Nouvelle série, n°8-9
2nd semestre 2022 |
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La pandémie vue par les médias écrits : analyse de la couverture de la Covid-19 par des quotidiens canadiens
Olivier Champagne-Poirier, Université de Sherbrooke
Marie-Ève Carignan, Université de Sherbrooke
Marc David, Université de Sherbrooke
Résumé
Cet article brosse le portrait de la couverture de la pandémie de COVID-19 effectuée par la presse écrite canadienne. Fruit d’une démarche méthodologique mixte lors de laquelle 15 873 articles publiés par 20 quotidiens canadiens entre le 27 janvier 2020 et le 27 février 2021 ont été qualitativement puis quantitativement analysés, nos résultats mettent en exergue : 1) le rôle clé des agences de presse dans la réponse rapide des quotidiens canadiens à la crise planétaire 2) que la durée de la crise favorise un basculement de la couverture vers l’opinion, l’émotion, l’oralisation et la conscientisation 3) et qu’au fil du temps, la couverture de la pandémie démontre simultanément une complexification des enjeux et une dilution de ceux-ci au sein d’articles n’ayant pas la pandémie comme sujet principal.
Abstract
This article paints a portrait of the coverage of the COVID-19 pandemic by the Canadian print media. Following a mixed methodological approach in which 15,873 articles published by 20 Canadian dailies between January 27, 2020 and February 27, 2021 were qualitatively and then quantitatively analyzed, our results highlight: 1) the key role of news agencies in the rapid response of Canadian dailies to the global crisis; 2) that the duration of the crisis favors a shift in coverage towards opinion, emotion, oralization and awareness; 3) and that over time, the coverage of the pandemic simultaneously demonstrates the growing complexity of the issues and a dilution of these within articles that do not have the pandemic as the main topic.
DOI : 10.31188/CaJsm.2(8-9).2022.R047
L
a pandémie de COVID-19 constitue une crise sanitaire mondiale qui a posé son lot d’enjeux communicationnels et informationnels. En impliquant des mises à jour constantes concernant, notamment la connaissance disponible à propos du virus (mode de transmission, gestes barrières, etc.) et l’évolution de la pandémie (nombre de cas, nombre de morts, état des hôpitaux, etc.), la crise a eu des impacts très importants sur les systèmes de communication en place.
D’une part, le flot massif d’informations devant être transmises à l’intégralité de la population mondiale, couplé à la nature évolutive (nouveau virus oblige) de l’information, ont mis la scène pour des phénomènes de désinformation sans précédent (Monnier, 2020). D’autre part, les autorités publiques, qu’elles soient politiques ou sanitaires, ont dû déployer de nombreuses stratégies afin de mobiliser les populations vers des pratiques devant permettre de limiter la propagation du virus. Cela a impliqué, notamment, qu’elles ont multiplié leurs interventions publiques et qu’elles ont eu recours à des plateformes médiatiques variées pour diffuser leurs messages (Galibert et Cordelier, 2021). Durant la pandémie, pour prendre l’exemple de la province canadienne de Québec, les autorités ont cumulé plusieurs moyens afin de rejoindre une population segmentée sur les plans des pratiques informationnelles et communicationnelles (Langlois et Sauvageau, 2021). Sans vouloir basculer dans l’évaluation de ces initiatives, spécifions qu’afin d’établir le lien avec la population, les autorités ont pris d’assaut les médias traditionnels, notamment par leurs points de presse quotidiens (Bellahnid, 2021) ou leurs campagnes de sensibilisation (distanciation, masque, vaccin, etc.) et les plateformes socionumériques, notamment via les influenceurs et influenceuses (Côté et Lalancette, 2021).
Au centre de ce tourbillon communicationnel où, soudainement, une masse d’informations nouvelles a basculé du côté de l’intérêt public et où l’information citoyenne s’est vue complexifiée par la désinformation, se trouvent les médias d’information et, plus spécifiquement, les professionnels de l’information. La crise a eu l’effet d’une « éclipse médiatique » (Lalancette et Lamy, 2020), en ce sens que, durant plusieurs mois, sa couverture a eu préséance sur celle de tout autre événement. À l’aune du contexte nouveau posé par l’urgence sanitaire, les médias et les professionnels de l’information ont dû adapter leurs pratiques parce qu’ils jouent un rôle important dans la communication du risque et de crise (Anthony et Sellnow, 2011). Ils doivent s’assurer de relayer efficacement les informations des institutions de santé publique et des gouvernements afin de favoriser leur compréhension, tout en maintenant une posture de chien de garde face à ceux-ci pour éviter de devenir des « agents » de la santé publique (Adalja, Toner et al., 2020 Hanitzsch et Vos, 2018). Qui plus est, les pratiques journalistiques ont notamment été affectées par la mise en place de mesures de protection à géométrie variable pour les professionnels de l’information, une densification de la charge de travail, une augmentation de la cadence de traitement des nouvelles et une transformation du rapport au terrain et aux sources (Lacroix et Carignan, 2020a). Ces professionnels ont vu leur rôle de « journaliste-orchestre » exacerbé et leur accès aux sources d’information complexifié, confinement et travail à distance obligent.
C’est à l’aune de ce contexte particulier où la production journalistique est à la fois essentielle et complexifiée que s’exprime le projet de recherche relaté dans cet article. Lors de celui-ci, suivant la recommandation émise par Caroline Lacroix et Marie-Eve Carignan à la suite de leur étude du rôle des journalistes québécois lors de la pandémie, il nous « semble crucial d’étudier le discours que les médias ont tenu sur cette crise » (Lacroix et Carignan, 2020b, p. 15). Plus spécifiquement, quelle couverture journalistique a été allouée à la pandémie de COVID-19 par la presse quotidienne canadienne ?
Méthodologie
Le questionnement à l’origine de ce projet incite à l’utilisation de méthodes souvent coincées dans une conception dichotomique en analyses de presse, soit les méthodes qualitative et quantitative (Champagne-Poirier, Carignan, et al., 2021). Il concerne autant les caractéristiques de la couverture que l’importance du volume de celle-ci. Ce faisant, nous avons élaboré une démarche de recherche mixte permettant de répondre aux deux sens de notre questionnement.
Le terrain
Afin d’avoir accès à une grande diversité sur le plan des pratiques journalistiques canadiennes, nous avons porté intérêt aux articles publiés par 18 quotidiens provinciaux répartis dans les dix provinces canadiennes. Qui plus est, comme les trois territoires canadiens n’ont pas de journaux quotidiens territoriaux1 (par exemple, il n’y a pas de quotidien établi au Yukon et distribué à travers tout le Yukon), nous avons inclus deux quotidiens nationaux qui sont distribués dans toutes les provinces ou tous les territoires canadiens. Nous avons donc analysé la couverture de 20 quotidiens (voir table 1). L’accessibilité des articles sur Eureka ou ProQuest2, de même que l’importance des tirages des journaux ont guidé notre sélection. Par exemple, les deux quotidiens nationaux (The Globe and Mail et National Post) sont ceux ayant les plus hauts tirages au Canada et leurs articles sont disponibles sur ProQuest.
Ensuite, afin d’être en mesure d’évaluer l’évolution de la couverture à travers le temps, nous avons ciblé trois périodes de publication de trois mois. La première période débute avec la première infection de COVID-19 en sol canadien, soit le 27 janvier 2020. Spécifiquement, nous avons analysé les articles publiés entre le 27 janvier 2020 et le 27 avril 2020 entre le 27 juin 2020 et le 27 septembre 2020 et entre le 27 novembre 2020 et le 27 février 2021 (inclusivement pour toutes ces dates).
