent à faire comprendre le fonctionnement de l’institution militaire aux médias. Cela est utile aux journalistes qui ne sont pas spécialisés sur les questions de défense. À cet égard, Stéphanie Levitz de la PC reconnaït la nécessité d’avoir des cours qui portent sur le fonctionnement de l’armée : « Je ne connaissais pas les insignes de grades [en] voyant un soldat, je ne savais pas s’il était un major ou un capitaine […] Vous apprenez tout par vous-même10 ». Terry Pedwell de la PC qui a suivi les deux types de formation les distingue ainsi :

Je pense que Centurion était plus pertinent pour les besoins que vous pourriez avoir, ce que vous pourriez rencontrer sur le terrain en termes d'intervention d'urgence ou de blessures ou de choses comme ça. Je dirais que c'était plus réaliste. La formation militaire était à peu près une formation de base qu'ils donnaient à n'importe qui, donc c'était assez simple11.

Plus élaborée sur les enjeux de sécurité et de risque, la formation privée est aussi plus codifiée et plus intégrée dans les pratiques régulières des grands médias en matière de journalisme international et de reportage de guerre. Les formations de l’armée sont plus limitées et sont prises généralement au cas par cas. Elles intéressent particulièrement les médias de moindre taille qui ont peu de moyens pour se payer celles des firmes privées.

L’apprentissage par les pairs

Si la formation dans un cadre plus formel a été jugée très utile, les participants ont également accordé une grande valeur aux échanges informels entre collègues et amis. Un journaliste anonyme avance que « le simple fait de parler aux journalistes aide12 ». Joe Friesen du Globe & Mail a beaucoup apprécié les conseils détaillés de son collègue Graeme Smith. Reconnu pour sa connaissance fine de l’Afghanistan, ce dernier a été mentionné par d’autres correspondants pour son mentorat. Les journalistes expérimentés peuvent être des personnes ressources. Les collègues possèdent un savoir utile (Dart Center, 2017, p. 32). « L’expérience constitue […] un atout sur le terrain et plusieurs médias demandent à leurs journalistes chevronnés d’enseigner les ‘trucs’ du métier aux nouveaux venus sur la scène du conflit » (Bizimana, 2006, p. 13). La proximité qui existe entre les journalistes renvoie à ce que Tumber et Prentoulis (2003, p. 219) appellent « the fellowship of danger », un marqueur de la camaraderie qui se développe dans les milieux hostiles en raison du danger et qui solidifie les liens entre les correspondants.

Certains journalistes ont questionné le fait que les formations des firmes spécialisées soient trop axées sur les aspects militaires et moins sur le travail journalistique. Michèle Ouimet de La Presse concède qu’un grand média doit offrir la formation à ses journalistes mais nuance en faveur du mentorat interne:

Ce qu’il faut davantage que ces formations-là, c'est vraiment du coaching de journalistes qui ont de l’expérience, qui ont déjà été [sur le terrain] pour dire : Voici les étapes, voici comment il faut trouver un fixer, comment gérer le décalage horaire, comment gérer son stress, comment se déplacer sur le terrain, qu’est-ce qu’il faut faire, ne pas faire13.

À la question de savoir si un journaliste expérimenté peut être plus utile qu’un ancien soldat pour donner une formation, Ouimet n’hésite pas même si elle reconnaït s’intéresser plus à l’impact de la guerre sur la population civile et moins à l’aspect militaire :

Oui parce qu’on n’a pas le même but. Nous, ce qu’on veut c’est se fondre le plus possible pour que les gens, mettons les Afghans nous fassent confiance et nous parlent. Donc, pour une femme journaliste, il faut porter le voile, il faut porter une grande tunique qui cache les formes pour respecter les traditions. Si on arrive avec des petits jeans sexy puis un décolleté, puis un petit foulard, ça ne marchera pas. On va les insulter et ce qu’on veut, c'est pas leur faire la leçon ni rien, c'est se fondre et qu’ils nous fassent confiance et qu’ils nous racontent leurs histoires.

Un sondage mondial a aussi noté que les considérations culturelles et les questions de genre comptaient parmi les aspects les plus négligés des formations (Dart Center, 2017, p. 18).