Considérant la thématique de la recherche et notre désir de faire un état exhaustif du phénomène, trois mots clés ont été retenus pour la sélection des articles. Grâce aux opérateurs booléens employés sur les deux bases de données, tous les articles contenant ces mots ont été retenus et considérés : « pandémie » (ou pandemic, pour les journaux anglophones) et/ou « coronavirus » et/ou « COVID ». Les articles ont aussi été manuellement filtrés afin d’éliminer les articles complètement hors thème. La table 1 qui suit fait état de la vaste couverture journalistique mise au jour par ce processus.
La table 1 permet de constater que la couverture allouée à la COVID-19 par les quotidiens sélectionnés durant les trois périodes étudiées est massive : près de 130 000 articles. Pareil lot de données constitue un défi lors d’une démarche telle que celle-ci. Comme mentionné, notre questionnement de recherche implique des considérations tant qualitatives que quantitatives et, donc, il était impossible d’automatiser les analyses. La réalisation d’une démarche qualitative (même lorsqu’elle agit telle une composante d’une démarche mixte) découle généralement d’allégeances épistémologiques constructionnistes (Nguyên-Duy et Luckerhoff, 2006) et, de ce fait, ne saurait être automatisée parce qu’elle est externe au chercheur qui la réalise.
Table 1 : Aperçu du corpus
Conséquemment, à des fins de faisabilité, nous avons procédé à un échantillonnage aléatoire d’articles afin de maintenir seulement 1/8e du corpus. Cette stratégie d’échantillonnage statistique nous a permis d’opérer dans les limites des ressources dont nous disposions, tout en permettant un corpus somme toute considérable (15 873 articles). En effet, bien que ce projet ait été subventionné par les Instituts de recherche en santé du Canada3, une analyse mixte complète des articles n’était pas envisageable sur le plan des ressources financières et humaines4.
L’analyse
La mixité de notre approche s’est manifestée dans un enchevêtrement complexe de phases inductives/qualitatives et déductives/quantitatives. En effet, les articles publiés lors des trois périodes n’ont pas été analysés tout d’un coup inductivement et, ensuite, tout d’un coup déductivement. Les analyses ont été réalisées au fur et à mesure que la première année de la pandémie avançait.
Ainsi, le fondement de notre approche mixte est que nous avons utilisé l’analyse inductive pour établir les caractéristiques de la couverture journalistique canadienne de la pandémie et, une fois ces caractéristiques découvertes, nous les avons utilisées afin de créer une grille d’analyse devant être déductivement appliquée au corpus à l’étude. Cela dit, notre grille d’analyse, qui se veut inclusive et enracinée dans le phénomène à l’étude, n’est pas figée et a été bonifiée pour tenir compte de toutes les données collectées. Pour illustrer ce principe, spécifions qu’une composante de la grille est la thématique des articles. Elle permet d’évaluer ce sur quoi portent principalement les articles composant la couverture journalistique canadienne de la pandémie. Or, si l’analyse qualitative des articles de la première période a permis de mettre au jour 24 « catégories thématiques », les développements liés à la pandémie ont fait émerger de nouveaux enjeux, de nouvelles thématiques. Cela a fait en sorte qu’après avoir analysé les articles de la deuxième période, nous avons ajouté huit catégories thématiques à la grille d’analyse. Nous en avons encore ajouté huit après l’analyse qualitative des articles de la troisième période, pour un total de 40 catégories thématiques après les trois périodes. Bref, lorsque la couverture journalistique évoluait, la grille d’analyse était simultanément modifiée.
À propos du processus d’analyse qualitative, spécifions que ce ne sont pas les 15 873 articles qui ont été analysés. La recherche qualitative, en ce qu’elle doit permettre la compréhension des caractéristiques d’un phénomène (Lejeune, 2014), incite à procéder par échantillonnage théorique et non statistique (Corbin et Strauss, 2015). C’est-à-dire qu’il n’était pas utile aux fins du volet qualitatif de cette recherche de procéder à l’analyse de tout le corpus. En effet, lorsque l’analyse qualitative révélait que peu ou pas de nouvelles caractéristiques étaient présentes dans les articles, la « saturation théorique » était constatée (Glaser et Strauss, 1967) et l’analyse cessait. Comme les périodes analysées étaient relativement courtes (et donc qu’un nombre plus limité d’enjeux les a ponctuées), pour chaque quotidien, il a été nécessaire d’analyser entre 10 et 15 % des articles avant d’atteindre le seuil de saturation théorique (voir table 1). Globalement, 1883 articles ont fait l’objet de l’analyse qualitative.
Pour éviter les redondances avec la présentation des résultats qui suit, contentons-nous d’ajouter que l’analyse qualitative nous a permis de mettre en exergue des questionnements et des réponses potentielles. Cela n’est pas sans rappeler que l’extrant d’une recherche qualitative prend souvent la forme d’hypothèse (Lejeune, 2014). En effet, nous convenons que de chercher à bien comprendre la couverture journalistique de la pandémie par les quotidiens canadiens implique d’aborder les articles constituant cette couverture en questionnant : qui sont les auteurs des textes ? Qui sont les protagonistes mobilisés dans les articles ? Quelles sont les intentions communicationnelles traduites par les articles ? Quelles stratégies discursives sont employées dans les articles ? Quels aspects de la pandémie (thématiques) sont mis à l’avant-plan dans les articles ?
Comme mentionné, notre analyse qualitative a permis de préétablir l’horizon de réponses à ces questions. Les « catégories » et les « attributs » identifiés lors de l’analyse qualitative ont pu être transformés en variables et en valeurs (Champagne-Poirier et al., 2021). Par exemple, la catégorie « Thématiques » et ses 40 attributs ont été transformés en une variable « thématiques » accompagnée de 40 valeurs (une valeur numérique a d’ailleurs été allouée à chaque attribut).
En somme, lors de notre étude mixte, l’analyse qualitative a permis de créer l’architecture devant guider la codification des articles et l’analyse quantitative. De fait, les 15 873 articles ont été codifiés sur SPSS à l’aide de cette grille. Cela nous permet d’évaluer dans quelles mesures les caractéristiques identifiées qualitativement sont quantitativement présentes dans la couverture journalistique.
Résultats
Comme notre démarche a permis d’évaluer les couvertures réalisées lors de trois périodes réparties sur un peu plus d’un an, notre présentation des résultats est faite de façon chronologique. Cette stratégie permet de mettre en exergue l’importance d’éléments contextuels, tout comme celle de la longévité de la crise dans la couverture qui lui a été allouée. Ainsi, les auteurs, les protagonistes mis en scène, les thématiques abordées et les stratégies discursives mobilisées par les auteurs des articles seront présentés sous l’angle de leur évolution au sein des trois périodes étudiées.