Vers la généralisation de la formation

Le premier grand constat qui se dégage de cette étude est le fait que la majorité des journalistes qui ont couvert la guerre en Afghanistan lors de la mission canadienne aient suivi une formation au reportage en environnement hostile. Cela démontre une standardisation de l’éducation aux risques. Pour les grands médias, la formation aux risques est devenue une tendance de fond du journalisme de guerre. C’est à la fois une pratique incontournable de gestion des risques et une exigence assurancielle. Ce constat s’inscrit dans le contexte d’essor d’une « culture de la sécurité » (Palmer, 2018). À quelques exceptions près, les grandes agences, les grandes chaînes de télévision et les grands quotidiens ont intériorisé la formation liée aux dangers et aux risques dans leur pratique en journalisme international. Les médias publics CBC et Radio-Canada ont même engagé des experts en gestion des risques pour s’occuper des affectations journalistiques dans les zones hostiles. La préparation et la formation sont des composantes d’un processus décisionnel réfléchi et planifié. La formation s’intègre dans une logique de prévention et de protection des journalistes par la direction, la rédaction et les experts de l’employeur. Le recours aux experts est encore limité dans l’ensemble des médias mais il constitue certainement une manière d’offrir plus de soutien. L’absence de soutien a été identifiée comme un facteur de stress par les journalistes (Greenberg et al., 2007).

Cependant, de manière générale, les journalistes des médias régionaux et des médias nationaux de moindre taille n’ont pas bénéficié des formations au reportage en environnement hostile. Les coûts élevés des formations restent un frein pour plusieurs médias. Ce constat rejoint celui de l’étude du Dart Center mais aucun de nos participants n’a indiqué avoir payé la formation de ses propres poches (Dart Center, 2007, p. 6). « La conscience de la sécurité est une forme de savoir approprié à laquelle ont accès seuls les journalistes dont les employeurs peuvent se le permettre » (Rentschler, 2007, p. 262).

Les firmes privées Centurion et AKE dominent largement le marché de la formation des correspondants des grands médias canadiens. Fondées par d’ex-militaires, elles offrent des cours réguliers en Europe et en Amérique du Nord sur la reconnaissance des armes, les soins de premier secours et les techniques de survie en environnement hostile. Depuis les années 1990, Centurion et AKE sont des leaders du créneau de la formation des grands médias internationaux (Tumber, 2002, p. 257-258). La logique du corpus de formation repose sur la considération de l’environnement hostile comme « un terrain calculable sur lequel des facteurs de risque peuvent être interprétés » (Rentschler, 2007, p. 258). L’armée canadienne a également organisé des formations pour les médias. Certaines de ces formations militaires étaient élaborées mais d’autres étaient plus sommaires. Dans le prolongement des formations de l’armée américaine durant la guerre en Irak (Bizimana, 2014, p. 142-143), les formations militaires comportent une dimension sur les risques mais visent aussi la familiarisation des médias au fonctionnement de l’armée.

La multiplication et la médiatisation des incidents violents envers les journalistes en Afghanistan et dans d’autres conflits contribuent à la prise de conscience des médias sur la nécessité de la protection des journalistes sur les risques. La mise en place des mesures de formation est consécutive à l’émergence de la mise en discours des risques journalistiques (Høiby et Ottosen, 2019 ; Lisosky et Henrichsen, 2009 ; Bizimana, 2006).

Les perceptions sur l’utilité de la formation

Parmi les journalistes qui ont suivi la formation sur les risques avant ou après leur déploiement en Afghanistan, la majorité (46 sur 53, plus de 86%) croit que la formation est nécessaire et utile à leur travail. Trois personnes pensent qu’elle est utile mais ont exprimé des réserves sur sa portée et deux personnes ont jugé qu’elle n’est pas utile. Les soins de premier secours, les techniques de survie et l’attitude mentale ont été parmi les éléments jugés les plus utiles.

L’acquisition d’un savoir-faire

Pour plusieurs journalistes, la formation confère un savoir et des compétences pratiques. Stephen Puddicombe de la CBC croit que la formation est bénéfique surtout pour les personnes qui commencent le reportage de guerre ou de conflit qui croient savoir ce qu’ils font7. Sa collègue Susan Ormiston pense aussi que la formation est utile pour les néophytes car elle permet une reconnaissance des menaces qui est à son avis la chose la plus importante14. « Je ne pense pas que quiconque devrait aller dans un environnement hostile, qu'il s'agisse d'un conflit, d'un tremblement de terre ou d'une catastrophe naturelle sans cette formation. C'est indispensable15 » défend le photographe Rick Madonick du Toronto Star. Pour Patrice Roy de Radio-Canada qui n’y croyait pas au départ, il parle de l’utilité de la formation après avoir été impliqué lui-même dans un incident grave où son caméraman a perdu une jambe à la suite de l’explosion d’une bombe artisanale :

C'est une formation où on oublie 90% de ce qu’on nous dit, mais ce qu’il reste c'est la préparation, c'est-à-dire le souci de bien se préparer, de savoir où on met les pieds au sens figuré comme au sens propre avant de se déplacer avec des forces armées16.

L’utilité perçue de la formation repose sur l’acquisition d’une connaissance pratique sur le risque sécuritaire dans un environnement hostile simulé.

Mises en situations réalistes

Les formations sur les environnements hostiles offrent une gamme variée de techniques fondées sur des situations. Le contenu des cours aborde la reconnaissance des armes, l’équipement de protection, les techniques de premiers soins, les techniques de survie en cas d’enlèvement ou d’accident, la négociation des points de contrôle, etc. « Nous avons beaucoup appris sur les IED17 » précise Jennifer Madigan d’A Channel. Les IED ont posé un risque considérable aux journalistes intégrés en Afghanistan (Bizimana et Gauthier, 2021). Stephen Thorne de la PC qualifie d’« inestimables » les cours de formation: « Je me souviendrai toujours que si vous voyez une grenade arriver sur vous, vous plongez et vous croisez les pieds pour protéger votre chute18 ».

Les formations sont basées entre autres sur des simulations d’événements ou d’incidents. « Mieux vaut être armé d'autant d'informations que possible pour le pire des scénarios10 » affirme Tobi Cohen qui a couvert la guerre pour la PC. Jennifer Madigan d’A Channel explique l’importance des simulations : « C’est bien d’avoir ces premières expériences dans un environnement contrôlé et pas sur le terrain19 ». La simulation d’une prise d’otages est probablement le scénario le plus réaliste et le plus intense. « Quand ils nous ont mis les sacs sur la tête, je ne pensais pas qu'ils pouvaient me faire peur […], et j'étais totalement paniquée et puis j'ai appris à me calmer et me détendre. C’était une prise de conscience sur comment je réagirais dans ces scénarios19 » confie Madigan.

La formation est en outre axée sur l’acquisition de réflexes d’anticipation. Patrice Roy de Radio-Canada explique :

C'est pas mauvais de se faire répéter mille fois que tout doit être envisagé, plan A, plan B, plan C. Quelle est la position de repli ? Qu’est-ce qu’on fait si ça tourne mal ? Qui est averti ? [Quelle est] la chaîne de communication ? Toutes ces choses-là qui sont intuitives, c'est le gros bon sens, mais c'est le gros bon sens bien ordonné et ça c'est bien16.

Joe Friesen du Globe and Mail dit qu’il a beaucoup appris et note que la formation était précieuse avec les techniques d’évaluation des dangers et l’apprentissage de choses comme l’observation des patterns de mouvements15.

Les soins de premiers secours

Les journalistes interviewés ont insisté sur la dimension médicale de la formation et son utilité. « Les trucs de premiers soins étaient les meilleurs, les plus utiles18 » relate Stephen Thorne. Même avis pour Graeme Smith du Globe and Mail qui reconnaït l’importance du « combat first aid », une formation sur le secourisme en situation de combat20. Le photographe Rick Madonick énumère quelques éléments pratiques de survie comme savoir comment arrêter un saignement, comment fabriquer une petite civière, comment faire de l'eau si vous êtes pris au piège pendant la nuit : « Avoir cette connaissance, élève votre zone de confort15 » précise-t-il.

La formation en soins de premiers secours est souvent basée sur des scénarios avec des scènes d’accidents avec des acteurs gravement blessés. Jennifer Madigan parle d’une formation en secourisme de haut niveau19. Un sondage journalistique mondial a identifié aussi les premiers soins (First Aid) comme la thématique la plus utile des formations sur la sécurité (Dart Center, 2017, p. 5). Pour David Common de la CBC, les soins de premiers secours constituent la partie la plus critique de la formation et croit que c’est cet aspect qui nécessite particulièrement une mise à jour :

Si vous êtes blessé dans une zone de guerre et que vous n'êtes pas intégré, c'est ce qui vous sauvera la vie. Nous formons les gens à garder les autres en vie pendant un, deux ou trois jours et immédiatement après une blessure traumatique.