Les auteurs des articles : un portrait qui change au fil de la pandémie
Nos analyses ont permis de constater que les auteurs des articles peuvent être divisés en quatre catégories : les journalistes d’informations à l’emploi des quotidiens, les agences de presse, les journalistes d’opinion à l’emploi des quotidiens (chroniqueur, éditorialiste) et les auteurs qui ne sont pas des professionnels de l’information (lettre d’opinion, qu’elles soient écrites par des citoyens ou des experts). La présence de ces catégories indique que la couverture journalistique de la pandémie peut s’effectuer à l’aune d’idéaux variés. En effet, les journalistes d’information (ce qui inclut les journalistes des agences de presse) adhèrent généralement à des idéaux de pratiques où la neutralité, l’objectivité et la véracité des faits sont valorisées (Brin, Charron et al., 2004). Les journalistes d’opinion ainsi que les auteurs qui s’expriment dans les lettres d’opinion ne poursuivent pas ces mêmes idéaux. Leur objectif n’est pas de rapporter l’actualité ou les faits, mais plutôt de se positionner à l’égard de ceux-ci.
La figure 15 qui suit montre, notamment, comment la composition de la couverture journalistique de la pandémie a évolué au fil des trois périodes étudiées .
Deux observations importantes s’imposent ici. D’abord, le recours aux agences de presse diminue drastiquement au fil de la pandémie. Cela indique que face au contexte communicationnel complexe et soudain induit par la pandémie, les quotidiens à l’étude ont grandement compté sur les articles produits par les agences de presse. On peut alors supposer qu’au fil du temps, les journalistes (d’information et d’opinion) des quotidiens ont apprivoisé les enjeux inhérents à la pandémie et ont pu inclure leur couverture à leur travail. Or, tel que nos chiffres l’indiquent, cette intégration s’est échelonnée sur plusieurs mois. Ce constat permet de positionner les agences de presse tel un instrument clé dans la réponse rapide des quotidiens au contexte de crise.
Ensuite, le ratio entre les articles d’information et les articles d’opinion change avec le temps. Nos analyses indiquent effectivement que plus on avance dans la pandémie, plus on peut constater un (léger) déclin quant à la présence des articles écrits par des individus chargés d’informer le lectorat au détriment des articles écrits par des individus cherchant à transmettre leurs opinions (r = 0,078, p = 0,00).
Figure 1. Répartition (en %) des auteurs des articles au fil des trois périodes (N=14,393)
Une évolution des acteurs mobilisés dans les articles dans le temps
Nos analyses qualitatives ont permis de constater que les articles constituent des textes dans lesquels certaines facettes de la pandémie sont abordées et au sein desquels différents protagonistes sont mis en scène. Ce faisant, les articles contribuent à brosser un portrait des enjeux qui constituent la crise sanitaire, de même que des individus ou groupes touchés, mobilisés ou liés à celle-ci.
Telle que nous la comprenons, la couverture journalistique de la pandémie implique la mise en scène de 18 types de protagonistes que nous regroupons en quatre catégories, soit les acteurs politiques, les acteurs sanitaires, les acteurs sociaux et les acteurs affectés par la pandémie.
Acteurs politiques
Lorsqu’une crise survient, il est attendu des leaders politiques qu’ils occupent un rôle central dans la mitigation et la résolution de la crise (Palttala et Vos, 2012). Les données collectées aux fins de ce projet démontrent que la pandémie de COVID-19 ne fait pas exception à cette règle. Cela dit, nos analyses incitent à appréhender de façon nuancée les politiciens, notamment sur la base des paliers gouvernementaux auxquels ils appartiennent, soit municipaux, provinciaux et fédéraux. Cela est dû au fait que la pandémie éveille des considérations liées à différents champs de compétences qui, eux, relèvent de paliers gouvernementaux spécifiques (par exemple les relations internationales, l’éducation, les personnes aînées, etc.). Qui plus est, l’importance évidente de la santé au sein de cette crise nous amène à distinguer les ministres de la Santé (Patty Hadju au fédéral, de même que les ministres de la santé provinciaux) des autres politiciens. De fait, ces ministres constituent un type d’acteur à part et qui sera abordé dans la section suivante (les « acteurs santé »).
Comme le montre la figure 2, les acteurs politiques ont tous atteint un sommet de couverture à un moment différent. Le fédéral a été couvert davantage durant la première période que durant les suivantes les acteurs politiques provinciaux ont été le plus couverts lors de la troisième période analysée les politiciens municipaux ont, pour leur part, joui d’une couverture supérieure lors de la deuxième période, soit durant la période estivale.
Figure 2. Répartition des acteurs politiques (en %) lors des trois périodes analysées
Ce résultat suit le récit de la pandémie : le palier fédéral est celui vers lequel on s’est tourné au début de la pandémie, pour la gestion de la crise. La réponse internationale à la crise planétaire a impliqué une attention particulière envers le gouvernement canadien, puisque les échanges avec l’international font partie de ses compétences. Les politiciens municipaux, de leur côté, ont probablement atteint un sommet de couverture au cours de la deuxième période puisque les enjeux locaux, comme le tourisme, ont particulièrement fait les manchettes (la 2e période correspond à la période estivale). Pour ce qui est des politiciens provinciaux, la période la plus couverte est la plus récente. Cette couverture suit la progression de la pandémie : la troisième vague, qui a frappé durant cette période, ne s’est pas produite dans toutes les provinces en même temps. Les populations (incluant les journalistes) se sont donc davantage tournées vers le gouvernement provincial que vers le gouvernement fédéral pour obtenir toutes les informations en lien avec la pandémie et les mesures à suivre. De même, au cours de cette période, les gouvernements provinciaux ont dû présenter leur plan quant à la vaccination. Cette compétence, entièrement provinciale, expliquerait l’augmentation de la présence des politiciens provinciaux dans les articles publiés durant ces trois mois.
Acteurs santé
Forcément, la crise sanitaire a impliqué la mobilisation d’acteurs œuvrant en santé, que ce soit dans le secteur médical ou dans celui de la santé publique. Telle que nous l’avons constaté, la couverture journalistique de la pandémie permet plus spécifiquement de mettre à l’avant-plan : les directions des différentes agences ou équipes de santé publique (régionales, provinciales ou fédérales) les ministres fédéraux et provinciaux de la Santé (comme mentionné plus tôt, considérant la nature de la crise, ces individus ne sont pas simplement considérés tels des politiciens) des travailleurs/spécialistes en santé tels que les médecins, pharmaciens, infirmiers, inhalothérapeutes, etc. et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ou certains membres de sa direction tels que le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus. La figure 3 présente la répartition de la couverture de chacun de ces groupes d’acteurs, au fil du temps.
Nos chiffres indiquent que, globalement, les acteurs en santé ont été très mobilisés au début de la crise (par exemple, les spécialistes en santé étaient présents dans presque un article sur cinq lors de la première période), mais aussi que leur importance dans la couverture de la pandémie a graduellement diminué au fil des mois.
Il est aussi intéressant de mettre en exergue que si les directions d’agences/équipes de santé publique ou, encore, des spécialistes en santé, n’étaient pas nécessairement vu telles des figures publiques avant la pandémie (pensons au Dr Horacio Arruda, le directeur national de la santé publique au Québec), ces deux groupes d’acteurs ont été plus présents dans la couverture journalistique de la pandémie que, par exemple, des groupes détenant des rôles publics tels que les ministres de la Santé. Particulièrement au début de la pandémie, cela a impliqué que des individus ou groupes moins habitués à occuper la sphère publique se sont retrouvés au centre de l’attention journalistique. Les médias écrits, désireux d’offrir un éclairage sur un virus et une pandémie qui revêtaient plusieurs zones d’ombre (transmission du virus, symptômes, mesures préventives, etc.), ont beaucoup compté sur la mobilisation de voix expertes en santé.