Plusieurs journalistes ont indiqué qu’ils ne se sont pas nécessairement retrouvés dans une situation de crise ou de danger et qu’ils n’ont pas eu à mettre en pratique leur apprentissage de premiers secours. Oakland dit ne pas savoir comment ça aurait été utile dans une crise :

Les gens ont dit de ne pas s’inquiéter si vous ne pouvez pas vous en souvenir. Si vous êtes dans une situation extrême, cela vous reviendra, mais je n’en suis pas si sûr9.

Pour Patrice Roy de Radio-Canada, la formation a été néanmoins primordiale car, dit-il, il a pu poser un tourniquet en situation réelle à son caméraman qui saignait abondamment après avoir été grièvement blessé par un IED à bord d’un véhicule blindé16.

Un premier constat sur l’utilité

Un premier constat sur l’utilité de la formation perçue par les journalistes est lié à l’acquisition d’une compétence. La formation confère un savoir-faire qui repose sur des compétences pratiques sur la reconnaissance de différents dangers et sur des techniques spécifiques en soins de premiers secours et en survie. Dans ses mouvements et dans certaines situations, il s’agit de savoir « quoi faire et ne pas faire15 » résume le photographe Rick Madonick. La formation permet d’accéder à une connaissance théorique et pratique applicable sur le terrain. Pour les médias, la formation au reportage de guerre en environnement hostile est une stratégie de gestion des risques dans un contexte de menaces (Høiby et Ottosen, 2019 ; Cottle, Sambrook et Mosdell, 2016). C’est l’une des différentes stratégies pragmatiques mises en avant par les médias et le droit international (Lisosky et Henrichsen, 2009).

L’acquisition d’un savoir-être

En plus des compétences pratiques, la formation suivie par les journalistes prépare à un état d’esprit particulier. Murray Brewster de la PC note que l’aspect le plus important de la formation est l’aspect mental10. Sa collègue Stephanie Levitz, qui couvrait une guerre pour la première fois en Afghanistan, dit que la formation lui a ouvert les yeux à cet égard:

C’est toujours bon en tant que journaliste d’apprendre à mieux connaitre son environnement, à réfléchir de manière critique à votre destination, à savoir comment être en sécurité dans votre travail. […]. [Il faut] réfléchir à certaines choses à la fois professionnellement et personnellement en termes de sécurité10.

Brewster précise que la préparation mentale lui a été plus utile dans le contexte non-intégré21. Plusieurs journalistes ont en effet marqué la différence entre les risques du reportage intégré et le reportage indépendant comme en témoigne aussi Drew Brown du journal américain Stars & Stripes :

Si vous n'êtes pas intégré, vous envisagez plus une évaluation des risques car, vous ne dépendez que de vous-même à ce stade, donc c'est un tout autre processus. En sortant avec des forces militaires, vous avez un certain degré de protection, ces gars-là vont s'occuper de vous22.

La préparation mentale est une dimension importante de la formation car les journalistes qui couvrent les conflits « ont des vulnérabilités, des préoccupations et des réactions qui nécessitent d’être prises en compte avant, pendant et après les affectations » (Osofsky, Holloway et Pickett, 2005, p. 290). Cet état d’esprit est lié à une conscience de soi et de l’environnement d’affectation.

État d’alerte et conscience de soi

L’état d’alerte est un élément de la prévention des risques. Un journaliste anonyme donne l’exemple des contacts réguliers qu’il devait maintenir avec sa rédaction pour faciliter la traçabilité :

Si je vais à un certain endroit, puis-je envoyer un e-mail ou appeler mes collègues toutes les quinze minutes ou leur envoyer un SMS ? […] Toutes les quinze minutes, vous leur faites savoir [où vous êtes]. Si quelque chose devait arriver, j’étais à cet endroit. Si je n’ai pas appelé, c’est qu’il est arrivé quelque chose. Vous apprenez certaines techniques12.

Cette pratique correspond à une dimension importante de la sécurité du reportage en zone hostile que le CPJ appelle « Staying in Touch », soit le fait de « rester en vie » en informant ses collègues de l’endroit où on se trouve et en développant un système d’urgence en cas de problème (CPJ, 2003, p. 35-37).

La formation apprend à être sur ses gardes, à évaluer les menaces et à se soucier des règles de sécurité. Les journalistes « savaient à quoi s’attendre » et ne pas s’aventurer à l’aveugle sur le terrain précise une journaliste anonyme12. Cet esprit de conscience et de connaissance de l’environnement développe aussi le sens de l’observation. Jennifer Madigan en témoigne :

Je me souviens vraiment de ma première patrouille regardant la main des gens, regardant les rochers, regardant toutes ces choses qui pourraient être un IED ou un problème potentiel. En fait, je ne suis pas normalement ce genre de personne qui observe tout ce qui m'entoure. Mais j'ai remarqué que cela m’est resté. Et l'autre chose était ce qu'il fallait emporter. J'avais un tourniquet avec moi et des choses comme ça auxquelles je n'aurais pas pensé. J'avais l'impression d'être beaucoup plus préparée19.

Durant la guerre en Afghanistan, plusieurs journalistes intégrés par l’armée canadienne ont été impliqués dans des incidents où leur vie a été mise en danger. « Pour moi, la leçon principale dans tout ça, c’est de ne pas paniquer et c'est facile à dire et difficile à faire23 » confie Paul Hunter qui a couvert entre autres l’attaque talibane de la prison de Sarpoza dans un environnement très volatile.

Les participants ont évoqué aussi l’instinct. Michel Cormier, un correspondant d’expérience chez Radio-Canada, explique que ça joue une fois sur le terrain:

Instinctivement, je savais quoi faire, je me suis mis à plat ventre, pas paniquer et vraiment minimiser la cible qu’on représente pour ensuite une fois qu’on sait que la crise est passée, de rapidement retraiter. Mais il y a d'autres journalistes qui étaient là qui ne savaient pas quoi faire24.

Susan Ormiston de la CBC abonde dans le même sens : « [En temps normal], vous ne saurez probablement pas quel risque pourrait se présenter et l’instinct constitue une partie importante de votre protection14 ». Avec la formation, « vous reconnaissez vraiment ce que vous entendez, ce que vous voyez et comment y faire face rapidement, comment vous tenir à l’écart de la situation ou vous tirer d’affaire25 » affirme Alan Waterman. Ce dernier parle d’une « conscience de soi » (self-awareness) qui est basée sur l’observation permanente et une attention aux détails. Il mentionne par exemple le fait qu’il surveillait instinctivement si le cran de sureté était enclenché sur les armes des soldats25.

Cette dimension mentale combine à la fois un état d’alerte constant en zone de guerre et un calcul permanent en rapport avec les dangers potentiels. Selon Bruce Campion de la PC, la menace n’est pas toujours précise et il faut se rappeler qu’on se trouve dans un endroit dangereux : « Dans une zone de guerre, vous devez faire le calcul et vous dire : "Ok, voici la nouvelle. Quel est le risque d’aller la chercher?"26 ».

Plusieurs journalistes ont parlé de la confiance comme effet bénéfique de la formation. Jennifer Madigan explique:

Je me sentais en confiance avec l’équipement que j’avais apporté, comme la trousse de premiers soins que j’avais faite. J’ai fait beaucoup de patrouilles et des choses du genre et la formation m’a aidé. Je sentais que si quelque chose arrivait, je pouvais prendre soin de moi-même et de quelqu’un près de moi19.

Le reportage de guerre s’exerce dans un environnement stressant où tout peut arriver à tout moment. Être capable d’y faire face devient un atout. « Cela m'a certainement fait sentir un peu plus en contrôle15 » confie Joe Friesen du Globe and Mail. Alexander Panetta de la PC parle d’« empowerment » en situation d’urgence en faisant référence à la capacité de venir en aide à une personne en cas de blessure grave et au fait d’avoir une certaine compréhension sur comment résoudre ce problème dans un laps de temps donné27.

La conscience de l’environnement

Par ailleurs, plusieurs journalistes interviewés ont évoqué le concept de « conscience de la situation » (situation awareness). « Vous vous habituez à vivre à un certain niveau d’appréhension et de conscience de la situation18 » argumente Stephen Thorne. C’est un état mental où le journaliste est conscient de son environnement immédiat. Paul Hunter de la CBC résume : « Lorsque vous êtes dans une situation complètement insensée, arrêtez, réfléchissez, respirez et agissez23 ». Dans une zone de guerre, il faut savoir comprendre rapidement ce qui se passe et agir en conséquence. « Vous devez toujours être attentif à votre environnement9 » indique Ross Oakland. Parmi les éléments spécifiques dont se rappelle Oakland se trouve le code de couleurs de la conscience de la situation : blanc est un état normal, jaune est un état de vigilance modéré, orange est un état de vigilance aigu et rouge est un état de vigilance maximal. Dans un environnement hostile, dit-il, le journaliste ne doit jamais être dans un état insouciant (blanc)28. Sylvain Desjardins de Radio-Canada trouve que la formation a été très importante pour les renseignements techniques mais aussi sur comment se comporter en zone hostile et développer une attitude de recul et de réflexion face à la réalité du terrain :