Figure 3. Répartition des articles (en %) faisant mention d’un acteur en santé
Cela dit, en contraste avec les trois autres groupes, les « spécialistes en santé » voient leur mise en scène dans les articles baisser (pour la période 2), pour ensuite remonter (à la période 3). Cette particularité liée à ce groupe d’acteurs peut s’expliquer du fait que, lors de la seconde période, qui concorde avec une diminution importante des cas d’infection durant l’été 2020, ils sont moins cités dans les médias et y apparaissent moins. Or, il est plausible que l’augmentation de la couverture médiatique des experts en santé (à la période 3) soit due à l’arrivée de la « deuxième vague » dans plusieurs provinces ou au début de la commercialisation du vaccin. Effectivement, les spécialistes en santé ont été appelés à se prononcer sur les paramètres de la seconde vague (hausse des cas, mesures préventives, situation des hôpitaux, etc.) et sur la vaccination (processus d’élaboration des vaccins, risques, effets secondaires, etc.).
Acteurs sociaux
Des acteurs relevant de différentes sphères sociales ont aussi marqué la couverture journalistique de la pandémie de COVID-19. Notre analyse qualitative révèle cinq types d’acteurs. Tout d’abord, les médias, qu’ils soient numériques ou traditionnels, occupent une place certaine dans la couverture. Par exemple, des articles vont positionner des informations en indiquant que celles-ci proviennent des médias sociaux (à titre de source), tout comme des articles vont ouvertement aborder le rôle des médias dans la pandémie. Ensuite, les acteurs du monde des arts et de la culture (incluant les « vedettes ») constituent aussi un groupe qui s’est vu associé à la pandémie par les articles de presse. Notamment, plusieurs personnalités connues ont retenu l’attention pour leurs affirmations, leurs réussites, leurs drames et leurs sorties publiques (pensons à la comédienne Lucie Laurier et à ses prises de position antimesures sociosanitaires). Également, les bouleversements entrainés dans le monde du sport (par exemple l’interruption des matchs de hockey) ont fait en sorte que les acteurs du monde du sport tels que les athlètes et organisations sportives ont été inclus dans la couverture journalistique. Ensuite, considérant les mesures légales mises en place dans différentes provinces afin de limiter la propagation du virus (couvre-feu, interdiction des rassemblements, etc.), c’est sans surprise que les forces de l’ordre (police, armée, juges, avocats, etc.) sont présentes dans des articles. Aussi, considérant les impacts sociaux évidents de la pandémie, des journalistes ont mobilisé, dans leur couverture, des spécialistes sociaux tels que des économistes, des politologues ou des chercheurs en communication afin de contribuer à faire sens de la crise. Finalement, la mise en place de gestes barrières telles que la fermeture de commerces non essentiels dans certaines provinces canadiennes ou, encore, les pénuries (de papier hygiénique, de logement, de véhicules, etc.) causées par la pandémie, a impacté des acteurs que nous regroupons sous la bannière « acteurs économiques ». Cette sous-catégorie regroupe les entreprises, le milieu des affaires, la Banque du Canada, les associations immobilières, etc.
La figure 4 montre dans quelles mesures ces six groupes d’acteurs étaient présents dans les articles analysés.
Figure 4. Répartition (en %) de l’apparition des acteurs sociaux dans les articles analysés
On peut ainsi constater que les médias sont très présents dans les textes qui constituent la couverture journalistique de la pandémie. Comme mentionné dans l’introduction de ce texte, la pandémie a eu des effets importants sur les médias, ce qui peut expliquer cette tendance qu’ont les journalistes à expliciter (dans leurs articles) la place des médias au sein de la crise.
Les acteurs économiques sont également très présents et ont vu, de leur côté, leur présence dans les médias s’accroître : ils sont dans environ le tiers des articles lors des deux premières périodes, puis sont présents dans plus de la moitié de ceux-ci lors de la troisième période d’analyse. Cette augmentation peut s’expliquer par la question de la santé, qui était prioritaire au début, puis qui a fait place aux questions économiques, concernant entre autres les fermetures de commerces, puis leur réouverture et la reprise économique.
Concernant les autres groupes sociaux, on peut constater une faible baisse de la présence des acteurs du monde des arts et de la culture ainsi que des spécialistes sociaux. Cela laisse penser que l’ampleur de leur inscription à l’agenda médiatique est liée à la nature « nouvelle » de la crise. Notamment, les vedettes ont été très mobilisées pour encourager la population à suivre les nouvelles règles sanitaires devant permettre de limiter la propagation du virus (pensons aux influenceurs ou influenceuses et au #Propage l’info, pas le virus au Québec). En outre, les spécialistes ont été mobilisés dès les débuts des mesures sociales, sanitaires et économiques afin de se prononcer sur leurs impacts La dissipation de l’effet de nouveauté aurait, notamment, impliqué une diminution du recours à ces types d’acteurs pour la rédaction d’articles.
À l’inverse, on peut constater une légère augmentation de la place occupée par les forces de l’ordre et les acteurs du monde du sport. L’un des facteurs pouvant expliquer ce résultat est qu’avec l’arrivée de la deuxième vague de cas d’infection, plusieurs provinces se sont munies de nouvelles mesures très strictes qui ont impliqué la participation des forces de l’ordre (pour s’assurer de leur application). Pour ce qui est du monde du sport, les annulations d’événements (notamment les Jeux olympiques) puis la reprise des compétitions a impliqué d’allouer une grande importance à cet acteur. Cela étant, l’attention accordée aux acteurs du monde du sport est étonnamment grande, surtout lorsqu’on la compare aux politiciens, personnages clés de la pandémie. Effectivement, lors de la 3e période, les politiciens provinciaux étaient présents dans 15,3 % des articles, tandis que les acteurs du monde du sport étaient présents dans 16,8 %. Une situation qui n’est pas sans rappeler l’importance du sport dans la vie des Canadiens.
Groupes « créés » par la pandémie
Tel que nous le comprenons, en ayant lieu, la pandémie a créé et consolidé cinq groupes : les travailleurs de première ligne COVID (travailleurs du milieu de la santé, travailleurs sociaux, services d’urgence, etc.), les populations vulnérables au virus (les personnes aînées, les personnes immunosupprimées, les personnes sans domicile fixe, etc.), les groupes complotistes face à la pandémie (le mouvement Q-Anon, Citoyens au pouvoir, etc.), les citoyens affectés socialement par la pandémie (les individus confinés, les personnes souffrant d’anxiété, les enfants devant faire l’école à la maison, etc.) et les citoyens affectés physiquement par la pandémie (les individus infectés par le virus ou qui sont décédés du virus). Ces groupes ont été catégorisés ainsi puisqu’ils se distinguent des groupes abordés jusqu’à présent, en ce sens que leurs existences dans les articles sont contingentes à celle de la pandémie. En effet, une « première ligne COVID-19 » n’existait pas (forcément) avant la pandémie il n’y avait pas de populations vulnérables au virus SRAS-CoV-2 avant (forcément) que le virus n’existe il n’y avait pas de complot lié à la pandémie de COVID-19 (forcément) avant que pandémie il y ait, etc.
La figure 5 montre la répartition de ces nouveaux groupes d’acteurs dans les articles constituant la couverture journalistique de la pandémie.