Être disposé, dit-il, à faire face à des situations un peu imprévues, un peu anarchiques, [c’est] l’attitude à avoir quand tu te fais arrêter par des groupes qui font un barrage sur une route puis qui sont plus ou moins militaires, qui sont plus ou moins officiels, qui peuvent être armés jusqu’aux dents. […] J’en ai vécu des barrages routiers puis je trouvais que c’était intéressant juste d’avoir déjà réfléchi à ça avant, juste pour se préparer à l’idée qu’il ne faut pas être trop nerveux, répondre à leurs questions, être très gentil, très poli, offrir des cigarettes, avoir un peu d’argent de poche29.

Un second constat sur l’utilité

Notre étude pose le constat que l’utilité perçue de la formation par les journalistes est donc liée à une dimension mentale. La formation prépare aussi à un savoir-être qui se traduit par un état mental d’alerte face aux contingences et à l’urgence ainsi que par une conscience de soi et une conscience de l’environnement. Pour les journalistes formés, c’est une attitude réflexive permanente qui les accompagne avant, pendant et après l’affectation sur le terrain. En montrant une généralisation de la formation au sein des grands médias et l’utilité du savoir acquis, notre étude répond modestement à l’interrogation d’Osofsky, Holloway et Pickett (2005, p. 296) sur l’étendue et l’efficacité des programmes de formation même si on ne peut pas généraliser à tous les contextes nationaux. Les journalistes de guerre et leurs médias se soucient de plus en plus des risques inhérents au reportage en environnement hostile mais, c’est en grande partie une réalité des grands médias. Le savoir-être acquis peut avoir une incidence sur le confort du journaliste sur le terrain. La pratique du reportage de guerre repose alors sur une double action décisionnelle d’évaluation et de gestion des risques : l’action rédactionnelle avec le soutien organisationnel mais aussi l’action individuelle à travers les gestes du quotidien.

La portée de la formation face à l’expérience du terrain

Cependant, si la majorité des participants reconnaît l’utilité des formations reçues, certains participants ont exprimé des réserves et en ont relativisé la portée. Le photographe Louie Palu, qui a couvert la guerre en Afghanistan pour plusieurs médias canadiens et internationaux explique :

La formation est essentielle, mais aucun cours ne peut vous éviter de marcher sur une mine terrestre ou un IED. Vous n'avez pas besoin d'être dans un échange de tirs ou une bataille dramatique pour marcher sur une mine. En fait, la plupart des pires blessures que j'ai vues se produire devant moi, c'était une belle journée ensoleillée et très calme, puis quelqu'un marche sur une plaque de pression et il y a une explosion et quelqu'un manque son pied30.

Il note qu’il ne faut pas avoir un faux sentiment de sécurité :

J'ai appris qu'il faut avoir une stratégie pour chaque jour où vous allez travailler pour faire face à une crise majeure lorsque vous êtes intégré avec l’armée ou travaillant seul. Vous ne pouvez pas simplement vous former et vous présenter à votre mission sur le terrain et supposer que votre formation embarquera30.

La formation procure un certain savoir mais elle ne remplace pas l’expérience du terrain. Paul Hunter de la CBC est d’avis que les acquis des cours « se consolident en étant sur le terrain23 ». Paul, qui a effectué plusieurs séjours en Afghanistan, met en avant la valeur de l’expérience :

Où j'ai vraiment appris, c'était sur le tas […] avec des soldats canadiens, américains, britanniques et afghans sur le terrain autour de Kandahar. J’ai appris les premiers secours au combat sur de vraies victimes, comment vérifier les IED et les pièges et comment travailler sous le feu30.

Une journaliste anonyme a expliqué que certaines informations fournies lors des formations n’étaient pas utiles ou étaient parfois « irréalistes »12. Dans cette perspective, Ross Oakland se dit pas très convaincu de l’utilité du cours où il a appris à nettoyer un champ de mines car il ne voit comment ça aurait pu servir9. La Française Anne Nivat se montre très critique à l’endroit des formations : « Je trouve que c'est totalement ridicule l’idée même d’en suivre et ça, je suis absolument catégorique là-dessus8 ». Référant à l’expérience qui se forge sur le vrai terrain de la guerre, Nivat va jusqu’à parler de « pseudo-formations » et défend:

Ça s’apprend pas, ni à l’école, ni dans un stage de formation, on se prépare, on ne peut pas être prêt, c'est une question de nature humaine, de caractère. Soit on a un caractère qui fait qu’on est capable d’avoir des réactions sensées dans des situations insensées, soit on en n’est pas capable, c'est tout ! Il n’y a pas de remède. C'est le terrain qui finalement est l’aune de tout8.