Figure 5. Présence des groupes créés (en %) dans les articles analysés
Concernant ces chiffres, il est intéressant de noter que pour quatre groupes d’acteurs, les variations dans leurs présences viennent former des paraboles. C’est-à-dire qu’on observe un creux dans leur inclusion à la couverture journalistique au cours de la deuxième période d’analyse. Celui-ci s’explique fort probablement par le redoux des cas au cours de cette période. Effectivement, les articles de la deuxième période ont été écrits durant l’été 2020 ce qui, rétrospectivement, constitue une période pouvant être qualifiée de « creux entre deux vagues de cas ». Pour la première fois depuis des mois, la situation était plutôt stable dans les milieux de travail et dans les milieux de vie. Il semble ainsi que la couverture ait été influencée par les critères de l’urgence et de l’instantanéité. Par exemple, les travailleurs de première ligne sont très mobilisés dans les articles lorsqu’ils se font happés par les vagues de cas, mais beaucoup moins lors de « l’accalmie » et ce, même si l’on sait que cette période moins occupée par les cas de COVID-19 a été vécue telle une période de rattrapage pour les travailleurs de premières lignes.
En outre, nos analyses permettent un constat très intéressant concernant la dualité entre les « personnes affectées sociales » et « personnes affectées physiquement ». Malgré le fait que le virus SRAS-CoV-2 ait d’abord et avant tout des répercussions physiques sur les individus, au sein des 15 873 articles, les personnes affectées socialement sont plus souvent mises de l’avant que les personnes affectées physiquement. Certes, les deux groupes sont très présents. Or, proportionnellement, les individus affectés socialement sont en moyenne 24,8 % plus présents (38,3 % vs 30,7 %). Cette propension de la presse écrite à mettre à l’avant-plan les individus devant composer avec les conséquences sociales de la pandémie permet de comprendre que, lorsque la population est concernée, la couverture journalistique met davantage l’emphase sur les conséquences de la pandémie (en tant que processus demandant une réponse sociale) plutôt que sur les conséquences du virus (par exemple sur le corps humain).
Finalement, pour ce qui est des groupes de complot, il est intéressant de noter que leur présence dans les articles est très faible : si elle a presque doublé entre la première période et la troisième, elle se chiffre toujours sous la barre des 2 %. Bien que les groupes de complots soient souvent considérés comme omniprésents dans la sphère publique (Mercier, 2020), nos analyses indiquent qu’ils sont peu présents dans la presse écrite. Nous posons l’hypothèse que l’impression d’une omniprésence de ces groupes provient de l’espace qu’ils occupent sur les médias sociaux.
Les sujets principaux des articles
La pandémie est multifacette et tous les articles n’abordent pas les mêmes enjeux. De notre perspective, chaque article constitue une opportunité de cristalliser une ou plusieurs facettes de la pandémie. Nous voyons la mise à l’avant-plan de certaines facettes comme indiquant ce qui, selon la presse écrite canadienne, constitue la réalité pandémique lors des périodes étudiées.
Comme mentionné précédemment, les articles analysés ont permis de mettre au jour 40 thèmes. La couverture journalistique canadienne de la pandémie serait donc créée par l’écriture d’articles visant à aborder ces 40 thèmes. Or, ceux-ci n’occupent pas nécessairement le même espace au sein de la couverture. Certains sont davantage favorisés par les auteurs. Nous avons donc évalué l’importance (en termes de fréquence) de ces thèmes au sein de notre corpus.
Cela étant, spécifions que nos analyses ont seulement permis de déterminer les sujets principaux des articles. Certes, un article peut couvrir plusieurs sujets. Toutefois, c’est seulement le sujet principal de chacun des 15,873 articles qui nous intéressait ici. Pour déterminer le sujet principal d’un article (lorsqu’un article couvrait plus d’un sujet), nous avons évalué l’espace (en nombre de lignes) qu’occupent les sujets. Celui occupant le plus d’espace est reconnu comme le principal. En cas de nombres de lignes identiques, le sujet présenté en premier est reconnu comme le principal. Ajoutons aussi que ce ne sont pas tous les articles qui abordent la pandémie ou le virus qui ont ceux-ci comme sujet principal. Selon la période, entre 27,3 % et 31,9 % des articles n’avaient pas la pandémie ou le virus comme sujet principal.
La table 2 présente les trois sujets les plus abordés dans les articles ayant la pandémie comme sujet principal au cours des périodes d’analyse. Elle montre que les thèmes principaux sont similaires, peu importe la période étudiée : les cas de COVID-19 et la course aux vaccins l’arrêt et la reprise du sport le ralentissement et le redressement économique. Cependant, l’ordre d’importance de ces sujets change au fil du temps. De même, l’importance des différents sujets principaux au sein de leur période change également. Par exemple, « les cas de COVID-19 et la course au vaccin » constituent un sujet beaucoup moins présent dans la période 3 que dans la période 1 (14,4 % vs 26 %). Ces chiffres indiquent, notamment, que la couverture journalistique s’est diversifiée et que les articles portant sur les cas et la course au vaccin se trouvent dilués au sein de sujets nouveaux.
Table 2. Les trois sujets sur la pandémie les plus abordés lors de chaque période.
Au cours de la première période, c’est le virus lui-même qui fait les manchettes. Les cas se multiplient, les connaissances sur le virus sont faibles, le bilan quotidien des victimes s’alourdit considérablement. Lors de la deuxième et de la troisième période, les cas de COVID-19 et la course aux vaccins demeurent le sujet principal des articles, mais dans une plus faible proportion. Les articles, au cours de ces périodes, traitent tant des cas d’infections que de la course aux vaccins. La population en connaît davantage sur la maladie, et la présence d’articles traitant de ses conséquences potentielles se raréfie. Toutefois, le thème de la campagne de vaccination vient s’ajouter au palmarès lors de la troisième période, puisque la course aux vaccins s’achève. C’est plutôt une course à la procuration des vaccins qui se dessine, c’est pourquoi il en est tant question. Les critiques fusent de partout à l’endroit du gouvernement canadien pour son manque d’approvisionnement, puis à l’endroit des gouvernements provinciaux pour leur gestion des vaccins.
Lors de la première période, avec le confinement, de nombreuses questions quant aux conséquences économiques sont soulevées, ce qui explique l’importance du thème du ralentissement économique. Ce thème regroupe les articles abordant les mesures étatiques visant à contrebalancer le ralentissement, mais aussi les opinions qu’ont les spécialistes et les propriétaires d’entreprise, par exemple. Dès la deuxième période, on assiste à un changement de perspective et un nouveau thème économique émerge : le redressement économique. En effet, l’économie reprend, le déconfinement partiel arrive et les commerces peuvent ouvrir leurs portes à nouveau. Ainsi, les enjeux économiques se redessinent en suivant l’actualité : après avoir couvert les actions prises pour ralentir la propagation du virus, qui ont également freiné l’économie, les articles se concentrent davantage sur la reprise, le redressement ou la planification économique.
Les sports, qu’il soit question de leur arrêt ou de leur reprise, font toujours partie des thèmes les plus abordés dans les articles. Cette question a été particulièrement traitée dans les médias canadiens, entre autres pour aborder l’annulation des Jeux olympiques de Tokyo (puis la décision de les maintenir ou non en 2021), l’annulation puis la reprise des ligues majeures, mais aussi l’annulation et la reprise des activités sportives dans les ligues récréatives ou dans les centres d’entrainement. Cette dernière sous-catégorie a fait couler beaucoup d’encre, puisque de nombreuses personnes réclamaient des assouplissements pour recommencer à pratiquer leurs activités.