D’autres participants ont évoqué le caractère personnel comme facteur paralysant dans certaines situations d’urgence.

Certes, la formation et l’expérience du journaliste peuvent aiguiser l’instinct en zone hostile mais pour certains, ça reste une formation limitée. Les Perreaux fait savoir que les formations « ne sont pas assez intensives ou assez longues pour que vous intériorisiez cette réponse instinctive qu’ont les soldats qui sont bien entraînés24 ». Pour lui, il faut plutôt parler d’une situation de prise de conscience qu’une véritable formation24.

Ces réserves font écho à deux éléments de différents ordres. Le premier a trait au fait que la formation est une pratique perfectible et que les programmes existants peuvent être mieux pensés en fonction des besoins spécifiques du reportage de guerre intégré et indépendant. Le second est lié au fait que la formation ne peut supprimer les risques tant physiques que psychologiques liés au reportage en environnement hostile mais qu’elle constitue, à tout le moins, une stratégie d’atténuation parmi plusieurs autres.

Les différents constats soulevés par cette étude renvoient au contexte général de la pratique du journalisme sous le feu (Tumber, et Webster, 2006) qui s’exerce sous des conditions particulières de risque sécuritaire (Bizimana, 2006 ; Tumber, 2002) et de risque psychologique (Greenberg et al., 2007 ; Feinstein et Nicolson, 2005 ; Himmelstein et Faithorn, 2002). Avec la prise de conscience des rédactions sur les dangers et les menaces physiques et psychologiques qui guettent leurs employés, la formation des journalistes au sein des grands médias s’est généralisée avec des pratiques d’apprentissage standardisées offertes principalement par des firmes privées. Le « reportage en environnement hostile » dépasse néanmoins le seul cadre des opérations militaires même si ces dernières comportent des risques conjoncturels avec le journalisme embedded (Bizimana et Gauthier, 2021) qui s’accompagne parfois de formations ad hoc par certaines armées.

La formation au reportage en environnement hostile s’inscrit dans l’essor d’une « culture de la sécurité » (Palmer, 2018) et dans le contexte des préoccupations sur les dangers sécuritaires (Høiby et Ottosen, 2019). Il existe une réelle demande pour outiller les journalistes dans un environnement de menaces grandissantes dans les conflits, les catastrophes et les événements traumatiques. Il n’est pas alors étonnant que les journalistes interviewés reconnaissent globalement l’utilité des formations et l’acquisition d’une connaissance théorique et pratique sur les risques sécuritaires. Certes, des réserves existent sur la portée de la formation, mais, aussi robuste soit-elle, la formation n’est qu’un outil de gestion et non de suppression des risques.

Conclusion

Quand la guerre en Afghanistan a commencé en 2001 au lendemain des attentats du 11 septembre, plusieurs médias internationaux ont dépêché leurs correspondants pour rapporter les événements sur le terrain. Ça n’a pas été long avant que les premiers journalistes soient tués ou blessés en faisant leur métier. Réagissant à un incident où l’un de ses journalistes avait survécu à une attaque armée, un responsable du quotidien montréalais The Gazette a posé cette question : « Quel est l'intérêt d'envoyer des journalistes sur le terrain si c'est pour rester enfermés dans un hôtel? » (cité par Collard, 2001). Au même moment, des journalistes canadiens recevaient une formation sur les risques par la firme Centurion (Tison, 2001). Envoyer des journalistes sur le terrain est une chose mais les préparer à toutes les éventualités en est une autre. La guerre en Irak en 2003 a fortement relancé le débat sur les risques journalistiques dans les conflits (Bizimana, 2006 ; Tumber et Palmer, 2004). Différents conflits ont contribué à l’émergence de la culture de la sécurité (Palmer, 2018).