Ainsi, notre analyse thématique permet de mettre en exergue les considérations particulières liées aux trois périodes étudiées. Lors de la première période, tout s’arrête. C’est un moment de pause, de remise en question, d’incertitude. Lors de la seconde période, le processus de reprise s’amorce. Il s’agit d’une période tampon. Finalement, lors de la troisième période, une certaine normalité pandémique s’installe. Effectivement, il est presque deux fois moins question des cas et on accueille la vaccination, signe que des dispositifs sont mis en place afin de permettre aux populations de poursuivre leurs vies dans des sociétés où le virus est présent.
Les stratégies discursives mobilisées par les auteurs des articles
En réalisant l’analyse qualitative des articles, nous avons pu constater que l’écriture de ceux-ci pouvait varier sur plusieurs points. En premier lieu, nous avons relevé que si certains auteurs appuient leurs articles sur leurs seuls propos ou leurs seules conceptions de l’actualité, d’autres vont avoir recours aux citations, qu’elles soient directes ou indirectes. En second lieu, des articles vont démontrer des stratégies rhétoriques variées. Certains vont miser sur la logique, d’autres vont miser sur les arguments d’autorité et certains vont opter pour des articles résolument centrés sur l’émotion. En troisième lieu, comme les articles constituent des actes de communication à l’intention d’un public, nous avons relevé que ceux-ci traduisent des intentions communicationnelles variées, allant de l’information à la dramatisation. En dernier lieu, concernant la finalité communicationnelle des articles, nous avons aussi constaté que les articles portent des traces explicites d’un processus d’oralisation visant à interpeller davantage le lectorat. Des auteurs vont se mettre en scène dans les articles, vont interpeller les lecteurs vont personnifier des éléments d’information et vont s’expliquer en procédant par analogie ou comparaison.
Recours aux citations
Dans les articles, les auteurs font le choix d’utiliser ou non des citations. Les citations peuvent être directes (recours direct aux paroles d’un individu) ou indirectes (recours à la paraphrase). La table 3 montre la répartition de l’utilisation des différents types de citations au cours de chacune des périodes analysées.
Table 3. Recours aux citations dans les articles (en %)
Les données montrent que les auteurs des articles ont très souvent recours aux citations directes et indirectes dans leurs articles. Pour ce qui est des citations directes, on constate un recours stable au fil des périodes. Leur utilisation dans environ les trois quarts des articles peut s’expliquer par la nature politique, scientifique et sanitaire de la pandémie. En effet, les auteurs reprennent souvent les paroles des politiciens ou encore des spécialistes pour informer la population de l’évolution de la pandémie.
Les citations indirectes, elles, augmentent considérablement entre les deux premières périodes et la troisième. Cette augmentation n’est pas surprenante à l’aune des constats émis par Charron (2006) et indiquant qu’afin de rendre leurs textes plus attractifs, fluides et faciles à lire pour les lecteurs, les journalistes contemporains, notamment politiques, vont avoir tendance à favoriser les citations indirectes. Ainsi, une explication pour nos résultats pourrait être qu’après plusieurs mois « d’éclipse médiatique », les auteurs des articles déploient des stratégies afin de maintenir l’intérêt de leurs lecteurs.
Type d’argumentaire utilisé
Lors de l’analyse qualitative, nous avons remarqué qu’il est possible de catégoriser en trois branches les stratégies d’argumentation générales utilisées par les auteurs des articles. Par emergent fit (Corbin et Strauss, 2015), nous expliquons ces branches comme révélant le triangle rhétorique d’Aristote composé du logos, de l’éthos et du pathos. Ainsi, pour transmettre l’information aux lectorats, les auteurs mobilisent des argumentaires centrés sur les faits et la logique (logos), sur les arguments d’autorités (éthos) ou sur les émotions (pathos). La figure 6 présente la répartition des stratégies d’argumentation générales utilisées dans les articles et comment ces utilisations ont évolué au fil du temps.
Figure 6. Répartition des types d’argumentaire (en %) dans les articles pour chacune
des périodes
Comme on peut le constater, les stratégies argumentaires générales atteignent des pics de couverture à des moments différents : le logos, lors de la première période, l’éthos, lors de la deuxième période et le pathos, lors de la troisième période. Il est aussi intéressant de mettre en exergue que l’ordre d’importance des stratégies est le même lors des deux premières périodes (1 – logos, 2 – Éthos et 3 – Pathos), mais elle change pour la troisième période (1 – Logos, 2 – Pathos et 3 – Éthos). Plusieurs pistes peuvent expliquer ces constats statistiques.
Entre le 27 janvier et le 27 avril 2020, 80,4 % des articles ont été rédigés par un journaliste d’information ou par une agence de presse. Le virus venait tout juste d’arriver en sol canadien et seuls quelques experts canadiens pouvaient se prononcer à propos d’une maladie sur laquelle on en connaissait encore bien peu. Les articles permettaient d’offrir des portraits factuels des situations d’autres pays (par exemple, la Chine ou l’Italie) et permettaient surtout de relayer les informations émises par l’OMS et d’autres spécialistes en santé. C’est d’ailleurs lors de cette période que tous les acteurs en santé sont les plus présents (voir figure 3).
Entre le 27 juin et le 27 septembre 2020, une proportion encore très haute des articles a été rédigée par des journalistes d’information ou des agences de presse (79,5 %). De fait, le logos est toujours la stratégie dominante. Cela dit, cette période est aussi l’hôte de la plus grande proportion d’articles démontrant un argumentaire guidé par l’éthos. Cela peut s’expliquer du fait que cette période a été la scène de diverses modifications, à travers le Canada, dans les mesures visant à faire face à la pandémie. Certaines mesures d’assouplissement ou, au contraire, de durcissement ont été instaurées. Cela a impliqué des incertitudes qui, comme nous le constatons, ont favorisé la présentation d’arguments d’autorités. Par exemple, des arguments tels qu’« il faut faire confiance à la science et aux scientifiques » ou, encore, « la santé publique juge que les bénéfices dépassent les sacrifices » ont été particulièrement présents durant cette période.
Finalement, entre le 27 novembre 2020 et le 27 février 2021, période lors de laquelle 74,4 % des articles ont été rédigés par des journalistes d’information ou des agences de presse, on constate un sommet dans l’utilisation du pathos. Ce recours peut être lié à un essoufflement face à la rationalité, tant du côté des professionnels de l’information que de la société civile. Après tout, c’est durant cette période que la marque du « un an du virus en sol canadien » a été franchie. Les journalistes d’opinion et les personnes qui ne sont pas des professionnelles de l’information sont plus nombreux à ce moment à rédiger des articles. Après plusieurs mois de réalité pandémique, les gens témoignent de leur mécontentement ou, même, de leur détresse, en basant leur argumentaire sur leurs émotions plutôt que sur les faits ou les opinions d’experts. De même, des journalistes vont plus fréquemment relayer des nouvelles visant à toucher la fibre émotive du lectorat, par exemple, en relatant des situations où des familles ont été brisées par le virus, ou encore, les conséquences sociales de la pandémie sur la violence familiale.
Intentions
Il est de notre compréhension que les articles analysés, en tant qu’acte de communication, portent diverses intentionnalités communicationnelles. Au sein des trois stratégies argumentaires décrites plus tôt peuvent se décliner des intentions variées. En effet, les utilisations des « types d’arguments », qu’il s’agisse des appels à la logique, à l’autorité ou à l’émotion, permettent la poursuite des huit catégories d’intentions mises au jour par notre analyse qualitative. Dans notre corpus, on retrouve alors des articles visant principalement à informer à rassurer à conscientiser ou conseiller à dénoncer ou critiquer à présenter des témoignages à banaliser et à spéculer. Cela dit, comme le montre la table 4, quatre types d’intentions sont particulièrement utilisées dans les articles.
Sans surprise, l’intention d’informer est la plus présente dans les articles, toutes périodes confondues. La seconde plus présente est celle de présenter des témoignages. Ces deux intentions sont en phase avec les idéaux du journalisme d’information (la majorité des articles ont été écrits par des journalistes d’information travaillant pour les journaux ou des agences de presse) qui prônent un rapport neutre et factuel à l’actualité (Brin, Charron et al., 2006). Cela étant, il est particulièrement pertinent de s’attarder sur les autres types d’intention qui, tout de même, sont reconnus comme principaux dans environ 20 % des articles constituant notre corpus.
Nos analyses permettent de constater que certains articles traduisent les intentions de rassurer et d’autres de spéculer. Cela dit, ces intentions se sont raréfiées au fil du temps. Si au début de la pandémie, les auteurs des articles cherchaient à se faire rassurants face à une pandémie comportant beaucoup d’inconnu ou, encore, si certains ont cherché à spéculer pour expliquer ce qui ne l’était pas encore (officiellement), ces intentions ont diminué au fur et à mesure que des informations devenaient accessibles.
Inversement, les articles visant à conscientiser ou à conseiller ont augmenté au fil du temps. Cette dynamique peut aussi être expliquée par le contexte de la pandémie. Lors de la première période, les réponses sociosanitaires établies par les autorités étaient plutôt simples, en ce qu’elles marquaient un contraste clair avec la normalité des Canadiennes et Canadiens. Par exemple, certaines provinces en mars et avril 2020, ont décrété le confinement obligatoire. Pareille mesure ayant créé une rupture claire avec la réalité « normale » des citoyennes et citoyens. Or, à partir de la deuxième période, des mesures d’adaptation ont été instaurées dans plusieurs provinces afin de créer une normalité pandémique. Ces mesures, en faisant l’objet de modifications constantes (selon les développements liés au virus), ont dû être massivement communiquées aux publics. On peut alors constater que les articles journalistiques démontrent de plus en plus l’intention des auteurs de conscientiser et conseiller le lectorat envers les mesures à prendre pour faire face à la pandémie. Ceux-ci agissant parfois tels les porte-voix des autorités publiques.
Table 4 – Répartition des intentions principales dans les articles des trois
périodes analysées
Finalement, les articles visant principalement à dénoncer ou critiquer (intention principale présente dans près d’un article sur onze) ont été particulièrement présents lors de la deuxième période (été 2020). Encore une fois, cette fluctuation semble contextuelle puisque la période estivale a été marquée par une baisse des cas d’infection. Face à un « niveau d’alerte » en baisse dans la plupart des provinces et territoires canadiens, bien des auteurs ont désiré ouvrir le dialogue pour qu’une forme d’évaluation soit faite concernant, notamment, la gestion de la crise faite par les autorités publiques. De fait, les articles visant à dénoncer ou critiquer ont été moins fréquents lors de la période trois, qui correspond au début de la « deuxième vague de cas » dans bien des provinces et, donc, à une remonté du niveau d’alerte.
Procédés discursifs
Nos analyses qualitatives ont permis de constater que lorsque les auteurs des articles s’éloignent de l’intention d’informer, ils peuvent avoir recours à différents procédés discursifs. Par emergent fit (Corbin et Strauss, 2015), nous identifions ces procédés à ceux que Watine (2006) décrit comme visant « l’oralisation » du discours journalistique. Selon le chercheur, l’utilisation croissante de ces procédés indique une tension de plus en plus grande entre les idéaux du journalisme d’information et ceux du « journalisme de conversation » (Watine, 2006).
Concrètement, cinq procédés discursifs ont été identifiés dans le corpus analysé. Le premier est XXl’auto-mise-en-scène de l’auteur : afin d’adopter un style conversationnel et d’augmenter le sentiment de proximité avec le lecteur, l’auteur utilisera des mots qui l’impliquent directement dans son article, tels « nous », « je », « mon », etc. Le deuxième procédé est l’interpellation explicite du lectorat. Celui-ci vise à ce que le lecteur se sente personnellement concerné par l’article et implique, par exemple, l’emploi de mots tels que « vous », « tu », etc. Par exemple, un article peut mentionner : « Après tout, vous êtes les contribuables qui devront payer pour ces mesures. » Le troisième procédé est la personnification. Celui-ci vise à faire en sorte que le lecteur développe un lien émotif plus rapide et plus fort à l’actualité. Il s’agit de donner des caractéristiques humaines à des objets ou des éléments inanimés, qui n’en auraient pas autrement. Par exemple, des auteurs vont utiliser l’expression « mass killer » pour désigner le virus. Le quatrième procédé est l’emploi de métaphores ou d’analogies. En utilisant ce procédé, des auteurs cherchent à générer une conception imagée de la pandémie. Citons par exemple les travailleurs de première ligne qui ont longtemps été appelés « anges gardiens » ou le contexte de pandémie qui a souvent été qualifié de « war time » par les journaux anglophones. Le cinquième procédé est la comparaison avec d’autres pandémies ou d’autres périodes de la pandémie. Encore une fois, ce procédé éveille l’imaginaire du lectorat, en ce sens qu’il implique de faire appel à des référents qui ne sont pas liés à la présente pandémie afin de cadrer certaines dimensions de celle-ci. Par exemple, pour établir la gravité du virus SRAS-CoV-2, des auteurs vont comparer ses effets à ceux du virus de grippe H1N1 (ayant causé une épidémie au Canada en 2009-2010). Ce procédé implique donc d’inclure dans les textes des « lunettes » à travers lesquelles le lectorat doit décoder les informations ou opinions qui lui sont livrées.
La figure 7 montre l’évolution de l’utilisation des procédés au cours des trois périodes analysées.
Figure 7. Répartition des types d’argumentaire (en %) dans les articles
pour chacune des périodes
Deux tendances peuvent être observées dans cette figure : l’augmentation de l’auto-mise-en-scène des auteurs et de l’interpellation explicite du lectorat, de même que la diminution du recours aux autres procédés. Tel que nous l’interprétons, la première tendance démontre que le maintien de l’intérêt des lecteurs a été un enjeu dans la présente couverture journalistique. Elle démontre aussi que les procédés les plus favorisés pour maintenir cet intérêt visent le développement d’une plus grande proximité avec les lecteurs. De fait, entre la première période et la troisième, on peut constater une augmentation de plus de 50 % des occurrences d’interpellation du lectorat dans les articles traitant de la pandémie (13,9 % vs 21,1 %). Au fil du temps, les auteurs ont donc de plus en plus tendance à inclure les lecteurs dans leur couverture journalistique.
Concernant la deuxième tendance, nous exprimons la baisse dans le recours aux procédés comme étant liée au fait que la « nouveauté » de la crise a également diminué. Au début de la crise, alors que la population et les spécialistes connaissaient peu le virus, les procédés misant sur les euristiques sociaux étaient particulièrement présents dans les articles journalistiques. En offrant des référents connus au lectorat, les auteurs s’assuraient que le contenu de leurs articles soit plus facilement compris. Or, ces usages fréquents (dans la première période, plus d’un article sur huit utilisait la métaphore ou l’analogie) ont eu le potentiel de marquer l’imaginaire de la crise. Il peut effectivement s’avérer complexe de changer le narratif après avoir associé la pandémie à des images aussi fortes que « la guerre ».