Cet article a démontré que pour les grands médias, la couverture médiatique de la mission canadienne en Afghanistan s’est effectuée globalement sous le signe de la reconnaissance des risques liés au reportage dans les conflits et de la nécessité de la formation des correspondants. Notre étude confirme une tendance qu’on observe depuis les années 1990 (Tumber et Webster, 2006 ; Tumber, 2002) avec la détérioration des conditions de pratique du journalisme dans différents contextes (Demers et al., 2018 ; Cottle, Sambrook et Mosdell, 2016). Les incidents malheureux qui ont affecté les journalistes canadiens et internationaux sur le terrain n’ont fait que renforcer une prise de conscience déjà présente sur les enjeux de sécurité. La formation offre un double savoir théorique et pratique que la majorité des journalistes apprécie et juge utile. Les firmes privées sont les principales pourvoyeuses des formations aux grands médias. L’armée canadienne a dispensé des formations mais elles étaient plus limitées.

Cependant, tous les médias n’ont pas les mêmes stratégies de gestion des risques, certains ont des protocoles de protection et de formation solides et des ressources spécialisées alors que d’autres ne mettent en place que des mesures de sécurité très limitées. Le coût associé aux formations auprès des firmes privées reste un repoussoir pour les médias moins nantis et les pigistes.

Nos données sont limitées pour apporter un éclairage sur l’impréparation des programmes de journalisme au sens plus large (Dworznik et Grubb, 2007) ou sur le lien entre la littératie des journalistes sur certains aspects et leur formation (Seely, 2020). D’autres recherches qualitatives et quantitatives sont nécessaires pour explorer la portée de la formation au regard des pratiques différentiées du journalisme intégré et indépendant ainsi que d’autres aspects liés entre autres au genre et aux contextes culturels. 

Aimé-Jules Bizimana est professeur à l’Université du Québec en Outaouais et chercheur
au Centre de recherche interuniversitaire sur la communication, l’information
et la société (CRICIS), Benoit Gauthier est assistant de recherche au CRICIS.




Notes

1

Il existe d’autres variantes: Hostile Environment Training (HET), Hostile Environment Awareness Training (HEAT) ou Hostile Environment Safety Training (HEST).



2

Les auteurs tiennent à souligner la contribution de plusieurs assistants de recherche à différentes étapes du projet de recherche et particulièrement Katia Brien-Simard qui a mené quelques entrevues.



3

Ambulance Saint-Jean (St. John Ambulance) est un organisme humanitaire dont le siège se trouve à Ottawa qui offre des cours de secourisme et d’assistance médicale.



4

Entrevue, 29.11.2013.



5

Entrevue, 22.10.2013.



6

Entrevue, 07.11.2014.



7

Entrevue, 06.03.2014.



8

Entrevue, 15.04.2014.



9

Entrevue, 28.01.2014.



10

Entrevue, 15.10.2013.



11

Entrevue, 14.02.2014.



12

Entrevue, 02.04.2014.



13

Entrevue, 25.10.2013.



14

Entrevue, 19.02.2014.



15

Entrevue, 29.01.2014.



16

Entrevue, 05.11.2013.



17

Entrevue, 29.04.2014. IED [Improvized Explosive Device]



18

Entrevue, 14.04.2014.



19

Entrevue, 29.04.2014.



20

Entrevue, 19.04.2014.



21

Les journalistes intégrés par l’armée canadienne pouvaient faire du reportage indépendant avec leurs fixeurs durant leur séjour en Afghanistan.



22

Entrevue, 27.01.2014.



23

Entrevue, 22.05.2014.



24

Entrevue, 23.10.2013.



25

Entrevue, 01.04.2014.



26

Entrevue, 04.01.2013.



27

Entrevue, 21.10.2013.



28

Entrevue, 28.01.2014. Ce code de couleurs a été inventé par Jeff Cooper, un militaire américain spécialisé en maniement des armes et en défense personnelle. La Radio Television Digital News Association (RTDNA) reprend ce code pour expliquer le concept de situation awareness : blanc = ignorant et non préparé ; jaune = alerte détendue ; orange = alerte spécifique ; rouge = combat (RTDNA, 2021).



29

Entrevue, 25.10.2014.



30

Correspondance, 21.07.2014.






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Référence de publication (ISO 690) : BIZIMANA, Aimé-Jules, et GAUTHIER, Benoit. Portrait de la formation sur les risques et perceptions des journalistes sur son utilité durant la guerre en Afghanistan. Les Cahiers du journalisme - Recherches, 2021, vol. 2, n°7, p. R145-R164.
DOI:10.31188/CaJsm.2(7).2021.R145


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