En résumé : la première année de pandémie dans la presse écrite canadienne
D’entrée de jeu, notre démarche a permis de mettre en exergue l’importance de la pandémie dans la presse écrite canadienne : près de 130 000 articles ont été publiés par les quotidiens sélectionnés durant les neuf mois étudiés. Devant ce volume important d’articles, la méthodologie mixte préconisée a permis d’offrir un portrait quantitatif, mais qualitativement fondé, de « l’éclipse médiatique » causée par la pandémie dans la presse écrite canadienne. Cela dit, ce projet comporte son lot de limites, notamment : la nécessité d’utiliser une stratégie d’échantillonnage (plutôt que le N total) l’utilisation de variables qualitatives et forcément subjectives dans un projet impliquant la quantification (simultanément une limite et une force du projet) et la variation dans l’accessibilité des données6.
Or, l’originalité et la richesse du portrait brossé grâce à notre démarche permettent plusieurs constats importants. Premièrement, nos chiffres démontrent que les agences de presse ont joué un rôle clé dans la réponse immédiate des quotidiens canadiens à la crise planétaire posée par le coronavirus. L’importance de la crise sur les différentes sphères de notre société a fait en sorte que les médias ont dû revoir leurs pratiques. Pendant la période d’adaptation (la première période analysée), les agences de presse ont fourni près du tiers des articles constituant la couverture journalistique de la pandémie.
Deuxièmement, nos analyses indiquent que la longue durée de la crise semble favoriser un basculement des textes vers l’opinion, l’émotion, l’oralisation et la conscientisation. Effectivement, un an après l’arrivée du virus en sol canadien, la couverture journalistique de la pandémie présentait une hausse du recours aux auteurs ayant pour objectif premier de livrer de l’opinion au lectorat, une hausse des articles utilisant le pathos pour guider leur argumentaire, une hausse des procédés discursifs visant à apparenter les textes à des discours oraux et une hausse de la présence d’articles visant à ouvertement conseiller ou conscientiser le lectorat. Tel que nous les comprenons, ces changements sont tributaires du double rôle des journalistes lors de la pandémie. D’une part, il est attendu d’eux qu’ils contribuent à maintenir et fidéliser le lectorat de leurs journaux, de là le recours à des stratégies devant permettre de rendre les contenus des articles plus digestes et attractifs (Watine, 2006). D’autre part, comme constaté par Lacroix et Carignan (2021a), les journalistes sentent qu’ils ont un rôle à jouer dans la mitigation et la réduction des effets négatifs de la crise, de là, la place croissante de l’opinion des auteurs et de l’intention principale de conseiller ou conscientiser.
Finalement, notre analyse des thématiques et des protagonistes présentés par les articles permet de constater que plus le temps passe, plus les enjeux liés à la pandémie se complexifient et se diluent. La couverture met en exergue que les effets de la pandémie s’immiscent dans un nombre croissant de sphères sociales et du quotidien. D’une part, la pandémie est de plus en plus abordée de façon secondaire dans les articles. Une transition est donc amorcée dans la considération de la pandémie : si la couverture initiale plaçait la pandémie tel un événement, un an plus tard, la couverture place de plus en plus la pandémie comme le contexte dans lequel se déroulent des événements. D’autre part, la couverture est beaucoup moins orientée autour de thématiques phares. Lors de la première période analysée, la thématique la plus présente mobilisait 26 % de la couverture. Lors de la troisième période, la thématique la plus présente mobilisait 14,4 % de la couverture. Cela dit, si la crise est d’abord et avant tout sanitaire, la manière dont la presse écrite canadienne traite de la pandémie laisse entrevoir une diminution des considérations sanitaires et une augmentation des considérations socioéconomiques. Notamment, plus le temps passe et moins les acteurs « santé » occupent une place importante dans la couverture. C’est le contraire pour les individus affectés socialement par la pandémie et les acteurs économiques, qui atteignent tous les deux un sommet de présence lors de la troisième période analysée.
Concluons en rappelant que la couverture journalistique de la pandémie constitue un objet de recherche vaste et en apparence sans fin. Au moment d’écrire ces lignes, la pandémie de coronavirus fait partie du quotidien planétaire depuis deux ans. Depuis le 27 février 2021, soit la date de publication des derniers articles collectés et analysés lors de ce projet, énormément d’événements se sont produits et le monde fait face à de nouvelles problématiques telles que l’hésitation vaccinale, les variants (Delta, Omicron, etc.), les inégalités dans la couverture vaccinale mondiale, etc. Les bénéfices liés au fait de comprendre comment des médias communiquent la crise et ses enjeux sont importants. Des démarches subséquentes visant à évaluer la couverture de la deuxième année pandémique seraient judicieuses. Est-ce que les tendances observées lors de la première année se poursuivent ? Se transforment ? Se résorbent ? D’autres questions pour d’autres recherches.  
Olivier Champagne-Poirier, Marie-Ève Carignan et Marc D. David sont professeur.e.s
au département de communication de l’Université de Sherbrooke.
Notes
1Les territoires ont seulement des journaux bihebdomadaires ou hebdomadaires. Ces journaux, en ayant des fréquences de publication différentes de celles des provinces, ont été exclus. La base de données doit permettre de réaliser des comparaisons quantitatives entre les provinces. Il était impossible de comparer quantitativement la couverture faite par des journaux ayant 365 numéros/années et des journaux ayant 104 numéros/années.
2Ces deux moteurs de recherche regroupent des bases de données médiatiques importantes et sont accessibles gratuitement au personnel et aux étudiants de l’Université de Sherbrooke.
3Cette recherche s’inscrit dans un projet subventionné par les IRSC et intitulé « The role of communication strategies and media discourse in shaping psychological and behavioral response to the COVID-19 outbreak ». Ce projet global est mené sous la direction de Mélissa Généreux, professeure agrégée au Département des sciences de la santé communautaire de l’Université de Sherbrooke.
4Dans sa forme actuelle, ce projet a demandé plus de 2500 h pour la collecte des articles, leur analyse qualitative (sur NVivo) et leur codification sur SPSS. À ce propos, il importe de remercier, pour leur participation à ce projet, Zobaida Al-Baldawi, Jennifer-Ann Beaudry, Lysandre Bonin, Isabelle Bouchard, Vanessa Bournival, Frédérique Charron, Gabrielle Crevier, Blaise Doré-Caillouette, Nicolas Gendron, Lina-Jeanne Grimard-Marchand, Alexandra Joseph, Émilie Leblanc, Ève Leclair, Annabelle Maheu, Guillaume Marcotte, Tania Mohsen, Roselyne Phaneuf, Bianca Raymond, Loïc-Alexandre Rousseau et Claudia St-Pierre.
5Le N pour cette figure est à 14 393 puisque 1480 articles de notre corpus ne permettaient pas d’établir qui en étaient les auteurs.
6Pour une raison qui nous est inconnue, au moment de réaliser la 3e phase de cette recherche, les articles du Edmonton Journal et du Winnipeg Sun n’étaient plus accessibles sur Eureka, ProQuest ou une quelconque plateforme en libre accès. Les articles de ces quotidiens n’ont pu faire partie des analyses pour la 3e période.
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DOI:10.31188/CaJsm.2(8-9).2022.R047